Le Gouvernement, monsieur le député Coronado, estime que l’attribution d’une carte de séjour temporaire ne peut jamais être un automatisme. On ne peut pas dessaisir le préfet de son pouvoir d’appréciation. Mme la rapporteure a absolument raison : il faut que le préfet puisse apprécier si l’accusation qui a été portée contre les auteurs de traite est crédible ou s’il s’agit, cela peut exister, d’une accusation imaginaire ou calomnieuse. Cette faculté d’appréciation est importante et ce n’est pas non plus le régime de l’arbitraire que vous avez décrit, car les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont claires. Selon l’article L. 316-1, lorsque l’étranger satisfait aux conditions définies par cet article et qu’il a rompu tout lien avec les auteurs présumés des infractions de traite, la carte de séjour temporaire d’une durée minimale de six mois lui est délivrée par le préfet.
Par ailleurs, le travail de la commission spéciale apporte, grâce à cette proposition de loi, des améliorations que je vous rappelle et qui devraient vous agréer. D’une part, la carte de séjour temporaire sera renouvelée de plein droit pendant toute la durée de la procédure pénale, si les conditions prévues pour sa délivrance continuent d’être satisfaites. D’autre part, une nouvelle procédure d’admission au séjour pour les victimes de la traite ou du proxénétisme est instituée pour les victimes engagées dans le parcours de sortie de la prostitution, indépendamment de leur coopération avec les autorités judiciaires – ce qui devrait vous satisfaire.
Je suis sensible à votre argumentation quant au nombre de personnes qui, victimes de la traite, saisissent les juges ou la police. Comme je l’ai dit dans mon introduction, nous sommes en train, avec plusieurs ministères, de travailler à un plan national de lutte contre la traite des êtres humains dans lequel nous voulons prendre de nouvelles mesures qui compléteront utilement cette PPL. Il s’agit, d’une part, de faciliter la domiciliation des victimes de la traite lors du dépôt des demandes de titre et, d’autre part, de revenir sur le délai de réflexion de trente jours donné aux victimes pour choisir de bénéficier ou non de la possibilité d’admission au séjour sous réserve de porter plainte contre les auteurs. Ces mesures seront à mon avis fort utiles pour améliorer le système.
J’y ajoute celle que nous avons commencé à adopter dans le cadre du projet de loi sur l’égalité femmes-hommes qui, après le Sénat, reviendra prochainement devant vous : l’exonération des taxes sur la primo-délivrance ou le renouvellement des titres de séjour pour les femmes étrangères victimes de violence ou de traite.
Tout cela constitue, petit à petit, un ensemble pour beaucoup mieux accompagner les femmes victimes de la traite ou de l’exploitation sexuelle, et les encourager à porter plainte et à sortir de leur enfer. J’espère que cela vous conviendra. En tout état de cause, l’avis du Gouvernement sur votre amendement est défavorable.