Cet article est fondamental parce qu’il permet vraiment de donner corps à l’idée selon laquelle ce texte n’est pas seulement une loi de pénalisation du client mais aussi une loi visant à permettre aux personnes prostituées de sortir de la prostitution et d’avoir un espoir concret que ce qu’il leur est proposé pour en sortir n’est pas fallacieux.
Les préoccupations exprimées par Mme Fort et M. Goujon, je les partage – et, si l’on y réfléchit bien, il n’y a aucune raison qu’elles ne soient pas partagées par toute l’Assemblée. Je rappellerai deux éléments avant de faire part d’une information qui m’est parvenue lors de l’interruption de nos travaux.
Premier élément : nous nous sommes posé les mêmes questions, dans les mêmes termes, avec les mêmes interrogations, voire les mêmes inquiétudes avec le cabinet d’Éric Besson lorsque nous étions à l’ouvrage sur la loi du 9 juillet 2010. Nous avions encadré les choses, comme c’est le cas pour ce texte – les amendements nous permettront en tout cas d’en donner l’assurance –, pour qu’il n’y ait pas d’appel d’air. Et il n’y en a pas eu, ainsi que cela a pu être constaté.
Second élément : si les réseaux voulaient s’engouffrer dans la brèche en disant aux personnes qu’ils vont chercher que, si elles se prostituent et affirment vouloir en sortir, elles auront des papiers, cela ne fonctionnerait pas. Ce que nous n’avons pas assez souligné en effet, c’est que ces personnes, pour une grande partie d’entre elles, croient venir en Occident pour trouver du travail et non pour se prostituer. Cela ne veut pas dire que, si elles avaient su qu’on allait les prostituer, elles auraient refusé parce que, de toute façon, elles n’étaient pas capables de refuser quoi que ce soit. Mais il est plus facile pour les réseaux de dire à ces personnes qu’ils vont les soustraire de l’enfer – qu’ils ont eux-mêmes créé – en les emmenant dans les paradis de l’Ouest que de leur dire carrément qu’elles vont se prostituer et qu’on les aidera ensuite à avoir des papiers. Si elles souffrent, si elles savent qu’elles vont se prostituer, qu’est-ce que cela peut leur faire d’avoir des papiers si leur destin, c’est de rester prostituées ?
Je partage donc les interrogations qui se sont fait jour parce que je les partageais en 2010 à l’occasion de la loi relative aux violences faites aux femmes, mais je crois qu’elles ont maintenant leur réponse.
L’information que je souhaitais apporter, c’est qu’un dispositif de même nature a été adopté en Italie, et le résultat est là, plusieurs mois après : il n’y a pas eu d’appel d’air.
Il me semble que l’ensemble de ces trois éléments est de nature, sinon à rassurer totalement nos collègues, du moins à commencer à les rassurer. Je crois en tout cas que cet article est vraiment fondamental.