Intervention de Chantal Guittet

Séance en hémicycle du 12 février 2014 à 21h30
Artisanat commerce et très petites entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Guittet :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, cher Laurent Grandguillaume – ce sera dit ! (Sourires) –, le projet de loi que nous nous apprêtons à voter répond à l’engagement du Président de la République, pris pendant la campagne, de donner une priorité aux artisans, aux commerçants et aux petites entreprises.

Ces entreprises, beaucoup l’ont dit, contribuent à la vitalité économique et sociale de nos territoires ; ce sont principalement elles qui donnent vie aux villages et aux villes de France. Elles représentent environ 7 millions de salariés et elles contribuent pour un quart à notre richesse nationale. L’importance de leur contribution au tissu économique local est particulièrement importante dans mon département, le Finistère, qui connaît la densité la plus élevée en termes d’artisans. En Bretagne, quelque 52 000 entreprises artisanales ont permis la création de 24 000 emplois en dix ans. Alors que les grands groupes se concentrent dans les agglomérations, la survie de ces petites entreprises est essentielle au maintien de l’activité économique et, par là même, à celui des populations dans les territoires ruraux.

Victimes de la crise économique, les artisans, les commerçants et les TPE demandent des mesures efficaces et rapides. Avec cette loi, nous apportons des réponses précises à leurs problèmes. Pour redynamiser les commerces de proximité, nous proposons de leur faciliter le quotidien, notamment grâce à une simplification de leurs obligations comptables. À l’heure où tout un chacun peut se déclarer artisan, nous redonnons un sens à ce métier en favorisant la reconnaissance et l’expansion des entreprises artisanales, mais aussi en garantissant les qualifications professionnelles de nos artisans.

Par ailleurs, il fallait également mettre fin à la concurrence déloyale que pouvait constituer l’usage détourné du statut d’auto-entrepreneur. Il s’agit non pas, bien sûr, de contester ce statut qui a permis de créer des milliers d’emplois et qui stimule le sens de l’entreprenariat de nos concitoyens, mais de mettre fin à certaines dérives. Dans le Finistère, par exemple, le nombre des auto-entrepreneurs a explosé. Depuis 2009, un artisan sur deux pouvant, au vu de ses qualifications professionnelles, s’enregistrer sous le régime normal, a choisi le statut d’auto-entrepreneur pour des raisons fiscales et administratives. Et pour cause : outre les exonérations fiscales qu’il accorde, le statut libère des contraintes en termes d’enregistrement ou de justifications des qualifications professionnelles. Mais, pour des activités identiques, leurs avantages paraissent injustes pour les artisans ou commerçants soumis au droit commun.

Le projet s’attaque donc à cette concurrence déloyale en réformant le statut d’auto-entrepreneur, afin qu’il retrouve son utilité d’origine, celle d’un tremplin vers la création d’entreprise. Nous simplifions et harmonisons les régimes de l’entreprise individuelle en créant un régime unique de micro-entreprise et en facilitant l’accès au statut d’EIRL. Avec la création d’un statut juridique unique de l’entreprise individuelle, il est mis un terme au flou existant. Cette réforme répond donc aux inquiétudes des artisans, tout en consolidant l’entreprise individuelle.

Cette loi et celle que nous examinerons la semaine prochaine – laquelle vise à encadrer le détachement de travailleurs européens à bas coût qui viennent eux aussi concurrencer nos artisans – constituent un message fort de soutien adressé par l’État et la représentation nationale aux petites entreprises.

Si je me réjouis de ce texte, dont nous ne pouvons que nous enorgueillir, il y a un point que nous devrions, à mon sens, approfondir : la loi Novelli de juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services a été un échec. La régionalisation n’a pas eu lieu et les chambres de métiers sont restées au milieu du gué. L’échelon départemental souffre directement du recul des subventions de l’État et de l’équilibre financier incertain.

L’inquiétude est d’ailleurs vive au sujet du financement de ces chambres. Celles-ci sont confrontées à une baisse des taxes affectées et des recettes, liées au succès des auto-entrepreneurs, au point que plusieurs d’entre elles ont commencé à licencier. En Bretagne, l’exonération des frais de chambres pour les auto-entrepreneurs a représenté l’an dernier un manque à gagner de 400 000 euros, avec pour conséquence un déficit pour la chambre des métiers s’élevant à 200 000 euros. Nous répondons à cette inquiétude en établissant une équité entre les différentes entreprises en matière d’obligations et de charges. À l’avenir, les entreprises individuelles devront contribuer aux frais de fonctionnement de ces chambres. C’est une mesure de justice, dans la mesure où les chambres des métiers engagent sur leurs fonds des actions de promotion et de formation au travers de l’apprentissage qui bénéficient à toutes les entreprises, y compris les entreprises individuelles.

Cependant – et c’est là, madame la ministre, un point important –, ce ne sera pas suffisant pour relancer l’apprentissage, actuellement en perte de vitesse, avec une diminution de 8 % en 2013. La forte baisse du nombre d’apprentis l’an dernier doit nous alerter. Il faut soutenir financièrement l’apprentissage, travailler étroitement avec les régions et les branches professionnelles s’agissant de la teneur des enseignements et ouvrir une vaste promotion de l’apprentissage auprès des jeunes. Il nous faut à présent prendre fait et cause pour l’alternance, qui est essentielle à la santé de nos petites entreprises et centrale pour l’emploi des jeunes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion