Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 26 février 2014 à 15h00
Formation professionnelle — Présentation

Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

C’est la raison pour laquelle vous êtes là, monsieur Cherpion, pour apporter votre appui à cette réforme.

Cette réforme ouvre par ailleurs un nouvel espace de dialogue social, sur la formation professionnelle et les compétences, dans les branches comme dans les entreprises, rendant dès lors chacun acteur de son parcours. Qui peut dire que ce n’est pas utile, à l’heure où le dialogue social s’impose comme une condition indispensable à la performance de l’économie française ? J’ajoute qu’elle introduit une simplification radicale du système de collecte, d’affectation, de mobilisation des fonds pour le rendre plus transparent, plus lisible, plus simple d’accès pour les entreprises comme pour les personnes grâce notamment à la réforme des contributions obligatoires et à la rationalisation du réseau des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage. Qui peut dire que ce n’est pas nécessaire ? Ni ceux qui croient à la simplification, ni ceux qui recherchent l’efficacité de l’affectation des fonds de la formation professionnelle.

Mais surtout, c’est une réforme globale, qui prend en charge tous les champs de la formation, des savoirs de base aux savoirs de pointe, de la sécurisation des parcours à la simplification des démarches, de l’envie de se former au contrôle de la formation, de la formation des plus fragiles à la montée générale du niveau des compétences.

Mais si cette refondation remet les individus au centre de la formation et fait le pari de la responsabilité de l’entreprise, elle ne sera fructueuse que dans un cadre de garanties collectives, de solidarités, de régulations, qui doivent s’exprimer à trois niveaux : au niveau territorial, au niveau professionnel et au niveau national.

L’ancrage territorial est fort, tout d’abord, avec l’achèvement de la décentralisation de la formation professionnelle des personnes privées d’emploi, mais aussi du pilotage de l’apprentissage et du service public de l’orientation. C’est à l’échelle de chaque territoire, chaque bassin d’emploi, chaque tissu économique et social que se construira désormais la politique de formation professionnelle.

Au-delà du territoire, la réforme de la formation professionnelle repose aussi sur des solidarités et des garanties collectives au niveau professionnel, dans la branche, ou au niveau interprofessionnel. Il ne s’agit pas de laisser l’individu seul avec ses doutes et ses projets. Le compte personnel de formation n’est pas un « chèque formation » que le salarié ou le demandeur d’emploi devrait mobiliser seul face à lui-même. C’est pourquoi la réforme donne corps au conseil en évolution professionnelle et élargit l’accès à la validation des acquis de l’expérience. En effet, l’enjeu de l’époque que nous vivons n’est plus seulement le diplôme, mais bien de se former tout au long de la vie.

De la même façon, les entreprises, notamment les plus petites, ne seront pas abandonnées dans cette réforme. La mutualisation vers les très petites entreprises est développée de manière inédite et le débat parlementaire a permis de renforcer les outils de mutualisation au profit des PME. Ces fonds mutualisés seront affectés plus puissamment à des enjeux relevant de l’intérêt général et pour lesquels une régulation publique est légitime : l’accès à un premier niveau de qualification, la progression et la promotion professionnelle, le retour à l’emploi durable.

Cet après-midi, alors que l’accord des partenaires sociaux se transforme pour devenir la loi de tous, je veux vous dire ma fierté, fierté d’un moment que je crois important dans la vie parlementaire, fierté de la manière dont la démocratie politique, dont vous, mesdames et messieurs les députés, avez accueilli en votre sein la démocratie sociale en la respectant, fierté que cette loi ne soit pas une loi minimale mais qu’elle tire jusqu’au bout son ambition initiale : changer en profondeur le visage de la formation professionnelle.

Comme si cette réforme d’ampleur ne suffisait pas, la loi en porte une autre, fondamentalement liée puisque le paritarisme est consubstantiel à la formation professionnelle. Puisque nous reconstruisons un système fondé sur la maturité des acteurs, il nous faut des acteurs en capacité de dialoguer, c’est-à-dire reconnus, légitimes et donc forts. Reconnus parce que légitimes ; légitimes parce que responsables ; responsables parce que forts ; forts parce que capables d’obtenir des avancées par le compromis. Voilà la mécanique vertueuse du dialogue social à la française.

Cet enjeu-là aussi doit nous rassembler. Bien souvent, notre pays est caricaturé comme le pays du conflit social. Personne ne peut nier les divergences des intérêts. Personne ne peut nier non plus qu’il faut les dépasser, au bénéfice de tous, et fonder des compromis non seulement solides économiquement et socialement, mais qui permettent à chacun d’avoir la tête haute, notamment aux représentants syndicaux qui retournent devant leurs bases après avoir signé un accord. Contrairement aux idées reçues, notre pays a connu une diminution importante de la conflictualité. La négociation collective est intense dans les branches et les entreprises et tous les syndicats signent des accords.

Nous rendrons donc service aux acteurs de la démocratie sociale, souvent trop peu considérés, en fondant leur représentativité sur des bases désormais claires, y compris du côté patronal, ce qui était une lacune de notre système, et en rendant leur financement plus transparent, en particulier en reconnaissant qu’au-delà du socle essentiel que constitue l’adhésion, les missions d’intérêt général exercées par les syndicats et le patronat doivent être financées dans un cadre clair. Il en va de même pour les comités d’entreprise.

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