Je profite de cet amendement pour demander au ministre si le même miracle que celui que nous avons connu avant-hier va se reproduire dans les minutes qui viennent. Je vous ai écrit à plusieurs reprises, ces derniers mois, pour connaître les chiffres concernant l’exit tax, à savoir le nombre de contribuables ayant fait une déclaration et les montants concernés.
Ces renseignements sont d’autant plus simples à obtenir que l’exit tax est géré par un service centralisé : ces informations sont donc parfaitement disponibles. Or, pour le moment, je ne dispose que des données qui viennent d’être évoquées par le rapporteur général. Par conséquent, monsieur le ministre, et ainsi que je vous l’ai écrit à plusieurs reprises, je souhaite obtenir les données complètes pour 2012 et les données pour le premier semestre de 2013, qui sont disponibles.
J’en profite pour vous rappeler que j’ai également écrit à plusieurs reprises pour avoir les données concernant l’ISF au titre des départs de contribuables pour 2011 – je dis bien 2011 : je ne les ai toujours pas ! Comme je le souhaite, nous devons nous mettre d’accord pour mettre en place une sorte d’observatoire permettant de mesurer les problèmes, s’ils devaient exister, de délocalisation de contribuables. Nous avons à notre disposition trois types d’impôts : l’impôt sur le revenu, pour lequel nous avons des éléments – dont mon collègue Marini a d’ailleurs obtenu une actualisation –, l’ISF et l’exit tax. Je souhaite donc vraiment que nous mettions cela en place.
J’irai même plus loin : il faudrait que l’on réfléchisse ensemble sur le type d’indicateurs que l’on pourrait mettre en oeuvre pour mesurer ce phénomène ; vous devriez normalement nous présenter prochainement un rapport sur ce sujet. Si je dis cela, c’est parce que nous avons une moins-value d’environ 1,3 milliard d’euros sur l’impôt sur le revenu. Certains aspects de cette moins-value sont explicables, mais d’autres sont plus difficilement compréhensibles : n’y aurait-il pas derrière ce phénomène, hélas, des départs de contribuables ?
Monsieur le président, j’en appelle à votre indulgence, car j’aimerais revenir un instant sur la question spécifique de l’exit tax. Nous avons mis en place ce dispositif en 2011 parce qu’il avait déjà été mis en oeuvre sous le gouvernement Jospin. À la suite de l’arrêt Lasteyrie du Saillant de la Cour de justice des communautés européennes en 2004, le dispositif de taxation des plus-values latentes avait été annulé car il entravait la liberté de circulation des personnes et des capitaux. En effet, le dispositif mis en place en 1999 obligeait le contribuable qui s’installait hors de France, notamment dans un pays de l’Union européenne, non seulement à déclarer sa plus-value latente, mais à la payer. Cela a donc été considéré comme entravant la liberté de circulation. Pour cette raison, le dispositif mis en place en 2011, et que vient de décrire le rapporteur général, consiste à déclarer, dans le cas d’un départ dans un pays membre de l’Union européenne, par exemple en Belgique – je ne vais pas citer la Suisse… –, la plus-value latente.
Prenons un exemple. Quelqu’un achète une entreprise 100 ; il reste en France pendant vingt ans et la fait prospérer : l’entreprise vaut 1 000. Il va donc déclarer 900 lors de son départ pour la Belgique. Ces 900 ne seront imposés au titre de la fiscalité française que lorsqu’il vendra son entreprise quelques années plus tard en Belgique.
Si l’entreprise vaut 1 500 alors qu’elle n’en valait que 1 000 quand il est parti en Belgique, il sera imposé sur 900, c’est-à-dire la plus-value qu’il a réalisée en France, et sur 500 en fiscalité belge. En revanche, s’il part dans un pays hors de l’Union européenne, il devra apporter des garanties.
Nous avons intérêt à examiner de près ce dispositif, monsieur le ministre. Je m’étais déjà penché sur ce sujet en 2011 en me demandant s’il ne risquait pas d’être contre-productif : on sait que l’enfer est pavé de bonnes intentions…Conserver un maximum d’assiette fiscale dans notre pays, tel est l’objectif que nous devrions tous partager.