…les travaux induits par la rénovation énergétique et la gestion des déchets recyclables. Nous vous proposerons également un aménagement de la taxe sur les ordures ménagères, un dispositif d’aide aux énergies renouvelables grâce à l’investissement solidaire et la création d’un versement transport additionnel et interstitiel pour le développement des transports collectifs. Ces mesures ont toutes un point commun : elles viennent donner corps à l’engagement du Gouvernement, maintes fois réaffirmé, en faveur de la transition écologique.
Mais au-delà de ces dispositions particulières, ce PLFR doit répondre aussi à l’inquiétude parfois légitime de nos concitoyens sur l’efficacité et la justice de notre système fiscal. La période actuelle est en effet dangereusement animée par la montée de la contestation fiscale. S’il s’agit parfois de la défense de quelques intérêts particuliers contre l’intérêt général, nous ne pouvons ignorer les interrogations de nos concitoyens sur notre système fiscal.
Pour y apporter des réponses, nous avons évoqué à plusieurs reprises la nécessité de mieux cibler et conditionner les aides aux entreprises, de redonner de l’équité à l’impôt et d’intensifier la lutte contre la fraude fiscale. Pour ces trois priorités, le présent PLFR présente quelques avancées : mesures exceptionnelles pour les PME innovantes, encouragement à la reprise d’entreprises par les salariés, notamment en créant des SCOP, aménagement des dispositifs d’aides, ces mesures sont plus ciblées que le crédit d’impôt compétitivité et devraient donc produire des effets plus concrets et plus rapides.
La réorientation d’une partie de la collecte des assurances vie vers des investissements productifs, à savoir les PME qui peinent parfois à trouver les fonds nécessaires auprès des banques, mais aussi le logement ou encore l’économie sociale et solidaire, sont des faits marquants de ce PLFR. Ils illustrent la volonté de la majorité de donner un coup de pouce aux secteurs d’avenir, comme d’ailleurs au secteur du bois, indispensable pour la transition énergétique, et qui va bénéficier d’un plan d’aide.
L’aménagement de l’exit tax s’inscrit aussi dans une démarche d’équité. Cette mesure vient renforcer celles prises dans le cadre de la loi de lutte contre la fraude fiscale, de la loi bancaire et des amendements, issus notamment des groupes écologiste et socialiste, adoptés en première lecture du projet de loi de finances 2014. Comme le rapporteur général en commission, nous proposons d’aller encore plus loin, en alignant, pour la déductibilité des charges, les pays à fiscalité privilégiée sur les pays non coopératifs et en étendant de nouveau la notion d’abus de droit.
Enfin, la réforme de la taxe d’apprentissage, avec un objectif de simplification et de renforcement des moyens destinés aux régions et aux centres d’apprentissage, a pour objectif de faire progresser le nombre d’apprentis de 440 000 actuellement à 500 000 en 2017. Les écologistes ont toujours défendu la place centrale des régions dans ce dispositif, et cette mesure nous semble donc aller dans le bon sens.
Malgré ces avancées, nous nourrissons plusieurs inquiétudes qui illustrent la nécessité d’une large réforme fiscale. La première inquiétude concerne, cela a été dit à plusieurs reprises, le niveau des rentrées fiscales. Par rapport à la loi de finances initiale, cette loi de finances rectificative constate une perte de 11,2 milliards d’euros sur l’impôt sur le revenu, sur l’impôt sur les sociétés et surtout sur la TVA.
Je voudrais souligner que, lors de la loi de règlement sur les comptes 2012, la Cour des comptes avait déjà souligné l’écart très significatif entre les prévisions du ministère et les encaissements réalisés – en l’occurrence, 3,5 milliards d’euros d’écart entre les prévisions de TVA de la loi de finances rectificative pour 2012, pourtant votée en décembre 2012, et les recettes constatées. L’analyse de ce manque à gagner sur les recettes nous semble un préalable à toute démarche de réforme fiscale. Il nous faut aujourd’hui comprendre la nature de ces écarts, avant d’aller plus loin.
L’autre inquiétude vient des ajustements de dépenses, à hauteur de 3 milliards d’euros, soit un besoin conséquent. Nous ne pouvons que souligner que la mission « Écologie » est, une fois de plus, fortement impactée, avec 440 millions d’euros en annulation de crédits pour le programme « Infrastructures et services de transports ». Alors même que la majorité prévoit d’engager une nouvelle étape de la transition énergétique, cette diminution est un mauvais signal, d’autant que ce budget subit déjà le report de la taxe poids lourds.
Les questions posées en commission sur cette baisse de crédits sont à ce jour restées sans réponse. Nous ne savons toujours pas pourquoi ou comment le Gouvernement a abouti à l’annulation de ces 440 millions d’euros de crédits, et nous espérons que les débats nous permettront d’être éclairés sur cette question.
L’annulation de crédits gelés, à hauteur de 153 millions d’euros, pour la mission « Aide publique au développement », ne manque pas non plus de nous inquiéter.
À l’inverse, les ouvertures de crédits témoignent de l’action de l’État en faveur de l’emploi et du soutien apporté aux dispositifs de solidarité. Les besoins de crédits concernant les politiques de l’emploi, l’hébergement d’urgence, les APL, l’aide médicale d’État et l’allocation adulte handicapé témoignent à la fois malheureusement de l’approfondissement des difficultés sociales de nos concitoyens, mais aussi de l’engagement de l’État à leur côté. La répétition de ces mesures rectificatives d’une année sur l’autre montre toutefois la nécessité d’ancrer leur renforcement dans la durée.
En définitive, cette loi de finances rectificative montre les limites du système fiscal existant. « Complexe voire illisible, pas toujours efficace et souvent injuste », selon la formule employée ici même le 19 novembre dernier par le Premier ministre, affirmant la nécessité d’une réforme fiscale. De son côté, le rapporteur général nous disait tout à l’heure que l’écart constaté sur les recettes fiscales devait nous inciter également à engager cette réforme fiscale. Ce constat, nous le partageons, cette réforme, nous la demandons, et ce depuis l’ouverture de cette mandature. Elle ne doit pas rester au stade de l’annonce. Pour la réussir, il nous semble qu’elle doit être guidée par trois principes : lisibilité pour les contribuables, justice sociale et efficacité écologique.
Cela doit se traduire notamment par une politique d’investissements durables et un renforcement de la progressivité de l’impôt mais aussi par une révision de l’ensemble des niches fiscales qui ont toutes fait l’objet de maintes évaluations. À ce titre, il est particulièrement inquiétant de voir que malgré les nombreux rapports montrant le caractère anti-écologique, l’effet d’aubaine ou le coût exorbitant par emploi de certaines niches fiscales, on n’ose toujours pas s’attaquer à ces niches de peur de la mobilisation de quelques lobbys défendant, avec efficacité il est vrai, leurs intérêts particuliers. Je pense au crédit d’impôt recherche, à l’exonération de TICPE du trafic aérien ou routier ou à la fiscalité allégée du diesel.
La confiance est-elle suffisante dans le pays pour mettre en oeuvre cette réforme fiscale et les bouleversements qu’elle engendre ? Nous l’espérons. Il n’est en tout cas jamais trop tard pour donner priorité à la justice fiscale, à l’emploi, et à la protection de notre planète.