Mesdames, messieurs les députés, je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été développés en faveur du texte. Permettez-moi en revanche de dissiper les malentendus que j’ai perçus dans la bouche de certains contradicteurs.
M. de Courson l’a dit : c’est clairement un débat de conscience que nous ouvrons ici. Je note pour ma part, car c’est suffisamment rare pour être souligné, que nous aurons entendu à la tribune des représentants de tous les bancs s’exprimer en faveur de ce texte. Cela doit à tout le moins nous interroger.
Ce que j’ai entendu cet après-midi, je vous l’avoue, me rassure : nous sommes collectivement passés du stade où l’on a un avis à émettre sur la prostitution au stade où l’on a une expertise à partager. J’invite toujours à bien faire la distinction entre ces deux notions : tout le monde peut avoir un avis, mais tout le monde n’a pas suffisamment creusé le sujet, le dossier pour comprendre quels sont les écueils des différentes positions.
À ce propos, je voudrais revenir sur ce malentendu – je regrette que M. de Rugy ne soit plus dans l’hémicycle – qui consiste à confondre la position abolitionniste et la position prohibitionniste. Ce n’est pas la même chose.
Face à la prostitution, nous avons en réalité trois possibilités. Le réglementarisme, option choisie par les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Espagne, a été suffisamment commenté : il comporte les défauts que l’on sait, notamment le développement de la prostitution. Le prohibitionnisme consiste quant à lui à interdire à la fois l’exercice de la prostitution à la personne prostituée et le recours à un acte sexuel tarifé au client. C’est une façon de fermer les yeux sur tout ce qu’on refuse de voir sans se préoccuper du rapport entre la personne prostituée et son client, ou des rapports inégaux qui dans notre société sont à l’origine du recours à l’achat d’une prestation sexuelle.
L’abolitionnisme enfin qualifie la prostitution de violence, protège les victimes de cette violence que sont les personnes prostituées au lieu de les criminaliser et leur offre des alternatives ; il responsabilise en revanche les clients en plus des proxénètes qui sont poursuivis par ailleurs. Les clients sont responsables en effet parce qu’ils créent la demande et donc, d’une certaine façon, le marché ; ce sont eux qui incitent les proxénètes à faire leurs affaires.