Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 16 avril 2014 à 15h00
Modernisation et simplification du droit dans les domaines de la justice et des affaires intérieures — Après l'article 15

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Ce que viennent de dire Mme la rapporteure et M. Le Bouillonnec constitue une invitation, à laquelle je ne puis résister, de rendre hommage aux personnels des greffes, qui ont effectivement accompli un travail considérable. Lorsque je me suis exprimée il y a quelques instants, je suis passée un peu vite sur cet aspect des choses, considérant que j’avais déjà abordé la question lors de mon intervention à la tribune hier soir, mais on n’insistera jamais assez sur ce point.

Lorsqu’une juridiction est débordée, elle est obligée de procéder à des choix. Dès 2012, j’ai été fréquemment interpellée, lors de mes déplacements, par les personnels des juridictions – essentiellement les greffiers, mais aussi les magistrats –, qui m’alertaient sur l’impossibilité de résorber le stock de dossiers à réviser pour le délai fixé, à savoir décembre 2013, et demandaient une prolongation de ce délai. Mon premier réflexe a été d’accéder à leur demande et de prolonger le délai, ce qui aurait eu pour conséquence de reporter le stock de dossiers de 2013 sur l’année 2014. J’ai donc finalement choisi une autre solution, consistant à renforcer les tribunaux d’instance en magistrats, greffiers, fonctionnaires et même vacataires, ce qui a permis, grâce au travail accompli par tous, de tenir le délai.

L’enseignement à tirer de la situation que nous avons connue, c’est qu’une juridiction débordée est toujours amenée à arbitrer, c’est-à-dire à choisir de traiter certains dossiers plutôt que d’autres. Si nous n’avions pas fourni des renforts aux tribunaux d’instance, ils auraient dû sacrifier certains contentieux relevant de leur compétence. Or, les tribunaux d’instance constituent le fleuron de notre juridiction de proximité, et ce que l’on sacrifie dans un tribunal d’instance, c’est le contentieux du quotidien, c’est la justice civile, ce sont les difficultés quotidiennes des citoyens confrontés à un problème d’expulsion de leur logement, de surendettement ou de voisinage. Il est donc impératif de fournir aux tribunaux d’instance les moyens de traiter les contentieux massifs, tel celui relatif à la révision des mesures de tutelle des majeurs protégés.

Le Gouvernement a donc fait des efforts, avec le soutien du Parlement qui a voté les budgets correspondants, pour renforcer les effectifs des tribunaux d’instance : ainsi, un peu plus d’un millier de greffiers vont arriver dans les juridictions d’ici à septembre prochain. Nous devons cependant poursuivre nos efforts, car assurer la justice du XXIe siècle au service des citoyens implique de mettre en place les conditions permettant aux magistrats, aux greffiers et aux fonctionnaires de travailler dans de bonnes conditions.

Les greffiers sont très fortement pénalisés depuis de nombreuses années : cela fait une dizaine d’années que ni leur indice ni leur statut n’ont été revalorisés. Ils ont le sens du service public et travaillent intensément, mais on ne saurait tirer sur la corde indéfiniment. Si l’arrivée d’un millier de greffiers dans les juridictions va donner un peu d’oxygène à la profession, il faut aussi envisager de considérer leur situation indiciaire et statutaire, et je compte pour cela sur l’appui des députés, toutes sensibilités confondues.

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