Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du 29 novembre 2013 à 15h00
Renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Tout à fait. Mais je tenais à le dire, puisque la persévérance nous a été présentée comme un argument en faveur de cette proposition de loi.

Je l’ai déjà dit tout à l’heure : nous devons essayer de débattre aussi dignement que possible sur un sujet complexe, difficile, où des questions philosophiques sous-tendent les positions des uns et des autres.

J’ai noté par exemple que, dans les interventions de ceux et celles qui promeuvent cette proposition de loi, notamment dans l’intervention de Mme la ministre, le raisonnement est souvent très centré sur les rapports entre les hommes et les femmes, sur l’égalité entre les sexes, sur l’idée que la prostitution serait une manifestation de domination de l’homme sur la femme. Quand bien même la prostitution est, sans aucun doute, très majoritairement le fait de femmes, est-ce à dire que cela ne serait plus un problème dès lors qu’il s’agirait de deux hommes, ou d’une cliente et d’un homme – le cas est plus rare, mais il existe –, ou même, on peut l’imaginer, de deux femmes ?

On nous dit que cette proposition de loi vise à traduire en actes plus concrets la position abolitionniste de la France et qu’elle constitue à cet égard une avancée. Je peux concevoir qu’il y ait une distinction entre l’abolition et l’interdiction de la prostitution. Après tout, je suis pour l’abolition de la chasse et non pour son interdiction. De même, je suis pour l’abolition de l’usage des armes, pas pour leur interdiction. Cela étant précisé, ma position serait plutôt favorable à l’abolition de la prostitution, car l’idée d’un échange monétaire autour de l’acte sexuel, personnellement, me dérange. Mais si c’était cette idée-là qui guidait les auteurs de cette proposition de loi et motivait leur opposition à la prostitution par la pénalisation du client, il faudrait également traiter dans ce texte de la pornographie : là aussi, il y a quelqu’un – souvent une femme, mais parfois aussi un homme – qui vend l’usage de son corps pour un acte sexuel, et quelqu’un d’autre qui en tire de l’argent : celui qui tourne le film ou encore celui qui le produit. Et celui qui achète ou loue le film ne devient-il pas du coup un client ? Étrangement, cette question est toujours occultée.

Légiférer sur un tel sujet n’est pas critiquable, même si les Français ont sans doute d’autres priorités par les temps qui courent. Encore faut-il que cela contribue à régler un problème.

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