Une loi a donc été votée au Sénat de façon à prévenir tout risque qu’un tel jugement se renouvelle. Or ce texte, qui date de 2011, n’est toujours pas inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée, alors que notre calendrier dépend du Gouvernement, madame la ministre ! On comprend bien que les militants des langues régionales se disent que tout ce qu’on leur raconte n’aboutit jamais à des résultats concrets !
La deuxième difficulté que pose votre proposition de loi constitutionnelle, monsieur le rapporteur, c’est qu’elle est très restrictive. Relisons-la : les deux premières lignes sont positives, puisqu’il y est affirmé que la République peut ratifier la Charte européenne, mais les douze lignes suivantes sont objectivement négatives ! Ce sont elles qui inquiètent les militants des langues régionales.
Ces lignes sont la résultante de la décision du Conseil constitutionnel de 1999, mais le contexte est maintenant très différent. La jurisprudence du Conseil peut évoluer, d’autant que sa composition elle-même a été modifiée depuis : peut-être n’aurait-il pas la même position aujourd’hui. Mais demain, si le présent texte est adopté, nous aurons gravé dans le marbre des censures objectives à l’encontre des langues régionales ! C’est très inquiétant. J’espère donc, monsieur le rapporteur, que vous en reviendrez plutôt à la proposition de loi que j’ai déposée avec Alain Marc et que tous les collègues concernés de mon groupe ont signée, qui prévoit tout simplement que la République peut ratifier la Charte européenne, sans poser de conditions dans la Constitution – le Gouvernement pouvant éventuellement émettre des réserves, mais pas dans la Constitution.
Vous dénoncez, madame la ministre, la notion de groupes. On peut le comprendre, car notre république ne s’organise pas autour de groupes. Mais c’est malgré tout pernicieux puisqu’une langue, par définition, sert à échanger avec des tiers, et qu’elle est donc associée à l’idée de groupe. Des esprits malveillants peuvent y trouver à redire. Plus pernicieux encore, la proposition de loi prévoit que l’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public et aux personnes morales droit privé dans l’exercice d’une mission de service public». Cela paraît évident et il ne nous viendrait pas à l’esprit de contester l’usage du français dans les mairies ou de demander la traduction de l’austère Bulletin officiel de l’éducation nationale, ou du plus encore austère, surtout depuis que vous l’avez enrichi ces derniers mois, code général des impôts.