Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il nous revient aujourd’hui d’étudier une proposition de loi organique présentée par nos collègues de l’opposition et créant les objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie – les ORDAM.
Cette proposition de loi organique propose de mettre en place une déclinaison régionale de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. Cet ONDAM constitue une cible, ainsi que le cadre financier des politiques de maîtrise médicalisée et de régulation.
Afin d’améliorer le suivi de l’exécution de l’ONDAM en cours d’exercice budgétaire, la loi du 13 août 2004 a créé le Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie. Ce comité est chargé d’alerter le Parlement, ainsi que le Gouvernement et la CNAM, lorsque l’évolution des dépenses d’assurance maladie est incompatible avec le respect de l’objectif national voté par le Parlement.
Il faut rappeler que la volonté de mettre en place des ORDAM ne date pas d’hier. En effet, la création des agences régionales de santé – les ARS –, via loi HPST de 2009, a notamment fait émerger la question relative à la mise en place d’une déclinaison régionale de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie à travers un objectif régional de dépenses d’assurance maladie. N’oublions pas non plus qu’en 2007, Mme Bachelot avait également proposé d’introduire une marge de bonification des conventions nationales pour les médecins libéraux, une enveloppe régionale, un ORDAM.
Supprimé in extremis de la loi Bachelot après un bras de fer avec les médecins libéraux, le projet de création d’objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie a toutefois reçu un avis favorable du comité d’évaluation de la réforme de la gouvernance des établissements publics de santé en juillet 2011, puisque ce dernier préconisa la création, à court terme, d’objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie.
Venons-en maintenant au contenu de cette proposition de loi organique : l’article 1er propose de modifier l’article LO 111-3 du code de la sécurité sociale afin de permettre au Parlement de créer, au sein de l’ONDAM, une part régionale dont le montant serait fixé dans la loi de financement de la sécurité sociale de l’année, et rectifié, le cas échéant, pour l’année en cours, par le Parlement.
Au sein de cette nouvelle enveloppe régionale, le Parlement serait également amené à fixer le montant de vingt-six objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie, construits sur le modèle de l’ONDAM. En outre, le montant de chaque sous-objectif de l’ONDAM – ou des ORDAM – ne serait plus fixé qu’à titre indicatif afin de favoriser la fongibilité des crédits entre chaque sous-enveloppe de l’ONDAM et des ORDAM.
L’article 2 propose, quant à lui, de modifier l’article LO 111-4 du code de la sécurité sociale en modifiant, par conséquence, le contenu du rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année, afin que ce dernier décrive, notamment, la part de l’ONDAM consacrée aux ORDAM pour les quatre années à venir.
Enfin, l’article 3 modifie les conditions de vote de la loi de financement de la Sécurité sociale afin de permettre au Parlement de se prononcer, par un vote distinct de l’ONDAM, sur le montant de la part régionale de l’ONDAM consacrée aux ORDAM, ainsi que sur le montant de chaque ORDAM.
Pour le groupe Radical, Républicain, Démocrate et Progressiste, il est utile de rappeler qu’un tel changement risque de mettre les régions en concurrence les unes avec les autres, ce qui n’est pas idéal. De plus, les taux ne seraient pas les mêmes suivant les régions et seraient calculés selon l’offre des soins ou le nombre d’hôpitaux, ce qui créerait une distorsion entre les différentes régions. Cela n’est pas acceptable.
En outre, il aurait été intéressant, le cas échéant, de regarder les implications concernant les territoires, et non pas les régions ; ainsi, en regardant le tout à travers le prisme d’un niveau territorial concernant des projets de santé adaptés aux territoires par les territoires, cela aurait été nettement plus intéressant.
Rappelons également que l’ORDAM pourrait devenir un instrument de maîtrise comptable pure et dure des dépenses ciblant prioritairement les soins de ville, alors que ceux-ci sont, non seulement déjà maîtrisés, mais également en recul de plus d’un milliard d’euros sur 2013.
Instituer des mécanismes régionaux de régulation de la dépense nécessaire pour tenir les ORDAM reviendrait tout simplement à renoncer à une gestion uniforme et nationale du système d’assurance maladie.
Enfin, il serait difficile de fixer le montant et les taux d’évaluation des ORDAM, notamment en tenant compte des disparités liées aux habitudes de consommation, ou encore des disparités épidémiologiques, aux modes d’organisation des soins et à l’incertitude de l’évaluation d’un taux de progression tendanciel des dépenses.
Tout en sachant qu’il existe déjà des coefficients géographiques servant à compenser des surcoûts identifiés dans certaines régions, il faut également rappeler que, depuis 2012, il existe aussi une revalorisation du fonds d’intervention régional – le FIR. Nous devons également tenir compte du fait que la création d’un septième sous-objectif au sein de l’ONDAM est consacré au FIR dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’année 2014.
Enfin, le groupe des radicaux de gauche et apparentés estime que la stratégie nationale de santé qui nous sera prochainement présentée par le Gouvernement, permettra de mieux se pencher sur ce problème, et de façon plus poussée.
Pour toutes ces raisons, les députés du groupe Radical, Républicain, Démocrate et Progressiste voteront donc, vous l’aurez compris, contre cette proposition de loi organique.