Je les avertis : cette démarche fera long feu. La jurisprudence du Conseil est très claire sur ce point : le respect de l’article 24 de la Constitution tient au collège électoral qui élit les sénateurs, pas à l’exercice d’un quelconque mandat.
Au contraire, l’initiative du Sénat fragiliserait l’institution même. Un Sénat au sein duquel chacun représenterait son territoire, sa collectivité, et uniquement celle-ci, ne serait plus le Sénat de la République. Certains sénateurs parmi les plus éminents n’exercent pas d’autre mandat. D’ores et déjà, 40 % des sénateurs ne sont pas concernés par l’application de ce texte. Ils n’en exercent pas moins bien leur mandat, au contraire ! Je sais que certains, ici même, auraient souhaité un périmètre plus souple, mais c’est ignorer l’évolution des mandats locaux. En effet, peu importe le nombre d’habitants, la réalité des missions à accomplir est bien là. Peu importe la taille de la commune, de l’intercommunalité, du département ou de la région, c’est le même niveau d’exigence.
Je sais que certains, au contraire, auraient voulu aller plus vite et faire appliquer ce texte dès mars 2014, mais le Gouvernement a fait le choix de la sécurité juridique. Il s’agissait de garantir l’exercice du droit de suffrage, d’assurer la continuité du fonctionnement des assemblées et d’éviter tout risque de rétroactivité. La formule qui vous est proposée, « l’échéance du renouvellement général de l’Assemblée », a été suggérée par le Conseil d’État : elle permet de répondre à ces trois impératifs. Le Gouvernement a aussi fait le choix de la souplesse politique, afin d’organiser les transitions avec intelligence. Nos concitoyens attendent un texte simple, lisible et sans exception. C’est ce texte qui vous est soumis aujourd’hui. Par deux fois, l’Assemblée nationale a manifesté massivement son adhésion à celui-ci, et cela a encore été le cas, il y a quelques heures, en commission des lois. J’espère et je sais qu’elle le fera à nouveau aujourd’hui.
Nous aurons ainsi tenu un engagement important et répondu à une attente. Nous l’aurons fait dans les temps : avant les élections municipales et européennes de 2014 et avant les élections départementales et régionales de 2015. Très vite, ce texte va porter ses effets politiques. En réalité, il les porte déjà dans la campagne des élections municipales, et vous les connaissez. Sur les marchés ou dans les réunions publiques, les citoyens expriment parfois une demande légitime : serez-vous notre maire à plein temps ? Quel mandat allez-vous choisir ?