Nous sommes réunis ce soir pour l’ultime discussion du projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises tel qu’il a été adopté par la CMP mercredi dernier. Ce projet de loi a fait l’objet d’une seule lecture. À l’Assemblée nationale comme au Sénat, les élus du groupe UMP se sont abstenus lors du vote. Nous avons en effet considéré que, globalement, ce texte apportait des réponses concrètes aux préoccupations des artisans, des commerçants et des TPE. Je veux même vous dire que sur le terrain, certaines de ses mesures sont attendues.
Mes chers collègues, ne vous étonnez pas ! Nous sommes de virulents opposants lorsque nous ne croyons pas aux mesures que vous préconisez : nous nous sommes opposés avec conviction sur la loi ALUR, la loi Florange ou bien encore la semaine dernière sur le projet de loi sur la famille. Mais nous savons aussi nous abstenir de manière constructive et bienveillante. Et nous reconnaissons bien volontiers lorsque vous allez dans la bonne direction.
L’évolution de l’article 12 sur les auto-entrepreneurs illustre précisément cette démarche. Au sein du groupe UMP, nous pensons que le régime de l’auto-entrepreneur est un succès. Près d’un million de personnes l’ont choisi, et l’utilisent très souvent comme un complément de revenus. Il faut certes limiter les abus, les effets d’aubaine et lutter contre la concurrence déloyale et le salariat déguisé, ce que nous avions fait en apportant plusieurs ajustements. Mais il ne faut pas jeter le discrédit sur l’ensemble des auto-entrepreneurs.
Dans le projet de loi initial présenté en août dernier par Mme Pinel, le Gouvernement lançait une cabale contre les auto-entrepreneurs. Nous avions dénoncé dès le départ ce parti pris. Comme souvent depuis deux ans, le Gouvernement a réagi après-coup et a fait marche arrière. Tant mieux. Un rapport sur la simplification des régimes juridiques, sociaux et fiscaux de l’entrepreneuriat individuel a été confié à Laurent Grandguillaume, dont je tiens à saluer le travail et l’esprit constructif. Ce rapport rendu le 17 décembre dernier a servi de base à plusieurs amendements du Gouvernement afin d’unifier le régime de l’auto-entrepreneur et celui de la micro-entreprise. Nous avons accueilli ces amendements avec soulagement et nous sommes félicités d’avoir converti la majorité aux vertus d’un régime que vous aviez pourtant combattu sous la précédente législature, mes chers collègues. Cependant, il aurait été bienvenu que le rapport Grandguillaume serve de base de travail au projet de loi, et non l’inverse.
En outre, l’article 13 oblige tous les auto-entrepreneurs artisans à s’immatriculer au registre des métiers. La loi de finances rectificative pour 2009 obligeait déjà les auto-entrepreneurs exerçant une activité artisanale à titre principal à s’immatriculer. Cette obligation sera donc étendue aux activités exercées à titre secondaire, ce qui améliorera la transparence, vous en conviendrez.
Alors pourquoi ne pas voter pour ce texte ? Globalement, il ne trahit pas nos convictions. Ceci étant, certains articles sont problématiques. Je ne développerai pas chaque disposition mais je tiens à en évoquer brièvement quelques-unes.
Vous allongez la durée maximale du bail dérogatoire, de deux à trois ans. Daniel Fasquelle, qui a beaucoup travaillé sur la question technique et délicate des baux commerciaux et a rendu en mars 2011 un rapport d’information sur la vacance des baux commerciaux et les moyens d’y remédier, pense qu’il s’agit d’une erreur. Les commerces de centre-ville risquent d’être précarisés par un bail qui doit rester exceptionnel à nos yeux.
Avec l’article 20 AA, l’Assemblée avait prévu que l’autorité administrative qui attribue une subvention à une société commerciale pouvait prendre une clause limitant l’attribution de dividendes. Le Sénat a élargi cet article au versement de rémunérations ou avantages de toute nature accordés aux mandataires sociaux. Nous sommes réservés quant à cette mesure, dont nous comprenons l’objectif mais qui risque de se révéler contre-productive en décourageant les chefs d’entreprise et les investisseurs – ce qui contredit votre discours de fond, monsieur le ministre.
La suppression de l’affectation d’une fraction de la Tascom, la taxe sur les surfaces commerciales, au FISAC n’est pas souhaitable. Vous considérez que, cette affectation n’ayant jamais été mise en oeuvre, vous pouvez donc la faire disparaître. Or il s’agit d’un symbole important pour bon nombre de territoires ruraux, de montagne ou du littoral. Avec cette affectation, le commerce de proximité serait soutenu par les grandes surfaces commerciales. Il serait donc préférable de la mettre en oeuvre, d’autant que les crédits budgétaires dévolus au FISAC ne cessent de décroître. De 64 millions d’euros en 2010 et 2011, ils sont passés à 42 millions en 2012, puis 32 millions en 2013 et, tenez-vous bien, 20 millions en 2014.