Intervention de Jérôme Cahuzac

Séance en hémicycle du 23 octobre 2012 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 — Présentation

Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget :

Madame la présidente, mesdames les ministres, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans la même stratégie que celle que j'ai eu l'honneur d'exposer la semaine dernière en défendant le projet de loi de finances initiale pour 2013. Cette stratégie repose sur la priorité affirmée par le Président de la République : désendetter notre pays et renouer avec l'équilibre budgétaire, pour des raisons que chacune et chacun d'entre vous connaît bien.

Ce faisant, non seulement nous respectons la parole de la France – car un grand pays tient sa parole –, mais nous nous libérons de l'emprise des marchés et des agences de notation, ces institutions anonymes qui conditionnent actuellement le sort des politiques publiques menées dans notre pays. En effet, aucune d'entre elles ne peut être véritablement menée à bien sans que l'État ou la protection sociale ne trouve sur les marchés de quoi les financer, sans que notre pays fasse l'objet d'un examen scrupuleux, attentif, tatillon de la part de ces agences de notation dont le gouvernement de François Fillon soulignait combien le sort de notre pays pouvait dépendre.

Souvenons-nous du traumatisme causé par la dégradation de la note de la France par une agence de notation ! Fort heureusement, la France a aujourd'hui une signature forte, crédible – si elle l'était déjà dans les mois qui ont suivi cette décision, elle se trouve encore confortée – et je comprends mal les critiques acerbes de l'opposition à l'égard de la politique du Gouvernement quand, de toute évidence, à l'extérieur de nos frontières, la confiance l'emporte sur la défiance.

La troisième raison, c'est que l'endettement est moralement insupportable. Nous récusons ce qui constitue un véritable impôt à la naissance infligé aux jeunes générations : ce n'est pas parce que ceux qui l'acquitteraient ne sont pas encore électeurs que nous ne devons pas avoir le souci de leur bien-être et le respect de leur travail futur.

Enfin, le désendettement constitue également un élément incontestable de la compétitivité des entreprises, tant il est vrai que l'on ne connaît pas d'entreprise pouvant emprunter à un taux inférieur à celui auquel emprunte l'État dont elles ressortent.

Pour toutes ces raisons, les lois de finances et de financement présentées au Parlement s'inscrivent dans une priorité absolue, celle du retour à l'équilibre de nos finances publiques. C'est dans cet esprit, avec cette volonté que nous présentons ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il y a urgence à redresser nos comptes sociaux : entre 2002 et 2011, ce sont près de 160 milliards d'euros de dettes supplémentaires qui ont été contractés par la protection sociale, 160 milliards d'euros d'ailleurs transférés à la CADES, c'est-à-dire aux générations futures. Comme nombre de parlementaires de la mandature précédente, j'ai le souvenir d'une majorité UMP votant le prolongement de la durée de vie de la CADES de 2021 à 2024, ladite majorité n'ayant pas eu, je l'affirme, le courage d'augmenter les impôts pour payer les dettes qu'elle avait elle-même contractées, préférant laisser aux générations futures le soin d'acquitter cette dette. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

On condamne beaucoup, du côté droit de l'hémicycle, les augmentations d'impôt que l'on présente comme un matraquage fiscal, mais que dire, alors, de l'impôt infligé à celles et ceux qui n'ont en rien profité de l'endettement contracté entre 2002 et 2010 ? Que dire de l'impôt futur, de l'impôt à la naissance qui va frapper ceux qui, n'ayant même pas commencé à gagner leur vie, vont tout de même devoir acquitter les dettes contractées par le pays ? Que dire de ce nouvel impôt qui combine, à mon sens, tous les inconvénients imaginables d'une politique mal assumée ? Que dire d'un impôt non assumé – puisque le repousser aux années 2021 à 2024, c'est en transférer la responsabilité à un autre gouvernement, un autre parlement ? Que dire d'une disposition contre laquelle se sont élevés, avec force et courage, certains représentants de l'ancienne majorité – je pense notamment à Yves Bur et au président Warsmann ?

Pour notre part, nous assumons notre choix politique de désendetter le pays. Nous l'avons déjà montré lors de la présentation du projet de loi de finances, et nous nous apprêtons à le refaire lors de l'examen de projet de loi de financement de la sécurité sociale, car les choses ne peuvent continuer ainsi. En 2004, le ministre de la protection sociale, expliquant que le déficit du régime général atteignait 12 milliards d'euros – un niveau déjà abyssal – n'imaginait sûrement pas que le ministre investi des mêmes fonctions en 2010 aurait à assumer un déficit de 28 milliards d'euros ! Certes, la crise est passée par là, qui a sévèrement amputé les recettes affectées à nos régimes de protection sociale, mais sur les 160 milliards d'euros de dettes contractées entre 2002 et 2011, une grande partie – 60 milliards d'euros – l'a été avant que la crise n'éclate. Comment expliquer, autrement que par une inadéquation totale entre les recettes et la dépense, ces 60 milliards d'euros de dettes supplémentaires contractées entre 2002 et 2007 ? Comment l'expliquer autrement que par une politique reposant sur une équation impossible, revenant à diminuer les ressources de la protection sociale tout en maintenant, voire en augmentant les dépenses qu'elle devait assumer ?

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