Madame la garde des sceaux, mon intervention sera similaire à celles, excellentes, de mes collègues Gérard et Ciotti. Après le général Soubelet, les préfets ont à leur tour, révélé le mois dernier dans un rapport la démotivation des forces de sécurité qui ont « le sentiment d’être condamnées à remplir le tonneau des Danaïdes en raison de l’absence de suites pénales des interpellations effectuées ». Le bilan 2013 de la délinquance en atteste, avec une hausse de pratiquement tous les crimes et délits, en particulier à Paris. Votre réponse depuis la circulaire de septembre 2012, qui – pour faire bref – enjoignait aux procureurs de ne pas appliquer les lois décidées par le gouvernement précédent, consiste aujourd’hui à présenter, dès le lendemain des municipales, un projet de loi faisant de la prison l’exception.
Contre l’augmentation de la délinquance générale, vous voulez supprimer les peines plancher, alors qu’il faudrait au contraire les étendre aux multiréitérants. Contre la délinquance des mineurs, vous voulez réformer l’ordonnance de 1945, au risque d’entraîner l’irresponsabilité pénale des moins de 13 ans. Contre la criminalité des mafias de l’Est, les enquêteurs se sont trouvés privés de moyens, notamment celui que constitue la géolocalisation – la chancellerie étant, de ce point de vue, encore plus restrictive que la Cour de cassation. Contre la drogue, vous voulez modifier la loi de 1970, afin d’autoriser les salles de shoot, dépénalisant ainsi de fait la consommation de drogue.
Enfin, contre la délinquance de proximité, vous envisagez, suivant les préconisations du rapport Raimbourg, de décorrectionnaliser les délits qui gâchent pourtant la vie quotidienne des Français : occupation des halls d’immeubles, vente à la sauvette, consommation de stupéfiants, conduite en état d’ivresse. Madame la garde des sceaux, alors que la délinquance explose – surtout depuis 2013 – et que l’insécurité est redevenue une préoccupation majeure de nos concitoyens, ces mesures vous paraissent-elles vraiment de nature à enrayer la montée de l’insécurité dans notre pays ?