Intervention de Arnaud Richard

Séance en hémicycle du 17 avril 2014 à 9h30
Arrêts de travail et indemnités journalières — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Le sujet des arrêts de travail et des indemnités journalières n’est donc pas nouveau, d’autant que la Cour des comptes, dans son rapport public annuel de 2012, s’était inquiétée du déficit croissant de l’assurance maladie, suggérant un contrôle plus ferme et plus constant des arrêts maladie.

Comme l’avait souligné le rapport de la MECSS, les dépenses occasionnées par les indemnités journalières du régime général sont loin d’être négligeables : en 2011, elles ont atteint 9,5 milliards d’euros. Et nous savons que le coût total est bien supérieur, sans malheureusement pouvoir le chiffrer car le système des arrêts maladies se caractérise par une très grande opacité. De plus, les contrôles sont insuffisants : 90 % des contrôles effectués par l’assurance maladie portent sur les arrêts maladie de plus de 45 jours alors même que 76 % des arrêts sont d’une durée de moins d’un mois.

C’est pourquoi la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui revêt une importance particulière.

Elle vise à répondre aux carences identifiées par la MECSS. Je tiens à rappeler, une nouvelle fois, que son rapport avait été adopté à l’unanimité et que sa co-présidence, assurée par un député SRC et un député UMP, est un gage d’absence de clivages. Malheureusement, alors que cette proposition de loi comporte de nombreuses mesures nécessaires et intéressantes, certains d’entre nous font le choix politique de ne se focaliser que sur le dernier de ses articles, éclipsant les sept autres.

J’entends encore les cris d’orfraie de mon collègue Sebaoun, à la suite de la présentation devant la commission des affaires sociales de cette proposition de loi par notre collègue Bérengère Poletti. Nous ne pouvons que déplorer que le jeu politique l’emporte sur l’intérêt général.

Je vous exhorte d’ailleurs, mes chers collègues, à réfléchir à vos propos car je crains, après les annonces récentes du Premier ministre, que le Gouvernement, dans sa grande sagesse, ne vous propose d’adopter des mesures analogues dans le prochain PLFSS.

Au groupe UDI, nous sommes convaincus du bien-fondé de cette proposition de loi. Alors que notre pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la crise et que le Gouvernement cherche à colmater les brèches par des mesures inadaptées, nos collègues du groupe UMP proposent des mesures simples à l’efficacité certaine. Nos collègues du groupe socialiste s’insurgent contre celles-ci alors même que certaines d’entre elles sont réclamées par la Cour des comptes, dont l’impartialité ne peut être mise en cause. Et vous seriez bien mal avisés de ne pas saisir cette proposition de loi qui fait figure de main tendue quand le Gouvernement cherche par tous les moyens des sources d’économies pour parvenir au chiffre de 50 milliards d’euros.

Les économies ne sont en effet ni de droite, ni de gauche, mes chers collègues. Le bénéfice de ces mesures serait général et contribuerait à assurer la pérennité et la viabilité de notre système de protection sociale, dans la justice, qui nous tient tous à coeur. Face à un tel enjeu, nous estimons qu’il est nécessaire de mettre de côté nos divergences pour porter ensemble cette réforme nécessaire.

Je dirai également un mot du dernier article de cette proposition de loi, qui, je le sais, a retenu toute votre attention. Il s’agit du rétablissement du jour de carence dans la fonction publique. Cela va sans dire, nous sommes totalement favorables à cette mesure, nous l’avons toujours été.

Contrairement au secteur privé, pour lequel le code de la Sécurité sociale prévoit trois jours de carence, c’est-à-dire trois jours durant lesquels le salarié ne perçoit pas d’indemnités journalières, les fonctionnaires bénéficient de la rémunération de leurs arrêts de travail dès le premier jour. Dans le secteur privé, les grandes entreprises ou bien les mutuelles peuvent dans certains cas prendre en charge ce délai de carence et le payer aux salariés. Cependant, dans la plupart des cas, notamment pour les très nombreux salariés des TPE-PME ou les salariés qui subissent un emploi précaire, en CDD ou en intérim, ces jours de carence ne sont pas payés. On estime à un tiers la proportion de salariés du privé qui ne sont pas couverts par une complémentaire : les trois jours de carence ont un impact significatif sur leur pouvoir d’achat.

Il est important, pour ne pas opposer les salariés du secteur public à ceux du secteur privé, d’appliquer à tous un système identique et juste. La journée de carence dans la fonction publique, instaurée par le gouvernement Fillon à l’automne 2011, était ainsi une mesure de justice, dimension à laquelle vous devriez être sensibles, chers collègues de la majorité.

Elle avait également, et c’est non négligeable, permis de lutter contre le différentiel d’absentéisme assez choquant entre le secteur privé et la fonction publique. Cette mesure avait contribué à faire reculer de 7 % l’absentéisme dans la fonction publique hospitalière, encourageant ainsi des comportements vertueux.

Nous avions donc combattu sa suppression par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014. Du reste, certains de nos collègues socialistes, bien éclairés à l’époque, s’étaient élevés contre cette décision. Je pense à notre collègue, bien connu de l’hémicycle, Thomas Thévenoud, qui avait à juste titre déclaré que les efforts demandés à la population devaient être « équitablement répartis entre le public et le privé ». Jean-Marie Le Guen, qui est aujourd’hui votre collègue au Gouvernement, madame la secrétaire d’État, avait également estimé que c’était une fausse bonne idée et que la mesure prise par le Gouvernement procédait « d’une vision un peu dépassée du dialogue social ».

Bref, mes chers collègues, alors que nous nous accordons tous sur la nécessité de faire des économies dans la justice, cette mesure qui avait généré 244 millions d’euros d’économies doit être rétablie sans tarder.

Cet article 8 n’est pas l’arbre qui cache la forêt, monsieur Sebaoun : il s’agit de rétablir une mesure nécessaire, que la Cour des comptes recommandait et qui, par conséquent, ne devrait appeler aucune contestation.

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