Cette entorse à l'esprit qui prévaut en Europe pour surmonter la crise justifie à elle seule cette motion de rejet, d'autant que l'ONDAM était respecté depuis deux ans. Le signal ainsi adressé à nos partenaires européens et au monde – et à nos créanciers – est délétère. Une nouvelle fois, le Gouvernement agit à contresens. Ce choix pourrait coûter cher à la France quand, inévitablement, les taux d'intérêt remonteront.
Le projet qui nous est soumis est budgétairement insincère, car il est bâti sur des hypothèses de croissance économique et de la masse salariale déjà démenties par plusieurs organismes internationaux. L'hypothèse de croissance retenue est de 0,8 % du PIB en 2013, alors que le FMI table sur 0,4 % – moitié moins ! D'ailleurs, la Cour des comptes elle-même argumente sur la fuite en avant déficitaire qu'entraînera le taux que le Gouvernement a choisi. Je la cite : « Un taux de croissance annuel de 2,4 % assure un retour à l'équilibre en 2017. Le taux de 2,7 % le repousse à 2019. »
Pour toutes ces raisons, cette motion de rejet s'inscrit dans le prolongement des avis défavorables émis par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, par la Caisse nationale des allocations familiales, par la Caisse nationale d'assurance vieillesse et par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale – on peut dire que ce projet fait pratiquement l'unanimité contre lui !
Ce PLFSS rompt aussi avec les précédents car il abandonne les réformes de structures qui seules peuvent assainir durablement la situation financière de la Sécurité sociale.
C'est le cas pour les dépenses d'assurance maladie, puisque la convergence tarifaire entre établissements est abandonnée, rayée d'un trait de plume pour des raisons dogmatiques. On n'a pas cherché à améliorer sa mise en oeuvre au motif des missions prioritairement dévolues à l'hôpital public en matière de permanence des soins, de capacité d'accueil, d'enseignement ou de recherche. Pourtant, c'était un travail déjà largement engagé, avec, à la clef, une meilleure maîtrise du poste le plus lourd pour l'assurance maladie : plusieurs dizaines de milliards d'euros.
Avec le nouveau report de la tarification à l'activité, c'est une deuxième réforme de structure du financement de l'hôpital qui est abandonnée. Alors que de telles réformes structurelles ont été conduites chez nos principaux partenaires européens, ces deux abandons sont un très mauvais choix pour l'assurance maladie. En effet, comment piloter le financement de l'hospitalisation en se privant des outils les plus efficients ? C'est un retour en arrière irresponsable sur des réformes que les lois de financement de la Sécurité sociale avaient fini par rendre évidentes. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Ce PLFSS concrétise clairement le parti pris du Gouvernement contre l'initiative privée, qu'il s'agisse de l'hospitalisation privée, de la médecine de ville ou de l'industrie pharmaceutique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
S'agissant du service public de l'hospitalisation, le Gouvernement n'accorde de nouveaux financements qu'à l'hôpital public, alors que l'hospitalisation privée accueille chaque année 2 millions de patients et assure 55 % de l'activité chirurgicale. Par ailleurs, c'est sur la médecine de ville et sur l'industrie pharmaceutique que reposent les trois quarts des 2,4 milliards d'euros d'économies.
Le sort des professionnels de santé libéraux n'est pas meilleur, puisque leurs cotisations sociales augmenteront et que c'est dans une ambiance de menace que vous avez conduit à marche forcée les négociations sur le mode d'exercice des médecins. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Même si les dépassements excessifs doivent bien sûr être combattus,…