Intervention de Bérengère Poletti

Séance en hémicycle du 27 février 2014 à 9h30
Prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner la proposition de loi de notre collègue Thierry Braillard, qui a le mérite d’être d’une simplicité biblique et d’aller droit au but pour régler un problème précis et bien connu des avocats.

En effet, mon cher collègue, vous vous attaquez au problème des délais de jugement du conseil des prud’hommes, quand il est saisi par un salarié d’une demande de qualification d’une prise d’acte de rupture du contrat de travail pour des faits qu’il reproche à son employeur.

Vous l’avez dit, l’acte de rupture du contrat par le salarié à la suite d’un manquement présumé de l’employeur peut être envisagé à tout moment par le salarié. La jurisprudence définit les motifs justifiant le recours à cette procédure de rupture originale : le harcèlement ou la discrimination commis par l’employeur, le non-paiement des salaires, la modification du contrat de travail sans l’accord du salarié ou encore, bien sûr, les violences commises sur le lieu de travail.

La prise d’acte est une réponse d’urgence qui permet au salarié de quitter son lieu de travail quand les conditions n’y sont plus tenables. Toutefois, à l’immédiateté du départ succède la longueur de la procédure de saisine du conseil des prud’hommes, auquel il revient de qualifier ensuite la prise d’acte en démission ou en licenciement.

Cela a été dit en commission, les délais pratiqués actuellement par les prud’hommes sont insupportables, ce qui est également le cas, malheureusement, dans de nombreuses autres juridictions. Dans votre exposé des motifs, vous mentionnez une moyenne de dix mois, qui atteint seize mois en région parisienne. On sait que dans d’autres grandes villes, ces délais atteignent facilement et couramment plus de trois ans.

Or, nous le savons tous, le salarié ne peut bénéficier d’indemnités chômage avant la fin de la procédure judiciaire, ou du moins, avant la fin du jugement en première instance, à condition, bien sûr, que ce dernier lui soit favorable, en qualifiant la prise d’acte de licenciement. Seule exception possible, la demande des salariés ayant pris acte de la rupture du contrat pour non-paiement des salaires peut être prise en compte par Pôle emploi s’ils justifient d’une ordonnance de référé. Mais, là encore, il s’agit d’une réponse partielle, dont la mise en oeuvre est complexe.

Conséquence évidente de ces délais de jugement : la précarité qui guette des anciens salariés privés de ressources, exception faite de ceux qui auront la chance de retrouver un emploi rapidement. Or, la situation de l’emploi restant catastrophique, en dépit de la folle promesse de l’inversion de la courbe du chômage et des efforts désordonnés du ministre du travail, il est heureux que Thierry Braillard soumette ce sujet à notre réflexion commune.

En tenant de tels propos, monsieur le ministre du travail, j’ai la certitude que vous m’écoutez !

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