C’est pour cela que nous inversons la charge de la culpabilité en la faisant désormais porter sur ceux qui profitent de ce système inhumain : les réseaux de traite et les proxénètes, mais aussi les clients.
Chers collègues, nous ne parlons pas d’une situation virtuelle où la prostitution serait libre et où les personnes prostituées feraient le choix de vivre de leurs charmes. Non, nous parlons une réalité sordide qui, comme le dit si bien l’association Zéro macho, porte aussi atteinte à la dignité des hommes. Car loin de participer à leur liberté sexuelle, cela les enchaîne à une conception de la sexualité empreinte de frustration et de domination.
Sans client il n’y a pas de prostitution, sans demande, pas besoin d’organiser le commerce humain.
Pour abolir ce système inhumain, il faut donc responsabiliser ceux qui font le choix de l’utiliser. C’est pour cela que nous décidons de pénaliser celui que l’on appelle le client. Ainsi la société aura les moyens de poser l’interdit de la marchandisation des corps.
Ce n’est ni la morale ni la volonté d’une société régimentaire qui nous anime mais une volonté émancipatrice. Car la liberté ne s’achète pas, comme elle n’est pas non plus synonyme de propriété, surtout lorsque l’on parle d’humanité. Dans le domaine de l’acte sexuel comme dans d’autres, les êtres humains ont droit à d’autres rapports que ceux guidés par la loi du plus fort, par la loi du tout marchand.
Nous avons donc à faire un choix politique non pas, je le répète, au nom de la morale, mais à partir d’une conception que nous avons de la société et du sens que nous voulons lui donner.
Ainsi nous nous mobilisons pour faire avancer les mentalités. Car les femmes doivent pouvoir s’appuyer sur des lois pour conquérir des droits et faire changer le regard de la société à leur égard en utilisant ces droits. Nous bousculons les représentations ancestrales enfermant les femmes dans l’image de la maman et de la putain qu’a dénoncée Simone de Beauvoir.
C’est donc au nom de la liberté de la personne humaine, au nom du droit à l’égalité des femmes et des hommes que je souhaite, avec le groupe GDR, que notre assemblée adopte ce texte et que son examen au Sénat ne tarde pas car pour les victimes de la prostitution, chaque jour compte.