Pourtant, le temps insuffisant pour leur préparation, et surtout l’annonce du caractère non négociable de certains de ces objectifs, comme l’encadrement des loyers, la GUL ou le PLUI, auraient pu conduire à des séances beaucoup moins apaisées. Nous ne pouvons cependant que regretter que vous n’ayez pu négocier qu’une programmation changeante et un calendrier d’examen peu mobilisateur. Tout cela a conduit à des examens en commission dans les derniers jours de session, à un nombre impressionnant d’amendements de votre majorité, y compris en seconde lecture, à la présentation d’amendements du Gouvernement ou des rapporteurs, comme celui sur l’article 8, à la veille des séances ou en séance, comme ceux portant sur le PLUI, pour ne parler que de ceux-là. Ils ont abouti à ce que vous avez appelé une « adaptation témoignant de la richesse du travail parlementaire ». En réalité, ces atermoiements, ces ajustements étaient le signe que le doute s’était progressivement installé face aux constats et recommandations des rapports remis au Premier ministre, face aux coups de boutoir du Sénat, aux réactions des partenaires de la politique du logement, aux protestations de la majorité des maires et à celles des petits propriétaires.
Ce que vous présentiez avec assurance comme des objectifs non négociables de votre projet de loi le sont progressivement devenus. C’est une reculade salutaire. Certaines parties de votre projet de loi, qui sont restées stables, ont reçu notre soutien dès l’origine. Je veux parler de la lutte contre l’habitat indigne, les marchands de sommeil, les copropriétés dégradées. Mais il faut dire que les mesures présentées dans ces domaines ne résultaient pas d’une simple volonté idéologique mais de propositions étayées et non contestées : celles du rapport du président de l’ANAH, Dominique Braye, du sénateur Claude Dilain, et des propositions de loi Lefebvre ou Huyghe. Ces propositions ont été enrichies de l’apport de certains députés qui peuvent encore nous faire profiter de leur expérience de maire. Je veux aussi vous dire notre adhésion aux mesures qui améliorent les conditions de gestion des copropriétés.
Nous approuvons les modifications de prise de décision par l’assemblée des copropriétaires rendant possible la prise en compte de nouveaux défis comme l’économie d’énergie ou l’anticipation des travaux de gros renouvellement. Nous approuvons les mesures visant à apporter une clarification dans l’exercice de la profession de syndic, de ses rapports au conseil syndical, tout en jugeant que certaines vont trop loin et apportent des charges nouvelles inutiles. Nous approuvons, enfin, certaines des mesures touchant à l’exercice de la profession d’agent immobilier et d’encadrement de certains de leurs actes et missions. Mais vous normalisez toutes les étapes d’une transaction, de l’affichage en vitrine à la signature de l’acte. Vous changez profondément la structure de rémunération des agents immobiliers. Voilà une nouvelle occasion pour vous et votre majorité d’administrer une profession, de complexifier les procédures et de déséquilibrer le rapport entre le locataire et le propriétaire, et donc de multiplier entre eux les possibilités de contentieux.
Vous complexifiez au-delà du nécessaire le rapport entre bailleur et preneur, par une multitude de documents type que vous présentez comme une protection supplémentaire pour le bailleur. Vous créez de la norme, qui s’impose à tous, pour corriger les errements condamnables de quelques-uns. C’est cela, le moteur de la complexification normative : à partir d’une situation singulière, on crée une norme, une procédure qui s’impose à tous. Mais c’est une consolation pour les agents immobiliers : vous ne rendez plus possible la gestion en bon père de famille – ou bonne mère de famille, je ne sais plus ce qu’il faut dire –…