Ensuite, deux autres évolutions, de nature sociologique, ont parachevé la mise en danger de l’alsacien : le déplacement progressif des populations alsaciennes de la campagne vers les villes, plus cosmopolites ; et des phénomènes migratoires, qui ont amené en Alsace des personnes qui ne pratiquaient pas l’alsacien.
La conjonction de ces facteurs, qui relèvent du constat, crée aujourd’hui une situation où l’alsacien est de moins en moins pratiqué dans les grandes villes et par les jeunes, et il est en train de perdre du terrain en milieu rural, même si sa pratique y résiste mieux.
C’est la raison pour laquelle il faut désormais agir et se mobiliser sans relâche pour que les jeunes générations puissent bénéficier d’une transmission patrimoniale culturelle et linguistique aussi riche que celle de leurs aînés.
Bien entendu, collectivement, les Alsaciens ne sont pas restés inertes pour sauvegarder leur patrimoine culturel et linguistique. D’ailleurs, les actions, comme le développement d’une littérature, d’une poésie ou d’un théâtre en alsacien, sont trop nombreuses pour pouvoir être énumérées ici.
Toutefois, la situation reste préoccupante. À la fin des années 1970, un cabaretier et homme politique alsacien, Germain Muller, lançait : « Mier sinn de letschde, de aller letschde » –« nous sommes les derniers, les tout derniers » à parler l’alsacien. Pour nous, il serait inconcevable que l’irréparable soit commis.
Nous voilà à un moment clé de la défense de cette langue qui constitua, en son temps, le terreau si fertile de l’humanisme rhénan. Certes, ratifier la charte n’est pas tout, mais ce serait un outil fantastique pour amplifier la dynamique enclenchée autour de la langue régionale d’une part et du bilinguisme d’autre part.
Cette richesse, loin d’appauvrir la France, ne peut que l’enrichir. Pour nous, le français est bien la langue de la République – c’est indiscutable –, mais nous ne voulons pas perdre notre belle langue d’Alsace : elle est aussi une partie du patrimoine de la France.