Le scandale ne réside pas dans le choix de tel ou tel véhicule législatif pour que ces concitoyens obtiennent des droits, mais dans la situation réelle que vivent ces personnes, et que le législateur n’a pas accepté de changer.
Ce que nous partageons, c’est une volonté sans faille de lutter contre les réseaux de proxénétisme et de traite. La convention contre la criminalité transnationale organisée, dite convention de Palerme, nous y invite ; la fraternité, ce mot beau et fort de notre triptyque républicain, nous y oblige. Ce que nous partageons, c’est le refus du fait que des femmes et des hommes soient contraints à la prostitution pour le compte d’autrui. Tel est le sens de la convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui de 1949, que la France a ratifiée en 1960.
Il serait passionnant d’aborder la question de la prostitution d’un point de vue philosophique, comme vous l’avez fait ce matin, madame la ministre. Votre discours était assez contradictoire : d’une part, vous nous invitez au débat, et d’autre part, vous jetez l’opprobre sur celles et ceux qui ne partagent pas votre opinion. Permettez que je choisisse une voie moins ambitieuse, moins lyrique, en me concentrant sur ce que nous avons à discuter et à voter. Je considère en effet qu’il y a un écart entre les objectifs affichés et la réalité des mesures proposées.
Le texte de la proposition de loi vise, selon ses auteurs, plusieurs objectifs. D’abord, renforcer les moyens d’enquête et de poursuite contre les acteurs de la traite des êtres humains et de proxénétisme. C’est en effet le sens de l’article 1er, qui illustre à merveille les travers du texte et le manque de réflexion d’ensemble de notre commission spéciale. L’enfer est souvent pavé de bonnes intentions : c’est ici le cas.