J’ai exposé hier, dans la discussion générale, les raisons pour lesquelles notre groupe est opposé au recours aux ordonnances de l’article 38, mais j’ai surtout expliqué pourquoi nous refusions plus particulièrement cette habilitation dans une matière excessivement importante et qui n’a pas été modifiée depuis plus de deux siècles, comme vous l’avez rappelé, madame la garde des sceaux.
C’est vrai, la réforme est indispensable. C’est vrai, elle est urgente, mais cela fait dix ans que nous attendons un projet de loi. Et vous m’accorderez que, même si cela doit prendre du temps, l’examen au fond de ce sujet essentiel relève normalement de la responsabilité du Parlement. C’est une question de principe, que le Sénat a soulevée et que nous soulevons à notre tour. Je n’ai pas le sentiment que nous nous y enfermions, car nous sommes au coeur du rôle du Parlement dans la République.
Je dois avouer que les arguments avancés, qu’il s’agisse de ceux de l’exposé sommaire de cet amendement, ou des propos de Mme la rapporteure, me laissent très perplexe. Nous dire aujourd’hui, à trois ans de la fin de la législature, que la charge de travail du Parlement ne permettrait pas d’inscrire un projet de loi spécifique en la matière à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, c’est tout de même un peu fort ! Madame la garde des sceaux, vous avez peut-être connaissance de la charge de travail du Parlement pour les trois prochaines années, jusqu’à la fin de la législature, nous non ! De toute manière, c’est question de volonté politique : si le Gouvernement considère que cette réforme est importante, nécessaire et urgente, il peut l’inscrire à l’ordre du jour du Parlement.
Je ne suis pas du tout convaincu par l’argument d’autorité qui consiste à dire que, si nous refusons l’habilitation, il n’y aura pas de réforme faute de temps et de moyens d’en discuter avant 2017. Franchement, j’ai rarement entendu un argument de ce type dans l’hémicycle ! Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet amendement et nous nous abstiendrons lors du vote sur l’ensemble du texte.