Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, au moment où nous engageons ce débat, une question s’impose comme un préalable : pourquoi faut-il légiférer en matière de prostitution ? À mon sens, légiférer pour lutter contre le système prostitutionnel est indispensable pour des raisons qui ont trait tant à l’essence même de la prostitution qu’aux effets désastreux qu’elle peut avoir, sur ses victimes mais aussi sur ses clients.
En premier lieu, le proxénétisme est sans conteste l’une des formes d’esclavage qui subsistent dans notre société. C’est d’autant plus vrai que la prostitution « traditionnelle » de rue a peu à peu laissé place à de nouvelles formes de prostitution, essentiellement organisées par des réseaux, dont la grande majorité – on dit que c’est presque 90 % – concerne des personnes étrangères, parfois en situation irrégulière. Dans ces réseaux, où la violence est omniprésente, les prostituées sont bel et bien des victimes à la merci de leurs proxénètes.
En second lieu, nous devons légiférer pour une raison simple : les prostituées ne sont pas libres. On entend souvent l’argument selon lequel certaines prostituées auraient choisi et aimeraient leur « métier ». Pourtant, mes chers collègues, que diriez-vous si vous appreniez que votre propre fille ou votre propre fils se prostitue ? Diriez-vous qu’il s’agit là d’un choix libre ?
Quoi qu’on en dise et quelles que soient les circonstances, la prostitution n’est jamais exercée de gaieté de coeur. On y entre le plus souvent suite à un événement traumatique, quand elle ne résulte pas d’une contrainte directe. Près des deux tiers des prostituées ont été victimes, dans leur enfance ou leur jeunesse, de violences à caractère sexuel. En réalité, le vécu de la prostitution est moins la mise en oeuvre militante du principe de libre disposition de son corps que la réalité beaucoup plus crue de la location de ses organes sexuels par contrainte ou nécessité.
Dans la même logique, la prostitution est totalement contraire au principe d’indisponibilité du corps humain.