Sur cette question des violences faites aux femmes, et notamment aux femmes prostituées, je considère que le temps est venu du réveil français.
Le réveil français, c’est considérer la prostitution comme un phénomène qui relève bien de la traite des êtres humains. Sachant que 90 % des femmes prostituées en France sont les otages de réseaux et de trafics européens et internationaux, nous devons mener ce combat au nom de la lutte contre la traite et l’esclavage.
À cet égard, je rappelle que selon le décret relatif à l’abolition de l’esclavage dans les colonies et les possessions françaises du 27 avril 1848, « l’esclavage est un attentat contre la dignité humaine ». Le moment est opportun pour citer cette phrase de Victor Schoelcher prononcée le 1erdécembre 1848 à l’Assemblée nationale constituante : « Nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves. » C’est bien de cela qu’il s’agit quand nous combattons le système prostitutionnel et ses réalités.
Le réveil français, c’est traduire en acte les textes votés et signés par la France. La position abolitionniste de la France doit être enfin une politique globale avec pour objectif la sortie du système prostitutionnel. C’est en particulier le sens de l’article 3 de notre proposition de loi, qui prévoit des volets réinsertion, hébergement, action médico-sociale et gouvernance avec la création d’une instance de coordination dans chaque département.
Le réveil français, c’est considérer les personnes prostituées comme non pas des coupables mais des victimes. Pour cette raison, je suis clairement favorable, comme beaucoup de mes collègues, à la suppression de délit de racolage.
C’est également considérer que les clients réels ou potentiels doivent être responsabilisés. À ce titre, je suis favorable à la création d’une interdiction d’achat d’acte sexuel et, bien évidemment, à la pénalisation des clients, points sur lesquels je sens d’ailleurs un mouvement favorable. La Suède, cela a été évoqué, est à cet égard un bon exemple : on y a constaté une baisse très significative de la prostitution de rue, répétons-le ; les opposants à notre texte devraient le reconnaître.
Le réveil français, c’est constater l’échec accablant de ce que j’appelle la politique des bordels en Allemagne. Depuis 2006, ainsi que l’a indiqué mon collègue Philip Cordery, les Allemands ont constaté un développement accéléré des réseaux et des trafics qui concernent aujourd’hui 400 000 femmes, dont 80 % sont d’origine roumaine ou bulgare. Élizabeth Badinter elle-même l’a reconnu dans une interview au monde : « On voit bien qu’en Allemagne, les choses dérapent, les mafieux profitent de la reconnaissance de la prostitution. » Permettez-moi ce commentaire personnel : enfin un propos lucide de Mme Badinter !