Notre dispositif actuel, qui repose sur la déclaration par nos concitoyens, est un système particulièrement souple. Ainsi, l’article 103 du code civil dispose que « le changement de domicile s’opérera par le fait d’une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l’intention d’y fixer son principal établissement. » L’article 104 indique que la preuve résultera « d’une déclaration expresse, faite tant à la municipalité du lieu que l’on quittera qu’à celle du lieu où on aura transféré son domicile ». Dans l’hypothèse où cette déclaration expresse n’aurait pas été faite, la preuve de l’intention dépendra des circonstances.
On nous propose aujourd’hui de remplacer ce dispositif très souple par un régime obligatoire de déclaration avec un récépissé remis au déclarant. L’auteure de la proposition de loi a indiqué en commission qu’elle ne souhaitait pas que cette obligation soit assortie d’une sanction.
Dès lors, se pose la question de l’effectivité de cette nouvelle règle, et de l’avancée qu’elle apporte au système actuel. La délivrance du récépissé peut apparaître comme une mesure de contrôle renforcé, puisqu’il sera l’unique justification de domicile pour l’accès aux services publics communaux.
Imaginons qu’un maire vienne à refuser l’inscription : ne peut-on pas y voir un moyen détourné de contrôler la population et de refuser l’accès aux services communaux ? En commission, certains collègues n’avaient pas manqué de relever tout l’intérêt de cette déclaration obligatoire en matière de contrôle de la population.
Ajoutons que le système préconisé représenterait une charge pour les collectivités, car les habitants sont également obligés de déclarer leur changement de domicile au sein même de la collectivité. Une déclaration doit être faite non seulement lors de l’installation, mais également lors d’un changement de domicile au sein même d’une commune, ce qui est lourd. Qui plus est, vous prévoyez que, dans les trois ans, tout le monde soit obligé de déclarer son domicile à la mairie…
La fréquence de ces déclarations va donc inutilement surcharger les services d’état civil des communes. Près de 10 % de nos compatriotes changent de domicile chaque année : vous imaginez les surcharges pour les services des petites communes, et même des plus grandes, comme Rennes ou Nantes. Si 10 % de la population de Nantes devait chaque année déclarer leur changement de domicile, quelle charge pèserait alors sur l’état civil !
J’en viens aux financements de l’État, autre élément évoqué dans votre proposition de loi. Certes, il peut se produire ici ou là quelques difficultés : vous avez évoqué le cas de Grigny. Mais globalement, les financements de l’État sont effectivement calés sur les recensements de l’INSEE. On peut tout de même faire confiance aux services de l’INSEE pour bien connaître la population des communes…