Intervention de François Pupponi

Séance en hémicycle du 22 novembre 2013 à 9h30
Ville et cohésion urbaine — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Pupponi, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, le constat dont nous partons est accablant, c’est celui de l’échec des politiques publiques à propos de ces territoires depuis maintenant plus de trente ans. Ce n’est pas l’échec de la politique de la ville : elle a fait ce qu’elle pouvait, dans ces périodes troubles et difficiles, c’est surtout un échec dû à l’absence du droit commun. C’est aussi le résultat du saupoudrage trop longtemps pratiqué dans ces territoires et un peu partout, y compris dans des territoires qui ne justifiaient pas qu’on vienne les aider particulièrement. C’est aussi, monsieur le ministre, l’échec dû à une absence d’évaluation ; le drame de la politique de la ville, c’est qu’elle fixait peu d’objectifs et qu’elle n’évaluait pas les résultats.

Bien sûr, des choses ont été faites, et heureusement ! Heureusement que la politique de la ville était là, durant ces trente dernières années, pour éviter des catastrophes encore plus importantes que celle que nous connaissons ! Permettez-moi de citer trois ministres qui auront marqué ces trente dernières années : Michel Delebarre, Claude Bartolone et Jean-Louis Borloo, dont je salue la présence, aujourd’hui, parmi nous.

Devant ce constat accablant, vous avez préféré, monsieur le ministre, contrairement à d’autres qui, régulièrement, nous annonçaient des plans Marshall pour les banlieues, travailler discrètement, dans la concertation, écouter les acteurs, qui, depuis tant d’années, ont eu des choses à dire pour essayer de trouver des solutions. Vous avez écouté les gens, et, les ayant entendus, vous avez décidé de nous proposer le projet de loi que nous examinons aujourd’hui.

Ce texte permet de répondre à des questions simples.

De quoi parle-t-on ? Vous nous proposez de redéfinir la politique de la ville, de bien dire quels en sont les axes prioritaires et quels sujets il est indispensable de prendre en compte pour s’occuper des populations concernées.

Deuxième question, de qui parle-t-on ? Quels sont les quartiers prioritaires sur lesquels la République doit enfin pouvoir travailler de manière coordonnée et efficace ? Vous avez entendu, monsieur le ministre, je le salue, les questions légitimes d’un certain nombre de nos collègues sur les fameux territoires sortants de cette géographie prioritaire, et vous avez proposé, par voie d’amendement, que l’on mette en place une veille active, pour faire en sorte que la sortie, justifiée, de certains ne soit pas trop brutale, pour qu’on puisse les accompagner.

Troisième question, comment fait-on ? Vous nous proposez un contrat unique pour qu’ensemble les acteurs se mettent d’accord, sous la forme d’un même et unique document, sur ce qu’il faudrait faire pour ces quartiers et définissent comment, avec le droit commun de chacun, parvenir à une plus grande efficacité.

Quatrième question, qui fait quoi, et avec quels moyens ? Vous proposez de réordonner, de modifier complètement la gouvernance, tant au niveau national qu’au niveau local. Au niveau national, c’est bien sûr la création d’un commissariat général, fruit de la fusion de la DATAR, de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances et du secrétariat général du comité interministériel des villes. Mon collègue Dominique Baert, qui a beaucoup travaillé sur la gouvernance au niveau national, a beaucoup oeuvré pour que l’on aille dans ce sens. Vous proposez également que les choses soient réorganisées au niveau local, qu’il soit bien précisé ce que doit faire l’intercommunalité et ce que doit faire le maire. Vous avez vraiment entendu les inquiétudes des élus locaux, des maires, des élus territoriaux, qui, depuis tant d’années, mettent en oeuvre les politiques locales et qui ne voudraient pas que le maire soit ainsi sorti de la politique de la ville ; Marc Goua a été très actif dans ce domaine-là. Vous avez rassuré tout le monde, et un certain nombre d’amendements que nous proposons viendront confirmer l’existence d’un axe intercommunalité-commune au service d’une plus grande efficacité.

En ce qui concerne les moyens, monsieur le ministre, vous m’aviez fait l’honneur, dans le cadre de la concertation nationale, de me confier la rédaction d’un rapport sur la péréquation dans ces territoires, et nous avions constaté qu’il n’existait pas, contrairement à ce que nous pouvions imaginer, de dotation particulière pour la politique de la ville. Il existe des dotations pour les villes pauvres, qu’elles soient urbaines ou rurales, il existe de la péréquation en faveur de territoires en difficulté, mais il n’existait pas de dotations pour les territoires particuliers de la politique de la ville, sauf peut-être la dotation de développement urbain, mais celle-ci est plus une subvention qu’un fonds de péréquation. Vous nous proposez donc de créer cette fameuse dotation politique de la ville, qui sera le bras armé financier de l’État dans ces territoires.

Il faut aussi – un amendement a été adopté en commission, qui le précise – que les territoires autour des quartiers prioritaires soient aussi exemplaires. Nous avons malheureusement trop d’exemples de territoires riches, qui comptent en leur sein des quartiers difficiles et ne sont tout simplement pas solidaires, ou ne le sont pas suffisamment. Certes, il y a des territoires vertueux – on peut parler de Toulouse, du Grand Lyon, du Nord –, il y a des territoires où, effectivement, on prend en compte les difficultés d’un certain nombre de quartiers, mais il y a malheureusement encore trop souvent des territoires où les égoïsmes locaux font que ces quartiers sont abandonnés à la solidarité nationale, les acteurs locaux ne voulant pas trop les aider. Le pacte financier proposé dans ce texte va, je le crois, dans le bon sens : il faudra que les intercommunalités s’engagent. Elles sont maintenant parties prenantes de la politique de la ville. Il faudra qu’elles prennent des engagements financiers, pour aider les quartiers les plus en difficulté.

Cinquième question, que fait-on ? Vous arrivez à faire enfin ce que nous espérions tous depuis longtemps, que nous nous occupions, en même temps, de l’urbain et de l’humain. L’urbain, c’est bien entendu le fait que le programme national de rénovation urbaine 1 soit enfin financé complètement. L’inquiétude était grande parmi les élus locaux : ce PNRU serait-il financé jusqu’au bout ? On craignait tous, depuis de nombreuses années, la fameuse « bosse » de l’ANRU. Vous apportez une réponse très concrète en finançant la fin du PNRU et en créant ce NPNRU, ce nouveau programme national de renouvellement urbain, qui va permettre, pour les années à venir, de terminer l’oeuvre importante commencée par l’ANRU. Celle-ci est reconnue unanimement par les acteurs locaux et vous proposez de lui donner un plus grand rôle. En effet, elle pourra à la fois agir dans le domaine économique et celui des commerces, avoir une expertise internationale, et être impliquée dans le cadre du programme d’investissements d’avenir. C’est là une reconnaissance de cette agence, qui a fait un travail exceptionnel, que chacun salue.

Vous répondez aussi, monsieur le ministre, aux questions « pour qui ? » et « avec qui ? ». C’est aussi une grande avancée de ce texte. Tout le monde en parle depuis de nombreuses années, je n’ai jamais rencontré un élu, un acteur, qui ne me dise qu’il faut associer les habitants, tout le monde le dit, mais les expériences sont diverses ; certains y arrivent, d’autres n’essaient même pas. Un débat s’est tenu en commission, en particulier avec notre collègue Bies, rapporteur pour avis de la commission du développement durable, mais aussi d’autres députés, notamment du groupe écologiste, qui ont fait de nombreuses propositions. Nous aurons encore l’occasion d’en discuter aujourd’hui, puisque le sujet n’est pas clos.

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