La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
M. le président de l’Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre une lettre l’informant de sa décision de charger M. Yves Blein, député du Rhône, d’une mission temporaire auprès de M. le ministre de l’intérieur et de Mme la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports.
L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (n° 1966).
La parole est à M. Fabrice Verdier, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises est un texte important. Il concerne les activités commerciales et artisanales sous toutes leurs formes, du petit artisan au petit commerçant et du micro-entrepreneur aux grandes enseignes et grandes sociétés foncières. En début d’année, nous entamions l’examen du projet de loi en faisant le choix de la procédure accélérée afin d’apporter une réponse rapide et concrète à ce secteur qui irrigue la vie économique et sociale de nos territoires. Lors de son examen par l’Assemblée nationale et le Sénat, il a été caractérisé par un vote quasi-unanime. C’est dans le même esprit de consensus que nous avons examiné mercredi dernier en commission mixte paritaire les dispositions votées en des termes différents par les deux assemblées.
Le projet de loi initial comportait trente articles, le texte issu de la CMP en compte près du double, les apports de l’Assemblée et du Sénat étant relativement équilibrés. Les nouveaux articles et les nombreuses modifications apportées témoignent du travail que le Sénat a effectué. Il convient de souligner plusieurs améliorations notables du texte. À propos des baux commerciaux, citons la sécurisation de la préemption commerciale et celle des baux dérogatoires, l’extension du champ d’application de l’état des lieux, l’encadrement des clauses de garantie, l’extension du lissage des loyers à 10 % par an aux baux de longue durée ou encore la possibilité offerte aux commerçants d’installer un système de vidéoprotection dans des lieux particulièrement exposés à des risques. Ce sont des évolutions positives que je soutiens et salue.
La discussion en CMP a permis d’améliorer encore le texte et de s’accorder sur d’autres points. Tout d’abord, la réglementation des emplacements des « corners » s’appliquera en fonction de l’appréciation du juge sur l’existence ou non d’un bail commercial. Le renouvellement des baux de longue durée continuera de s’appuyer sur la jurisprudence équilibrée de la Cour de cassation. La généralisation de l’indice des loyers commerciaux comme indice de référence est acquise, car il est l’indice le plus proche de la réalité de l’activité économique et donc le plus pertinent à long terme. Cela a fait l’objet d’un large consensus après une concertation approfondie organisée par Sylvia Pinel, qui est à l’origine du projet de loi.
Il est un point à propos duquel l’accord est général, c’est la nécessité de veiller à la répartition claire, proportionnée et prévisible des différentes charges et du coût des travaux entre bailleurs et locataires afin de mettre un terme, espérons-le, à la pratique des loyers dits « triple net » et à ses nombreuses dérives. Lors des auditions, j’ai organisé une table ronde entre les représentants des commerçants et ceux des sociétés foncières afin de confronter leurs arguments et trouver un compromis sur le sujet, qui suscite de vives tensions entre eux. À l’issue de nos échanges, il a été décidé de poursuivre les discussions sous l’égide du ministère afin d’aboutir à un décret rééquilibrant les rapports entre bailleurs et locataires. Cette notion de rééquilibrage est essentielle. Mes collègues parlementaires et moi-même resterons vigilants afin d’aboutir à un décret satisfaisant pour les deux parties, qui organise précisément la répartition, afin d’éviter des contentieux à venir.
Le texte comporte de nombreuses autres avancées en faveur des artisans et des commerçants. L’évolution vers un statut unifié de la micro-entreprise et les assouplissements du statut de l’EIRL, l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, ont fait l’objet d’un consensus entre les deux assemblées. Ils s’inspirent largement du rapport de Laurent Grandguillaume, dont le travail a déjà été salué par tous les députés de l’Assemblée nationale.
L’adoption définitive de ce projet de loi correspond au premier volet de la réforme de l’entreprise individuelle que préconise notre excellent collègue Laurent Grandguillaume. Lors de son élaboration, nous avions demandé au Gouvernement d’engager très rapidement la préparation du deuxième volet. Depuis le mois de mars, un groupe travaille à la préfiguration du futur statut juridique de l’entreprise individuelle unique. Je serai attentif aux conclusions de ces travaux, prévues pour septembre 2014.
Le présent texte s’intéresse aussi au domaine de l’urbanisme commercial. Il prévoit la poursuite du rapprochement avec l’urbanisme de droit commun, la modernisation du fonctionnement de la Commission nationale d’aménagement commercial et l’unification du contentieux du permis de construire et de l’autorisation d’exploitation commerciale. La suppression des soldes flottants a fait l’unanimité en raison de leur caractère illisible pour les consommateurs et des difficultés de mise en oeuvre pour les commerçants indépendants. Cette mesure, prise en accord avec nos collègues sénateurs, sera applicable à partir du 1er janvier 2015 afin que les commerçants puissent s’organiser.
La réforme du FISAC, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, au profit d’une logique de projet répondant à des priorités gouvernementales, est considérée comme une nécessité par les députés et les sénateurs afin de rendre toute son efficacité à cet important outil de redynamisation du commerce de proximité. Enfin, la possibilité offerte aux commerçants non-sédentaires de présenter un successeur dans les marchés répond à une demande forte, qui mérite d’être soutenue. Elle a été justement et opportunément relayée par le président Brottes, qui sera satisfait sans doute du texte auquel nous avons abouti.
Pour conclure, je pense pouvoir dire que nous sommes parvenus à un texte qui rééquilibre les rapports entre bailleurs et locataires commerciaux, ceux des commerces de proximité comme des centres commerciaux, afin de préserver la diversité et la pérennité de nos commerces. Le texte améliore les outils d’intervention de l’État et des collectivités comme le FISAC, le droit de préemption des communes ou le contrat de revitalisation. Enfin, il rétablit, du moins je l’espère, une coexistence apaisée entre les artisans et les autres entrepreneurs individuels, sous toutes leurs formes, ce qui constitue une première et importante étape de l’élaboration du statut unique de l’entrepreneur individuel.
Je remercie les nombreux députés de gauche comme de droite qui se sont pleinement investis dans la mise au point du texte et salue l’implication personnelle du président Brottes et le travail précieux des administrateurs de l’Assemblée nationale. Je salue à travers vous, monsieur le ministre, l’engagement du Gouvernement et l’excellent travail de Sylvia Pinel, qui a associé l’ensemble des parlementaires au projet de loi. J’ai également une pensée pour Valérie Fourneyron qui lui succède. Bref je salue députés, sénateurs, ministères, artisans, commerçants et petites entreprises pour ce travail de co-construction qui a permis l’élaboration d’un texte de consensus qui répond, par-delà tous les clivages, aux difficultés rencontrées par nos entreprises de proximité, qui constituent le tissu fin de notre économie. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter ce texte qui est tant attendu par les acteurs de la vie quotidienne des Français.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
La parole est à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, le ministre de l’économie est d’abord le ministre des toutes petites entreprises, des artisans, des commerçants et de tous ceux qui sont le poumon de l’économie française, et qui en sont aussi une forme d’âme, car ce sont les acteurs des territoires, ceux qui assurent la vitalité économique et sociale des régions, départements et communes. Ce dont nous discutons ce soir résulte à la fois de l’initiative du Gouvernement incarnée par Sylvia Pinel et de l’enrichissement successif d’initiative parlementaire, ici et au Sénat. Je remercie tous ceux qui ont contribué à ce texte très abouti, très travaillé et qui constitue une sorte de coproduction collective du Gouvernement et des assemblées. Je remercie les rapporteurs, M. Fabrice Verdier ici et Yannick Vaugrenard au Sénat, Sylvia Pinel bien entendu mais également Valérie Fourneyron, ma secrétaire d’État, qui est encore indisponible pour raisons personnelles.
Nous disposons avec ce texte, me semble-t-il, des outils et leviers pour assurer le développement et la diversification de nos entreprises commerciales et artisanales, celles qui font les emplois. On parle souvent des grands groupes, mais ils en détruisent plus qu’ils n’en créent, et s’ils en créent, c’est bien ailleurs qu’ici ! Ici, les emplois sont créés par ceux qui vivent et meurent en silence et disparaissent sans faire de bruit. Et, en cette époque de records de disparitions de petites entreprises, nous savons qu’il faut beaucoup de temps pour reconstituer un tissu économique. Ce texte a réuni la quasi-unanimité de l’Assemblée nationale au mois de février dernier et l’unanimité du Sénat au mois d’avril. Il comporte des mesures pragmatiques et volontaristes visant à améliorer le quotidien de plus de trois millions d’entreprises de proximité, représentant 25 % de la richesse nationale, telles que la dynamisation des commerces de proximité, la rénovation du régime des baux commerciaux ou des mécanismes favorisant la diversité des commerces dans les territoires en renforçant les leviers des pouvoirs publics et en modernisant l’urbanisme commercial, qui en avait bien besoin.
Citons aussi la clarification du statut des artisans et, inspirées par le rapport Grandguillaume, la simplification et l’harmonisation des régimes de l’entreprise individuelle grâce à la création du régime unique de la micro-entreprise et à un accès à l’EIRL facilité. Les élus des territoires et les parlementaires ont enrichi le texte en donnant une définition légale à l’artisanat d’art afin de consacrer l’apport artistique de ces métiers. Le Sénat a autorisé, et c’est un point très important, très concret et très pratique, la dé-spécialisation partielle du bail commercial par le tribunal en cas de procédure collective lors d’une liquidation, afin de favoriser les reprises,. Il a apporté une reconnaissance, à l’issue d’un débat épineux, des spécificités de l’aménagement des salles de cinéma au regard de l’urbanisme commercial.
La commission mixte paritaire a aussi consacré la réforme du FISAC. On passe ainsi d’une logique de guichet à un appel à projet national, car c’est mentir que de faire croire que les crédits sont infinis et qu’il suffit de se présenter pour en obtenir une partie. Aucune file d’attente n’assure la transparence et mieux vaut, malgré les demandes des parlementaires, clarifier les choses grâce à l’appel à projet plutôt que distribuer des fonds qui d’ailleurs ne sont plus à la hauteur des besoins. Enfin, la réforme du statut de l’auto-entrepreneur prévoit la fusion des régimes microsocial et microfiscal.
Tout cela va changer la vie quotidienne de millions d’entrepreneurs. Notre pays a besoin d’énergie et de créativité et le présent texte est de nature à stimuler ce tissu économique si important pour nos territoires et nos concitoyens. En tout cas, je veux remercier l’Assemblée nationale et le Sénat d’avoir convergé de cette manière pour arriver à un texte qui construit un solide compromis entre des aspirations parfois divergentes et qui nous permet d’avancer. Merci à chacun des parlementaires.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, vice-présidente de la commission mixte paritaire.
Nous arrivons ce soir au terme des débats sur le projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Ce texte, qui traduit les mesures proposées dans le pacte pour l’artisanat et le plan d’action pour le commerce et les commerçants, est le fruit d’une collaboration entre le ministère de l’artisanat, du commerce et du tourisme et notre collègue Laurent Grandguillaume, auteur du rapport unanimement salué sur le statut de l’auto-entrepreneur. Il répond à quatre objectifs principaux : garantir l’équilibre des relations entre bailleurs et entreprises locataires, afin d’éviter les contentieux ; simplifier et harmoniser les régimes de l’entreprise individuelle ; développer les très petites entreprises en favorisant la reconnaissance des entreprises artisanales et le suivi d’un parcours entrepreneurial et en clarifiant le statut des artisans ; enfin, adapter les modalités de l’intervention publique aux besoins des territoires en donnant tant aux collectivités locales qu’à l’État des moyens d’action renouvelés.
Ce texte, après avoir été largement enrichi lors des débats parlementaires, a été voté à une quasi-unanimité à l’Assemblée nationale en février dernier et à l’unanimité au Sénat le 17 avril. La commission mixte paritaire, qui s’est réunie mercredi dernier, est parvenue à un accord sur les quelques points qui restaient en discussion, et cela dans un esprit très constructif, ce dont le groupe SRC se réjouit. Je ne reviendrai pas sur la modification du régime de l’auto-entrepreneur telle que nous l’avons adoptée en CMP, que Frédéric Roig développera après moi, ni sur l’autorisation donnée aux commerces particulièrement exposés à des risques de vol ou d’agression d’installer des systèmes de vidéoprotection après en avoir informé le maire et les autorités publiques compétentes.
Je souhaite en revanche revenir sur le volet du texte relatif à l’aménagement commercial. Un amendement adopté en CMP sur la base d’un bon compromis a permis de redonner la main aux élus en réintroduisant la possibilité d’intégrer un document d’aménagement commercial dans le schéma de cohérence territoriale, de manière facultative. Ce document d’aménagement commercial, plus prescripteur, délimitera des secteurs d’implantation en périphérie et les centralités urbaines. Il pourra par ailleurs prévoir des conditions d’implantations spécifiques. Les intercommunalités pourront ainsi, si elles le souhaitent, prendre en compte plus finement dans leur stratégie l’équilibre économique territorial.
Je veux également évoquer la réforme du FISAC, prévue à l’article 25 du projet de loi et sur lequel la commission mixte paritaire s’est penchée. Cette réforme était très attendue par les élus locaux, en particulier en milieu rural et de montagne. Le FISAC est un outil précieux permettant de favoriser non seulement la création, mais aussi la modernisation et le maintien de l’activité des commerces de proximité, qui sont souvent les derniers dans les villages. On le sait, les activités de proximité artisanales et commerciales offrent de véritables emplois, créent du lien social dans les territoires et participent pleinement au retour de la croissance dans notre pays. Le pilotage de ce fonds devait être réformé. C’est le sens de l’article 25, qui fait aujourd’hui consensus. Le FISAC entre désormais dans une logique de projet plutôt que de guichet, ce qui devrait permettre de résorber le stock de dossiers qui, je le rappelle, reste très important. La CMP est ainsi revenue sur le versement des crédits, qui seront désormais attribués après appels à projets nationaux selon des critères publics fondés sur les priorités gouvernementales.
Je me félicite de l’adoption de ces mesures, qui étaient très attendues par 3 millions d’entrepreneurs. Elles amélioreront leur quotidien et permettront le développement et la diversification des entreprises commerciales et artisanales, qui sont un véritable moteur de la vitalité économique et sociale de nos territoires et qui produisent 25 % du PIB. C’est pourquoi je vous invite bien évidemment à voter ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, chers collègues, l’artisanat, le commerce et les très petites entreprises maillent de façon fine nos territoires et y apportent beaucoup de dynamisme. Ils jouent un rôle fondamental dans notre économie, puisqu’ils représentent 25 % du PIB et 3,5 millions d’emplois.
Le projet de loi que nous examinons touche à de nombreux aspects de notre droit, tant public que privé. Il intéresse certes les professionnels, mais aussi les consommateurs et les élus locaux, qui voient trop souvent disparaître le commerce de proximité des centres-villes, des bourgs et des villages de notre pays sans avoir les outils législatifs suffisants pour prévenir ou pour réagir. Comme l’artisanat, le commerce de proximité, et principalement le commerce de bouche, est souvent en danger.
Les sujets abordés par le présent projet de loi préoccupent beaucoup de Français, depuis de très nombreuses années. Trois séries de mesures visent à protéger le petit commerce et l’artisanat ; une autre série de mesures tend à valoriser le savoir-faire des artisans et à sécuriser les consommateurs ; le texte propose enfin des mesures relatives au statut d’entrepreneur individuel.
Le commerce et l’artisanat de proximité sont le coeur vivant et dynamique de nos centres-villes, de nos bourgs et de nos villages. Ils sont essentiels à la qualité de vie et à la convivialité. Leur disparition au profit des zones commerciales et des grandes surfaces a un impact négatif sur notre quotidien. L’éloignement du commerce et de l’artisanat conduit à la multiplication des déplacements, coûteux et polluants. Il pénalise les personnes sans moyens de transport : en milieu rural notamment, les personnes âgées n’y ont plus accès. Le coût social et environnemental de la grande distribution, présentée comme un modèle économique, est à prendre en compte très sérieusement, qu’il s’agisse de la disparition d’espaces agricoles ou du coût des infrastructures pour les collectivités locales.
Ce projet de loi prévoit des leviers pour garder ou faire revenir le commerce et l’artisanat en centre-ville. Tout comme les logements, les baux commerciaux ont connu un renchérissement considérable au cours des quinze ou vingt dernières années, et de nombreux commerces ont disparu. Un très grand nombre d’activités ont ainsi été abandonnées du fait de l’augmentation des loyers au profit de banques ou de chaînes de magasins. L’encadrement de la hausse du montant des baux commerciaux est donc devenu nécessaire. De même, les contrats devront comporter des précisions sur les obligations respectives du bailleur et du locataire. C’était une de nos demandes, qui est en grande partie satisfaite
Par ailleurs, les communes pourront déléguer leur droit de préemption aux EPCI ou à des établissements publics ad hoc, et les informations fournies aux collectivités qui souhaitent préempter seront plus complètes. On indiquera désormais le nombre de salariés et la nature des contrats de ceux qui travaillent dans l’établissement qui risque de disparaître. Les écologistes soutiennent ces nouveaux moyens législatifs et réglementaires dont disposeront les pouvoirs publics locaux.
Pour les écologistes, préserver le commerce de proximité est un axe fort de l’aménagement du territoire. Sur notre proposition, la commission a abaissé de 30 000 à 20 000 mètres carrés le seuil de saisine de la Commission nationale d’aménagement commercial. Je m’interroge néanmoins sur l’intérêt d’autoriser les commerces à mettre en place une vidéosurveillance à l’extérieur des magasins, même si cela ne concerne que ceux qui sont « particulièrement exposés à des risques de vol ou d’agressions ». Installés sur la voie publique, ces dispositifs représentent des risques réels d’atteinte à la vie privée alors qu’ils seront à la disposition de personnes privées et non des autorités publiques.
Pour compléter ces dispositions, le texte propose une réforme du FISAC, qui connaissait certains dysfonctionnements. L’ancienne majorité avait procédé à des modifications législatives en 2008 et 2009, mais elle avait tout simplement oublié de le financer, et les dossiers s’empilaient. En passant d’une logique de guichet à une logique d’appel à projets, nous allons répondre à la question des délais de traitement des demandes. Reste celle des besoins et des moyens. Nous aurions souhaité que ce dispositif soit mieux orienté, et réservé aux territoires les plus en difficulté : le milieu rural et les zones de montagnes ainsi que les quartiers prioritaires de la politique de la ville par exemple. S’agissant de sa gouvernance, il sera nécessaire d’envisager au plus vite les moyens pour que les décisions soient prises au plus près du terrain. Il serait intéressant que les projets puissent faire l’objet d’une co-élaboration entre les différents partenaires et les collectivités territoriales, tel que prévu dans la loi sur l’économie sociale et solidaire.
Afin de valoriser les artisans et leurs savoir-faire, le texte supprime la notion d’« artisan qualifié », dont l’existence même créait une ambiguïté puisqu’elle laissait supposer qu’il y aurait des artisans non qualifiés. Le titre d’artisan sera désormais réservé aux chefs d’entreprise détenant une qualification professionnelle ou une expérience dans le métier qu’ils exercent. Parallèlement, le texte renforce le contrôle des qualifications et des assurances obligatoires des artisans. D’autres éléments vont dans le sens d’une amélioration : la vérification des compétences et des diplômes, l’obligation de s’inscrire au répertoire des métiers et au registre du commerce des sociétés ou encore celle de suivre le stage préalable à la création d’une auto-entreprise. C’est important, quand on sait que le taux d’échec actuel des auto-entreprises est supérieur à 50 %. Un regret toutefois : compte tenu des services que rendent les chambres des métiers, nous aurions souhaité un délai d’inscription plus court que le délai d’un an retenu par le projet de loi.
S’agissant de l’entrepreneuriat individuel et des auto-entrepreneurs, la CMP a fait le choix de la fusion des régimes microfiscal et microsocial, confirmant ce qui avait été retenu par l’Assemblée. C’est un sujet qui faisait polémique, notamment parce que certains y voyaient une forme de concurrence déloyale ou de salariat déguisé. Pour notre part, nous nous interrogeons encore sur l’opportunité de supprimer toute référence à une limite de durée du statut. En revanche, la CMP a opté pour le maintien d’un plafond pour le chiffre d’affaires : les micro-entrepreneurs pourront réaliser sous ce statut jusqu’à 32 900 euros de chiffre d’affaires pour les artisans et les professions libérales et jusqu’à 82 100 euros pour les commerçants. La loi prévoit aussi un contrôle des compétences de l’entrepreneur, ce qui paraît légitime pour la sécurité du consommateur.
Enfin, la CMP a suivi le Sénat en retenant une nouvelle condition, qui va dans le sens des amendements déposés par les écologistes, sur la préparation à la création d’entreprises. Avant leur immatriculation au répertoire des métiers, les commerçants et artisans devront effectuer un stage de cinq jours préalable à l’installation.
Tout en regrettant que cette loi n’ait pas bénéficié d’une seconde lecture, ce qui aurait sans doute permis quelques aménagements ou améliorations complémentaires, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, ainsi que Mme Sylvia Pinel, qui a assuré avant vous la rédaction de la loi, et à saluer la ministre Valérie Fourneyron, qui ne peut être parmi nous ce soir. Je tiens aussi à vous remercier, monsieur le rapporteur, pour l’écoute qui a été la vôtre tout au long de ce travail. Vous l’aurez compris, le groupe écologiste votera en faveur de ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
Ce projet de loi relatif au commerce, à l’artisanat et aux très petites entreprises a été l’occasion d’un débat constructif. Il a été précédé d’un travail en amont et de nombreuses concertations, conduites en particulier par Mme Sylvia Pinel. Nous le voterons, comme nous l’avions fait en première lecture. Je reviendrai simplement sur quatre mesures techniques.
L’encadrement des baux commerciaux permettra d’endiguer l’augmentation abusive des loyers. Il s’agit certes d’une modeste avancée dans la lutte opposant les enseignes prédatrices de la grande distribution à nos artisans et nos commerçants, mais elle permettra peut-être à une partie d’entre eux de lancer ou de consolider leur activité.
L’extension du droit de préemption commercial aux intercommunalités, aux établissements publics et aux SEM complète cette première mesure en permettant aux collectivités d’oeuvrer activement au maintien du commerce de proximité dans nos villes et nos villages. Cette disposition opportune aura néanmoins une portée très limitée compte tenu de la contraction sans précédent des dotations aux collectivités locales, qui corsète leurs capacités d’intervention sur le plan économique. Nous ne le répéterons jamais assez : il faut donner davantage de moyens et d’outils aux élus locaux pour maîtriser l’aménagement de leur territoire.
Les obligations administratives et comptables qui pèsent sur les artisans, les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée et les micro-entreprises sont souvent autant une source d’insécurité juridique qu’un frein à l’installation. Leur simplification était très attendue par les professionnels relevant de ces divers statuts. Nous déplorons cependant que cette simplification ne s’accompagne pas d’un renforcement des services publics dévolus à l’aide aux artisans et commerçants dans ces démarches administratives et comptables.
S’agissant des auto-entrepreneurs, nous serons très vigilants quant aux effets des dispositions de cette loi sur le salariat déguisé, d’autant que la réforme de l’inspection du travail en cours de discussion, ou du moins l’était-elle il y a peu, augure une réduction de la capacité d’intervention de ce corps.
Le soutien que nous apportons aux artisans et aux commerçants est unanime de part et d’autre de l’hémicycle. Ce consensus ne doit pas faire illusion : il ne doit pas masquer les errements de politiques économiques et fiscales qui se suivent et se ressemblent quelle que soit la majorité en place. Car ces dispositions techniques, pour autant qu’elles parviennent à atteindre le but qui leur est assigné, ne sauraient occulter une question fondamentale : ce texte permettra-t-il aux très petites entreprises, aux commerçants et aux artisans de vivre mieux ? Nous n’en sommes pas absolument convaincus.
Nous divergeons fondamentalement sur la nature des solutions structurelles qu’il conviendrait de mettre en oeuvre pour sortir notre économie de sa léthargie et nos commerçants et artisans de l’adversité, voire, pour certaines d’entre eux, de la pauvreté laborieuse. Il faut abandonner la politique de l’offre – je sais que vous en êtes convaincus ! – et se lancer dans une politique de la demande, car seule la relance de la consommation pourra sauver notre artisanat et nos commerçants de proximité.
Il faut, parallèlement, en finir avec le dogme de la réduction des dépenses publiques dont le seul horizon est une austérité budgétaire qui mine les services publics, amoindrit les biens communs collectifs, freine l’investissement public, contracte l’activité économique et entraîne la suppression de milliers d’emplois. Mais de cela aussi, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vous sais convaincus !
Sourires.
Il faut renoncer à la hausse de la TVA, l’impôt le plus injuste, qui malmène le pouvoir d’achat de nos concitoyens, singulièrement les plus modestes. Bien au contraire, il faudrait engager une grande réforme fiscale – promise par le candidat Hollande, remise à l’ordre du jour par le Premier ministre Ayrault et semble-t-il enterrée de nouveau. Nous vous faisons sans relâche des propositions en ce sens.
Il faut faire baisser le coût du capital qui pèse sur les petites entreprises, notamment en facilitant l’accès au crédit des PME, des TPE et des micro-entreprises. C’est derrière ces impératifs que la gauche, la vraie gauche, doit se rassembler. Ces alternatives ne sont ni irréalistes, ni irréalisables.
Les députés du Front de gauche voteront néanmoins ce projet, en gardant à l’esprit qu’il faudra rapidement remettre l’ouvrage sur le métier. Ce qui explique sans doute que je n’ai utilisé que la moitié de mon temps de parole !
Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes SRCécologiste.
Monsieur le ministre – permettez-moi d’exprimer nos amitiés à Valérie Fourneyron, monsieur le rapporteur Fabrice Verdier et son compère Frédéric Roig – dont je tiens absolument à saluer le travail collectif, madame la vice-présidente de la commission mixte paritaire – chère Marie-Noëlle Battistel, chers collègues, nous voici arrivés au terme de l’examen de ce texte très attendu par ceux qui entreprennent et ceux qui ont envie de créer leur propre affaire.
Il est très attendu donc par les commerçants, les artisans, les chefs de très petites entreprises et les auto-entrepreneurs. C’est là à mon tour de rendre hommage à celui que l’on nomme « Grandguillaume l’entreprenant »,
Sourires
chacun se souvient désormais de cette formule, qui a commis un rapport qui a permis de remettre sur orbite cette formule d’entrepreneuriat.
Il s’agit d’un texte dont nous pouvons être fiers, chers collègues. Je tiens à dire en cet instant, en cette journée un peu triste pour nous après les résultats de ce week-end, que c’est le plus souvent parce que nous manquons de cette fierté que nous manquons de capacité à expliquer et à convaincre. Alors, lorsque nous faisons de bonnes choses, et cela a tout de même souvent été le cas depuis le début de cette législature, osons non seulement les assumer et les expliquer, mais aussi les revendiquer. Monsieur le ministre, je sais que vous ne manquez pas votre tour de ce point de vue.
Sourires.
L’initiative d’entreprendre ne se décrète pas, mais elle s’encourage et s’accompagne. Nous allons aider les commerçants à rester dans les centres-villes, eux qui en sont le terreau, eux grâce à qui nos villes et nos villages sont toujours vivants, eux qui sont aussi l’avenir du commerce. Nous allons aussi aider les magasins à rester ouverts quelle que soit leur taille car, j’en suis convaincu, jamais nous ne pourrons nous satisfaire des seuls magasins virtuels où le conseil et les relations humaines disparaissent. C’est d’ailleurs un conseil que je donne aux consommateurs : il vaut mieux regarder quelqu’un dans les yeux, cela fatigue moins la vue que de passer son temps devant un écran à acheter en ligne !
Mais ce texte va également renforcer la place des artisans, tous ces métiers qui représentent des savoir-faire particuliers, comptent de nombreux talents et contribuent à la qualité de la marque « France », notre « fait maison » collectif.
Je voudrais insister sur une mesure dont j’avais pris l’initiative et qui a été fortement défendue au sein de la commission mixte paritaire, et j’en remercie ceux qui y ont siégé. Elle concerne une catégorie de commerçants qu’on a trop tendance à oublier, les commerçants non sédentaires. Ils sont irremplaçables, tout comme les commerçants de nos coeurs de villages, qui continuent à animer les bourgs et les villages et dont on attend le sourire et l’accueil lorsque l’on suit le panneau « centre-ville ». Les commerçants non sédentaires, donc, ce sont ceux qui vont sur les places de marché, quels que soient le temps et la température, quelle que soit l’époque de l’année. Nous sommes bien contents de les y trouver lorsqu’il n’y a pas d’autre solution, dans une zone de chalandise où l’offre s’appauvrit sans cesse. Nos anciens et ceux qui n’ont pas de véhicule sont bien contents d’avoir le marché local pour y faire quelques emplettes, et aussi pour y faire des rencontres utiles : car c’est là que les gens aiment à se croiser, à parler simplement de la vie quotidienne, c’est cela qui fait aussi le terreau des relations humaines dans notre pays. Le marché, c’est le lien social, c’est la qualité « les yeux dans les yeux », pour reprendre cette image. Essayez donc, derrière un écran, d’avoir la qualité les yeux dans les yeux !
C’est un métier difficile, celui de commerçant non-sédentaire. Se lever au milieu de la nuit, faire des kilomètres en camion ou en voiture avec remorque et vendre ses produits, par tous les temps : cela demande de l’abnégation ou de la passion, selon les moments… Or tous ces gens n’ont à l’heure actuelle aucun moyen de valoriser leur fonds de commerce lorsqu’ils raccrochent pour partir à la retraite, ce qu’ils ne font souvent que lorsqu’ils n’en peuvent plus, tant elle est minuscule. Ils peuvent vendre leur stock et éventuellement leur camion, s’il n’a pas fait trop de kilomètres. Rien de plus.
S’ils pouvaient valoriser la garantie que leur stand fonctionne bien, que les clients sont au rendez-vous chaque semaine depuis longtemps dans un village ou un autre, ils pourraient valoriser légitimement leur travail et tirer profit pour leur retraite, qui n’est jamais bien extravagante, de la vente de leur fonds de commerce. C’est ce que va permettre ce texte de loi. Mais rien ne sera automatique, évidemment : il ne s’agit en aucun cas de remettre en cause l’inaliénabilité du domaine public. En tant qu’ancien maire, je suis attaché à cette notion : c’est à la puissance publique de gérer le domaine public. Mais cette mesure permet de donner une chance au repreneur.
Voici comment va fonctionner le nouveau dispositif : une personne qui exerce son activité sur un marché depuis une, deux ou trois années, selon le choix du conseil municipal, et qui souhaite y mettre fin, le plus souvent pour prendre sa retraite – mais beaucoup d’autres raisons sont envisageables telles que la fatigue ou la maladie – pourra présenter au maire de la commune le repreneur de son affaire, autrement dit son successeur, à condition que celui-ci soit inscrit au registre du commerce et des sociétés. S’il en est d’accord, le maire pourra alors décider de faire bénéficier le repreneur des droits de l’ancien exploitant, et le lui dira avant la cession. C’est là toute la nouveauté : le maire n’est pas obligé de donner suite à cette demande du repreneur, mais obligé de donner une réponse avant que le fonds ne soit cédé. Cela permettra au commerçant qui s’en va de valoriser son fonds de commerce avec certains emplacements, car il aura obtenu l’accord de poursuite du maire.
Cette avancée, qui n’a l’air de rien et qui ne bouscule pas le droit de nos collectivités locales, était vitale. Je vous remercie, chers collègues, de m’avoir suivi pour l’adopter. Pour le reste, nous allons voter un texte plein de mesures extrêmement utiles au quotidien : il ne nous reste plus qu’à assurer le service après-vote !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.
Nous sommes réunis ce soir pour l’ultime discussion du projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises tel qu’il a été adopté par la CMP mercredi dernier. Ce projet de loi a fait l’objet d’une seule lecture. À l’Assemblée nationale comme au Sénat, les élus du groupe UMP se sont abstenus lors du vote. Nous avons en effet considéré que, globalement, ce texte apportait des réponses concrètes aux préoccupations des artisans, des commerçants et des TPE. Je veux même vous dire que sur le terrain, certaines de ses mesures sont attendues.
Mes chers collègues, ne vous étonnez pas ! Nous sommes de virulents opposants lorsque nous ne croyons pas aux mesures que vous préconisez : nous nous sommes opposés avec conviction sur la loi ALUR, la loi Florange ou bien encore la semaine dernière sur le projet de loi sur la famille. Mais nous savons aussi nous abstenir de manière constructive et bienveillante. Et nous reconnaissons bien volontiers lorsque vous allez dans la bonne direction.
L’évolution de l’article 12 sur les auto-entrepreneurs illustre précisément cette démarche. Au sein du groupe UMP, nous pensons que le régime de l’auto-entrepreneur est un succès. Près d’un million de personnes l’ont choisi, et l’utilisent très souvent comme un complément de revenus. Il faut certes limiter les abus, les effets d’aubaine et lutter contre la concurrence déloyale et le salariat déguisé, ce que nous avions fait en apportant plusieurs ajustements. Mais il ne faut pas jeter le discrédit sur l’ensemble des auto-entrepreneurs.
Dans le projet de loi initial présenté en août dernier par Mme Pinel, le Gouvernement lançait une cabale contre les auto-entrepreneurs. Nous avions dénoncé dès le départ ce parti pris. Comme souvent depuis deux ans, le Gouvernement a réagi après-coup et a fait marche arrière. Tant mieux. Un rapport sur la simplification des régimes juridiques, sociaux et fiscaux de l’entrepreneuriat individuel a été confié à Laurent Grandguillaume, dont je tiens à saluer le travail et l’esprit constructif. Ce rapport rendu le 17 décembre dernier a servi de base à plusieurs amendements du Gouvernement afin d’unifier le régime de l’auto-entrepreneur et celui de la micro-entreprise. Nous avons accueilli ces amendements avec soulagement et nous sommes félicités d’avoir converti la majorité aux vertus d’un régime que vous aviez pourtant combattu sous la précédente législature, mes chers collègues. Cependant, il aurait été bienvenu que le rapport Grandguillaume serve de base de travail au projet de loi, et non l’inverse.
En outre, l’article 13 oblige tous les auto-entrepreneurs artisans à s’immatriculer au registre des métiers. La loi de finances rectificative pour 2009 obligeait déjà les auto-entrepreneurs exerçant une activité artisanale à titre principal à s’immatriculer. Cette obligation sera donc étendue aux activités exercées à titre secondaire, ce qui améliorera la transparence, vous en conviendrez.
Alors pourquoi ne pas voter pour ce texte ? Globalement, il ne trahit pas nos convictions. Ceci étant, certains articles sont problématiques. Je ne développerai pas chaque disposition mais je tiens à en évoquer brièvement quelques-unes.
Vous allongez la durée maximale du bail dérogatoire, de deux à trois ans. Daniel Fasquelle, qui a beaucoup travaillé sur la question technique et délicate des baux commerciaux et a rendu en mars 2011 un rapport d’information sur la vacance des baux commerciaux et les moyens d’y remédier, pense qu’il s’agit d’une erreur. Les commerces de centre-ville risquent d’être précarisés par un bail qui doit rester exceptionnel à nos yeux.
Avec l’article 20 AA, l’Assemblée avait prévu que l’autorité administrative qui attribue une subvention à une société commerciale pouvait prendre une clause limitant l’attribution de dividendes. Le Sénat a élargi cet article au versement de rémunérations ou avantages de toute nature accordés aux mandataires sociaux. Nous sommes réservés quant à cette mesure, dont nous comprenons l’objectif mais qui risque de se révéler contre-productive en décourageant les chefs d’entreprise et les investisseurs – ce qui contredit votre discours de fond, monsieur le ministre.
La suppression de l’affectation d’une fraction de la Tascom, la taxe sur les surfaces commerciales, au FISAC n’est pas souhaitable. Vous considérez que, cette affectation n’ayant jamais été mise en oeuvre, vous pouvez donc la faire disparaître. Or il s’agit d’un symbole important pour bon nombre de territoires ruraux, de montagne ou du littoral. Avec cette affectation, le commerce de proximité serait soutenu par les grandes surfaces commerciales. Il serait donc préférable de la mettre en oeuvre, d’autant que les crédits budgétaires dévolus au FISAC ne cessent de décroître. De 64 millions d’euros en 2010 et 2011, ils sont passés à 42 millions en 2012, puis 32 millions en 2013 et, tenez-vous bien, 20 millions en 2014.
C’est une véritable saignée pour le commerce de proximité dans les zones rurales, de montagne et du littoral. La diminution continue des dotations budgétaires du FISAC est de nature à mettre en péril son activité, et par conséquent nos territoires, monsieur le ministre. Il est donc indispensable que la Tascom alimente le FISAC, à titre de moindre compensation.
Enfin, l’article 30 bis, qui permet aux commerçants exerçant au sein d’une halle ou d’un marché depuis plus de trois ans de présenter leur successeur au maire, nous semble comporter un risque de patrimonialisation du domaine public – ce n’est pas le président Brottes qui contredira cette affirmation ! C’est sans doute pour cette raison que le Gouvernement avait donné un avis défavorable à l’adoption de cet article, et que le groupe CRC du Sénat en avait obtenu la suppression.
Cela étant, le projet de loi comporte de bonnes mesures, et je souhaite également en évoquer quelques-unes. D’ailleurs, je ne peux pas m’empêcher de remarquer qu’elles s’inscrivent souvent dans la continuité de ce que nous avions initié, chers collègues du groupe UMP, ou qu’elles reprennent certains de nos amendements. Je pense aux dispositions sur le statut d’EIRL, soutenues notamment par Laure de La Raudière.
Je pense aussi aux dispositions en matière de baux commerciaux et à Daniel Fasquelle, dont le rapport de 2011 proposait déjà de définir la convention d’occupation précaire et de supprimer la référence à l’indice du coût de la construction dans le mode de calcul de l’évolution du loyer. Je pense enfin à l’amélioration du fonctionnement des réseaux consulaires, ou encore à la réforme des soldes flottants, sujet sur lequel Catherine Vautrin a beaucoup travaillé. Je vois, chers collègues, que ces affirmations vous assomment…
Sourires.
Une obligation d’entretien de l’aspect des locaux commerciaux a été adoptée à l’unanimité dans cet hémicycle. En effet, le règlement local de publicité pourra définir des zones dans lesquelles tout occupant d’un local commercial visible depuis la rue devra veiller à ce que l’aspect extérieur de ce local ne porte pas atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants. Cette mesure permettra de lutter contre la dégradation de nos centres-villes.
De même, la conclusion, à titre expérimental, de contrats de revitalisation commerciale ou artisanale pourra, espérons-le, monsieur le ministre, favoriser la redynamisation du commerce dans nos territoires. Enfin, disposition issue d’un amendement du groupe UMP du Sénat, la possibilité pour des personnes privées d’installer des systèmes de vidéoprotection aux abords de certains commerces particulièrement exposés pourra répondre aux inquiétudes des commerçants. Malheureusement, les actualités récentes ne me contrediront pas.
Correction, monsieur Saddier : cette mesure est issue d’un amendement du rapporteur au Sénat.
Dans ce cas, je salue donc le rapporteur du Sénat. Avant de conclure, je souhaitais revenir sur un point important concernant les dispositions relatives à l’urbanisme commercial, mais il faut que je me concentre, car le président Brottes ne cesse d’essayer de me dissiper !
Sourires.
Il s’agit pourtant d’un sujet fondamental. Lors de l’examen de la loi ALUR, vous aviez promis que le rapprochement entre urbanisme commercial et urbanisme de droit commun serait discuté ultérieurement. Bien que réformant les règles d’urbanisme, le Gouvernement et les sénateurs avaient en effet refusé la fusion des procédures relatives aux permis de construire et aux autorisations d’exploitation commerciale. Je me réjouis donc que le présent texte reprenne cette disposition : le permis de construire tiendra lieu d’autorisation d’exploitation commerciale dès lors que la CDAC aura émis un avis favorable. Cela donnera au maire une place centrale en matière d’urbanisme commercial.
En revanche, je reste plus dubitatif quant au possible rétablissement du document d’aménagement commercial, le DAC, dans les schémas de cohérence territoriale, les SCOT. L’article 129 de la loi ALUR, promulguée il y a tout juste deux mois, avait supprimé le DAC et réécrit l’article L. 122-1-9 du code de l’urbanisme en recentrant les questions relatives à l’équipement commercial et artisanal au sein du document d’orientations et d’objectifs. Or l’article 20 AB du projet de loi dont nous discutons aujourd’hui modifie à nouveau l’article L. 122-1-9 du code de l’urbanisme en rétablissant un DAC.
C’est à n’y plus rien comprendre ! Les services qui s’occupent d’urbanisme sur le terrain vont s’arracher les cheveux !
Monsieur le ministre, je n’appelle pas cela une simplification administrative. Ce n’est pas en changeant la législation tous les deux mois que nous allons oeuvrer pour la simplification !
Je prendrai un autre exemple, exactement dans le même esprit. Lors de l’examen de la loi ALUR, vous vous étiez opposés aux sénateurs qui souhaitaient que le PLU puisse distinguer les locaux destinés à des bureaux, à des commerces ou à des activités de services. Une rédaction alternative avait été trouvée, prévoyant qu’un décret « fixe la liste des destinations des constructions que les règles édictées par les plans locaux d’urbanisme peuvent prendre en compte. Cette liste permet de distinguer la destination des bâtiments, dans un objectif de mixité fonctionnelle. » Et aujourd’hui, deux mois après la promulgation de la loi ALUR, l’article 24 quater du présent projet de loi prévoit qu’un décret « fixe la liste des destinations des constructions que les règles édictées par les plans locaux d’urbanisme peuvent prendre en compte. Cette liste permet notamment de distinguer les locaux destinés à des bureaux, ceux destinés à des commerces et ceux destinés à des activités de services où s’effectue l’accueil d’une clientèle. » Là non plus, j’avoue ne plus rien y comprendre ! Comment ces deux décrets pourront-ils se superposer ?
Je ferme cette parenthèse sur l’urbanisme commercial, en espérant vous laisser songeurs quant à la cohérence de votre politique en la matière.
Globalement, ce texte comporte des mesures qui seront utiles, nous ne le contestons pas, mais qui ne permettront pas aux acteurs économiques de profiter d’un nouveau souffle, de développer leur activité et d’être plus compétitifs. Tel est pourtant l’enjeu premier pour notre économie. Le secteur du commerce, de l’artisanat et des TPE aurait mérité une réflexion plus globale et plus ambitieuse. Nous regrettons que ce ne soit pas le cas : c’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons à nouveau ce soir.
À titre beaucoup plus personnel, je ne terminerai pas mon intervention sans vous remercier, monsieur le ministre, d’être venu rendre une visite aux décolleteurs de la Haute-Savoie et de la vallée de l’Arve. Cela faisait deux ans que je vous y invitais.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Les promesses sont tenues !
Plus de dix-huit mois après la présentation en conseil des ministres du pacte pour l’artisanat et près d’un an après le plan d’action pour le commerce et les commerçants, nous arrivons enfin au terme de l’examen de ce projet de loi dit « Pinel », qui a pourtant fait l’objet d’une procédure accélérée. Si ce texte est attendu par les acteurs économiques, dans un contexte de crise toujours plus préoccupant, c’est notamment parce qu’il ne concerne pas moins de 95 % des entreprises de notre pays.
Le groupe UDI n’a pas cessé d’interpeller le Gouvernement sur la nécessité de porter une attention toute particulière à ces petites entreprises qui contribuent pleinement à la croissance et à l’emploi. Au-delà d’être de simples atouts pour notre économie, l’artisanat, le commerce et les très petites entreprises jouent également un rôle vital dans l’aménagement du territoire et le quotidien des Français. Ils contribuent à retisser un lien social entre les habitants, lien qui s’est souvent dégradé, voire totalement perdu, à cause de la crise.
Malheureusement, les premières victimes de cette crise sont les petites entreprises, souvent familiales, qui ne sont pas suffisamment armées et protégées pour faire face aux conséquences d’une conjoncture économique très délicate et dégradée. Carnets de commandes moins remplis, trésorerie défaillante, prêts bancaires refusés, pression fiscale, complexité normative : voilà autant de difficultés que les entrepreneurs rencontrent au quotidien dans l’exercice de leur activité.
Dans ce climat morose et pessimiste, il était donc urgent d’apporter une réponse législative forte pour dynamiser le secteur de l’artisanat, du commerce et des très petites entreprises. C’est tout l’objet du projet de loi qu’il nous est aujourd’hui demandé d’adopter définitivement. S’il ne répond que très partiellement à la gravité des enjeux que je viens de rappeler, ce texte contient néanmoins plusieurs dispositions qui vont dans la bonne direction et n’appellent pas d’opposition particulière de la part de notre groupe.
Le travail parlementaire doit également être salué, car la copie initiale du Gouvernement a été largement remaniée et corrigée lors de nos travaux, à l’image des dispositions relatives à l’auto-entreprenariat, qui constituaient pourtant le coeur de ce texte.
Le groupe UDI a toujours soutenu la création d’un statut de l’auto-entrepreneur, qui simplifiait enfin la vie des entreprises en permettant à des centaines de milliers de Français d’améliorer leur pouvoir d’achat dans un cadre légal simplifié. Six ans après son instauration, ce statut a fait la preuve de son succès, tout en essuyant certaines critiques, notamment de la part des artisans qui dénoncent une certaine distorsion de concurrence. Ces revendications sont réelles et pour la plupart justifiées. Elles posent donc la question légitime du réaménagement du statut de l’auto-entrepreneur. Malheureusement, la première version du texte prenait le risque de casser un régime qui a su montrer son efficacité et reste encore très largement plébiscité.
Le groupe UDI a toujours prôné une ligne claire sur ce sujet. Selon nous, il était absolument nécessaire de rapprocher les différents régimes de l’entreprise individuelle, avec un allégement des charges et du cadre juridique et fiscal applicables aux TPE et aux artisans. En effet, la simplicité propre au régime de l’auto-entrepreneur devrait devenir la règle pour tous, opposer les artisans aux auto-entrepreneurs ne pouvant être que contre-productif. Nous nous félicitons donc de constater que le texte a évolué dans le bon sens, avec la fusion du régime des auto-entrepreneurs au sein du nouveau régime de la micro-entreprise, qui englobera le microsocial et le microfiscal à compter du 1er janvier 2015. Mais le nouveau dispositif, qui a le mérite de l’harmonisation, perdra beaucoup en souplesse, même s’il était nécessaire et légitime de renforcer les obligations de formation et de présentation d’une attestation d’assurance, notamment dans le secteur de la construction.
Comme nous avons pu le mentionner en première lecture, la réforme des baux commerciaux était nécessaire, et nous ne voyons pas de point d’opposition majeur sur ce sujet. Ainsi, l’indexation des hausses de loyer sur l’indice des loyers commerciaux, le lissage de ces augmentations de loyer dans le temps, l’instauration d’un droit de préférence pour le locataire ou encore le renforcement du droit de préemption des communes sont autant de mesures qui étaient attendues. Nous appelons tout de même l’attention du Gouvernement sur le risque de prendre des dispositions générales qui régiront l’ensemble des baux alors même que les rapports locatifs recouvrent des réalités commerciales totalement différentes. Fort heureusement, nos travaux ont permis de faire évoluer le texte sur ce point. L’ensemble de ces mesures devra trouver son prolongement dans de véritables politiques territoriales visant à faciliter l’implantation des commerces, notamment dans les zones les moins attractives.
Les dispositions relatives à l’artisanat répondent, là encore, à des demandes exprimées par le secteur. Elles vont dans le sens d’une meilleure reconnaissance du savoir-faire artisanal et d’une protection renforcée des consommateurs.
S’agissant des commerçants, nous nous félicitons que le Gouvernement ait avancé sur la nécessité de sécuriser davantage les établissements. L’amendement visant à autoriser les commerçants exposés à installer des systèmes de vidéo-protection aux abords de leur magasin, que nous avions défendu dans cet hémicycle, a finalement été intégré dans le texte lors de sa discussion au Sénat, ce qui répond à une préoccupation importante dans un contexte d’augmentation de la criminalité.
De manière générale, nous saluons également l’ensemble des efforts de simplification contenus dans ce texte, même si nous sommes encore loin du choc annoncé par le Président de la République.
Dans le domaine de l’urbanisme, nous avons notamment regretté, avec Michel Piron, que ce projet de loi ne contienne pas une réforme d’ampleur afin de faire de l’urbanisme commercial une véritable composante du droit de l’urbanisme. Le Sénat a tout de même amélioré le texte en redonnant la main aux élus, qui pourront réintroduire la possibilité d’intégrer un document d’aménagement commercial dans le SCOT. Ce dernier pourra ainsi prévoir des conditions d’implantations spécifiques.
S’agissant enfin de la réforme du FISAC, nous regrettons simplement que Gouvernement ait choisi de restreindre son champ d’intervention plutôt que de chercher à pallier le manque de moyens et de lisibilité de cet outil majeur pour la préservation d’un tissu entrepreneurial de proximité, notamment en milieu rural.
En conclusion, le groupe UDI tient à saluer les avancées indéniables que ce texte comporte pour le secteur de l’artisanat et les très petites entreprises. Cependant, nous restons persuadés qu’une réflexion plus globale, plus ambitieuse et moins superficielle aurait dû être engagée en faveur des petites entreprises. Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, il sera donc nécessaire de se pencher sur l’élaboration de mesures fortes et plus incitatives pour redynamiser nos commerces et notre artisanat, et, plus globalement, pour redonner une place de choix au savoir-faire de ces entreprises. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UDI s’abstiendra sur ce projet de loi.
Je suis très heureux de vous retrouver dans cet hémicycle pour aborder le quotidien de l’artisanat, du commerce et surtout des très petites entreprises. Nous avons travaillé ensemble sur des solutions concrètes afin de soutenir notre économie, nos entreprises et, surtout, nos savoir-faire territoriaux. La commission mixte paritaire qui s’est réunie mercredi dernier a permis de dégager un consensus large sur ce projet de loi. Je tiens à saluer l’implication de tous les parlementaires, sénateurs comme députés, sur ce texte qui contient un certain nombre de solutions aux problèmes soulevés en première lecture, dans cet hémicycle et au Sénat.
Cela fait des mois que nous travaillons avec passion sur ce texte ; le rapporteur a animé un grand nombre d’auditions et de nombreux amendements sont venus enrichir le texte. Une telle politique économique vise à apporter des réponses adaptées à nos petites et très petites entreprises qui subissent la crise de plein fouet. C’est en permettant à nos concitoyens de monter une entreprise, en facilitant leurs démarches et en les accompagnant, qu’une étape peut être franchie. C’est ce que nous avons commencé à faire, notamment avec le rapport sur la simplification de la vie des entreprises, chère à notre collègue Thierry Mandon, et le rapport sur l’entreprenariat individuel de notre collègue Laurent Grandguillaume. Le projet de loi dont nous parlons ce soir est une troisième marche gravie, même si nous devons encore construire l’escalier du développement économique.
Pour Montesquieu, « L’histoire du commerce est celle de la communication des peuples. » C’est exactement cela : le commerce unit les citoyens, les rapproche. Le boulanger de quartier, le boucher-charcutier ambulant, le coiffeur ou le marchand de primeurs font vivre nos centres-villes et nos villages. Ils sont les véritables artisans de la cohésion sociale.
Le projet de loi vise à renforcer nos commerces pour défendre les emplois et être au service des citoyens. Tout d’abord, ce texte améliore les relations commerciales entre le bailleur et le locataire, en clarifiant les situations et en maîtrisant l’évolution des coûts locatifs. Après de nombreuses discussions, nous sommes parvenus en commission mixte paritaire à un équilibre. Le texte propose également que les contrats de bail deviennent plus précis en incluant la répartition des charges ; nous y avons ajouté les impôts et l’inscription d’un budget prévisionnel de travaux. Ainsi, la transparence est totale.
Très attendu par les commerçants, le texte propose aussi un plafonnement du prix du loyer : ce dernier ne pourra plus augmenter de plus de 10 % par rapport au loyer de l’année précédente. C’est une avancée que je tiens à saluer ce soir : en temps de crise il était nécessaire d’agir pour soutenir nos commerçants. Nous organisons d’ailleurs un droit de préférence pour le locataire, afin qu’il puisse, s’il le souhaite, maintenir son activité.
Nous renforçons la possibilité des communes de déléguer leur droit de préemption afin de garder une diversité des commerces pour les consommateurs et de lutter contre la mono-activité. Surtout, nous rénovons l’urbanisme commercial. À cet égard, chers collègues de l’UMP, dans l’amendement sur les documents d’aménagement artisanal et commercial, les DAAC, plutôt que la contrainte administrative qui imposerait à l’ensemble des élus d’intégrer les DAAC dans les SCoT, nous avons souhaité laisser une possibilité de choix. Chaque élu aura à assumer sa responsabilité et s’il le souhaite, il pourra intégrer les DAAC dans les SCoT. C’est dans cet esprit que la commission mixte paritaire a travaillé.
Il était nécessaire aussi de prendre en compte la redynamisation des centres-bourgs – le président Brottes l’a rappelé – et la revitalisation des zones rurales par le biais du FISAC, pour défendre l’idée du projet contre l’idée du guichet. Il était important de valoriser une démarche de projet de territoire.
En outre, le texte vise à promouvoir le développement des très petites entreprises, notamment artisanales. Il s’agit de revaloriser le secteur pour permettre à toute entreprise artisanale de demeurer immatriculée au répertoire des métiers, sans conditions de durée. Ces dispositions techniques vont améliorer le quotidien. Les chambres de commerces et d’artisanat ont un rôle indispensable à jouer pour nos commerces grâce à leur expertise et à leur connaissance du terrain.
De plus, afin de revaloriser la qualité d’artisan, ce titre sera désormais réservé aux chefs d’entreprise détenant une qualification professionnelle ou une expérience dans le métier qu’ils exercent. Les artisans, tous régimes confondus, devront notamment faire figurer sur leurs devis et leurs factures leur assurance décennale, chère à notre rapporteur.
Après discussion lors de la commission mixte paritaire, nous sommes parvenus à un accord sur le stage préalable à l’installation.
Enfin, ce qui me paraît essentiel, c’est la question des entrepreneurs et des micro-entreprises. La commission mixte paritaire a tranché pour un équilibre en mettant en place un statut juridique unique de l’entreprise individuelle. Ce nouveau statut était très attendu par les entrepreneurs, mais aussi par les artisans. Nous avons souhaité inciter les entrepreneurs à un parcours de croissance par l’accompagnement plutôt que sous une forme contraignante. Chacun participera aux frais de chambre de commerce, c’était important.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le projet de loi propose de nombreuses avancées et le groupe SRC, satisfait par le consensus qui s’est dégagé lors de la réunion de la commission mixte paritaire, votera ce texte. « Plus faibles sont les risques, meilleure est l’entreprise » écrivait Sophocle : c’est ce que nous faisons. Nous renforçons le cadre pour que nos commerces, nos petites entreprises puissent se développer sereinement. Nous avons franchi trois étapes, bâtissons désormais la croissance.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, suite à l’examen du texte au Sénat et à la commission mixte paritaire de mercredi dernier, où il a fait l’objet d’un large consensus, nous pouvons dire que nous sommes parvenus à un texte ambitieux, équilibré et adapté à notre environnement. Nous avons donné les moyens au commerce, à l’artisanat et aux très petites entreprises de développer leur activité et de s’adapter à un environnement économique changeant tout en permettant aux collectivités de mieux maîtriser l’implantation des commerces. Sur ce sujet, plusieurs points me semblent importants.
Tout d’abord, les avancées qui permettront de mieux réguler l’activité commerciale sur leur territoire, je pense à la nouvelle composition de la Commission nationale d’aménagement commercial qui assure désormais une représentation renforcée des élus. De plus, les critères d’appréciation de la commission permettront de mieux prendre en compte les besoins des territoires. Nous avons souhaité contrôler l’implantation des très grands ensembles commerciaux en donnant la possibilité à la Commission nationale de s’autosaisir.
Pour les projets commerciaux d’envergure, les élus auront ainsi une vision départementale, mais aussi nationale. Cela permettra, je l’espère, de préserver une offre commerciale diversifiée et équilibrée sur notre territoire, à condition que ces commissions départementales d’aménagement commercial ne soient pas que des « machines à dire oui », comme elles ont été souvent qualifiées. L’on estime en effet que 95 % des projets soumis aux CDAC sont acceptés dès le premier examen. S’ils ne le sont pas au niveau départemental, ils le sont systématiquement au niveau national.
Le thème de l’aménagement territorial me touche particulièrement. Très récemment, j’ai, sur ma commune, vu s’installer un pôle commercial qui n’est autre qu’un drive sur un terrain de plus d’un hectare, 10 790 mètres carrés précisément. Le bâtiment principal de ce drive représente 3 000 mètres carrés, ce qui n’est pas rien, 3 000 mètres carrés sans aucune autorisation d’exploiter si ce n’est le permis de construire. Cela va changer car nous en avons décidé ainsi. Mais pendant ce temps, nous voyons les commerces de centre ville fermer les uns après les autres. Et avec ces fermetures, c’est le lien social qui se délite.
Aujourd’hui, 62 % du chiffre d’affaires du commerce est réalisé en périphérie contre 25 % en centre-ville et 13 % dans les quartiers. Avec ce texte, certes, nous encadrons davantage l’installation des grands ensembles commerciaux, mais je pense que nous aurions pu aller bien plus loin, concernant les drive notamment. D’un point de vue juridique le drive est assimilé à un entrepôt et non à une surface commerciale, si bien que les projets échappent aux règles des commissions d’aménagement commercial.
À cet égard j’avais déposé un amendement que j’ai retiré avec regret qui visait à ce que les drive soient assujettis à la taxe sur les surfaces commerciales, taxe affectée aux communautés de communes. Même si ce ne sont pas des surfaces commerciales au plan juridique, ces entités existent bel et bien et affectent l’équilibre commercial. Elles devraient donc être, me semble-t-il, recensées au même titre que les surfaces commerciales.
Je ne doute pas qu’il existera demain une solution juridique à cet effet. J’espère que nous pourrons à nouveau examiner cette proposition et chiffrer son impact à l’occasion de la prochaine loi de finances. Cela permettrait, monsieur le ministre, de repenser l’aménagement commercial en faveur des coeurs de villes, qui se sont dévitalisés.
Enfin, je salue l’expérimentation du contrat de revitalisation artisanale et commerciale qui donnera à l’État et aux collectivités un cadre sécurisé et concerté pour mener des actions de sauvegarde, de protection et de modernisation du commerce de proximité sur un territoire identifié.
Pour conclure j’évoquerai à mon tour les 7 millions de salariés et les 3,4 millions d’entreprises qui représentent l’artisanat, le commerce et les très petites entreprises. Nous considérons en effet que la diversité, la qualité, le professionnalisme, les savoir-faire, le temps qui permet la formation et l’apprentissage sont essentiels. Les commerçants, les artisans sont une richesse, une chance dont on ne peut se passer et qu’il nous faut encourager.
Derrière ces artisans, commerçants, TPE ancrés dans les territoires, il y a des hommes et des femmes qui attendent l’embellie économique, s’inquiètent pour leur activité, leur emploi et espèrent que la politique de relance engagée depuis maintenant deux ans viendra accompagner leur dynamisme. Notre but est de favoriser la diversité des commerces dans les territoires, notamment les plus fragiles, en renforçant les leviers des pouvoirs publics. C’est ce que nous avons mis en oeuvre, gouvernement et parlementaires, avec le projet de loi sur la consommation et son volet LME – loi de modernisation de l’économie –, le projet de loi sur le logement et ses dispositions sur l’urbanisme commercial, enfin avec ce projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.
Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisie.
La parole est à M. Fabrice Verdier, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 3 .
L’amendement vise à supprimer l’alinéa 47, qui n’est plus justifié suite aux travaux de la commission mixte paritaire.
L’amendement no 3 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements adoptés par l’Assemblée.
L’ensemble du projet de loi est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Vote sur l’ensemble
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures quarante-cinq.
L’ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence (n° 1956).
La parole est à M. Alain Fauré, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Madame la présidente, monsieur le ministre des finances et des comptes publics, mes chers collègues, la proposition de loi soumise aujourd’hui a été déposée à l’initiative du groupe SRC de l’Assemblée nationale. Elle apporte une réponse complète et je dirai définitive au problème des avoirs financiers en déshérence et à l’objectif essentiel de protection des droits des épargnants.
Elle complète les efforts engagés par le législateur au cours des dernières années, en particulier dans le cadre de la loi du 17 décembre 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et les dispositions obligeant les assureurs à porter des informations précises concernant les bénéficiaires des contrats d’assurance afin de faciliter leur recherche le moment venu.
Elle est le résultat d’un travail de longue haleine, qui a impliqué la Cour des comptes pour l’établissement du constat, les services administratifs compétents et parties prenantes pour consultation, ainsi que le Conseil d’État saisi par le président de l’Assemblée nationale pour assurer que cette démarche parlementaire soit aussi exemplaire que possible.
Le Sénat a également contribué à enrichir les dispositions initialement prévues par la proposition de loi, de manière consensuelle, puisque je rappelle qu’elle a été adoptée en première lecture par nos deux chambres à l’unanimité et que très peu de sujets restaient en discussion pour la préparation de la CMP.
Sur treize articles, cinq avaient été adoptés conformes par le Sénat en première lecture et la plupart des modifications introduites par nos collègues sénateurs visaient à accroître le champ de la proposition de loi, notamment aux coffres-forts considérés comme inactifs, répondant ainsi à une préoccupation légitime.
Dans ce contexte, la réunion de la CMP a été fructueuse et a abouti à un texte permettant de traiter les situations de déshérence de manière exhaustive et de renforcer très sensiblement l’information et la protection des intérêts des épargnants, mais également de l’État auquel reviennent les sommes non réclamées pendant plus de trente années, en application de la règle de la déchéance trentenaire.
À ce sujet et pour rappel, les montants en jeu sont significatifs, si l’on se réfère aux estimations présentées par la Cour des comptes dans son rapport de juillet 2013 : 1,8 million de comptes inactifs pour un encours de 1,6 milliard d’euros, qui seront les bienvenus ; les encours sur les comptes dont les titulaires sont décédés pourraient être de l’ordre de 1,2 milliard d’euros ; l’encours des contrats d’assurance-vie et de capitalisation non réclamés pourrait atteindre 2,76 milliards d’euros au minimum. Pour les coffres forts, les montants ne peuvent pas être estimés – cela constituera une heureuse surprise lors des ouvertures tant sur les montants financiers que les valeurs des biens qu’ils renferment.
Je tiens également à souligner la rapidité avec laquelle nous avons pu légiférer sur ce sujet consensuel et remercie le Gouvernement d’avoir accompagné cette initiative parlementaire, émanant de notre ancien collègue Christian Eckert, alors rapporteur général et devenu secrétaire d’État au budget.
Excellent secrétaire d’État !
Déposée en novembre 2013, examinée selon la procédure accélérée avec l’accord de son auteur, la loi pourrait être promulguée avant l’été, laissant au Gouvernement le temps de préparer les textes réglementaires nécessaires avant l’entrée en vigueur de la loi, au 1erjanvier 2016. Le rapport de suivi de l’application de la loi prévu par notre règlement permettra de s’assurer de la bonne mise en oeuvre des mesures réglementaires et du respect de l’intention du législateur.
Je vous rappelle les grandes lignes du dispositif.
Pour les comptes bancaires inactifs, la proposition de loi prévoit un régime spécifique avec plusieurs apports importants.
Elle introduit une définition des comptes bancaires inactifs, ce qui représente une avancée législative importante et permet de soumettre les teneurs de compte à des obligations particulières en termes d’information des titulaires et de conservation des dépôts et titres concernés.
Par ailleurs, les fonds non réclamés devront être transférés à la Caisse des dépôts et consignations à l’issue d’un délai de dix ans d’inactivité pour les comptes « abandonnés » par leur titulaire et, à l’issue d’un délai de trois ans, et non plus de deux ans à la suite d’un amendement du Sénat, après le décès du titulaire du compte pour les comptes de personnes décédées.
La Caisse des dépôts sera alors en charge de restituer les sommes qu’elle a reçues de la part des établissements bancaires pour le compte de leurs titulaires, à ces derniers ou, le cas échéant, à leurs ayants droit. En l’absence de réclamation, elle sera également chargée d’appliquer le principe de déchéance trentenaire de ces avoirs en déshérence au profit de l’État. La CDC appliquant ce principe avec rigueur, une telle évolution participe à la préservation des intérêts financiers de l’État.
À la suite d’un amendement adopté au Sénat, des dispositions propres aux coffres-forts ont été introduites de manière à définir leur inactivité – absence de manifestation ou d’opération pendant dix ans et frais de location non acquittés au moins une fois. Les établissements bancaires sont alors tenus de rechercher le locataire du coffre et de l’informer, ou d’informer son représentant légal ou ses ayants droit connus, des dispositions relatives à l’ouverture du coffre en cas d’absence de manifestation de leur part. Si l’inactivité perdure pendant vingt années supplémentaires, soit au total trente ans, les coffres peuvent être ouverts en présence d’un huissier et leur contenu est alors soit liquidé par l’établissement, soit vendu aux enchères publiques. Le produit de ces opérations est reversé à l’État. Pour les objets d’une valeur inférieure à un seuil fixé par arrêté du ministre de l’économie – autour de 10 euros –, les établissements ont le choix entre les détruire et les conserver ou les transférer à des organismes publics intervenant dans le domaine culturel ou historique.
Enfin, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sera chargée d’assurer le respect de ces nouvelles règles et, le cas échéant, de prononcer des sanctions.
S’agissant des assurances-vie, il est proposé qu’il soit mis fin au contrat détenu par l’assureur si aucune réclamation du capital ou des prestations garanties n’est intervenue pendant une période de dix ans à compter de la date de connaissance du décès par l’assureur ou de l’échéance du contrat. Si le contrat n’est pas en euros, après liquidation des unités de comptes, les sommes détenues sur ce contrat seront déposées en numéraire à la Caisse des dépôts. Cette dernière exercerait alors sa mission de tiers de confiance en détenant les sommes déposées pour le compte de leurs bénéficiaires, lesquels disposeraient, comme pour les comptes bancaires inactifs, de vingt années pour se manifester auprès d’elle avant que ne s’applique la déchéance trentenaire au profit de l’État.
En conclusion, mes chers collègues, je vous demande d’adopter ce texte issu de la réunion de la CMP ainsi que les quelques amendements de nature rédactionnelle que devrait présenter le Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et UDI.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis ici ce soir pour saluer l’accord des deux assemblées sur le sujet des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance-vie en déshérence, source d’une injustice qui a, depuis de nombreuses années, mobilisé l’ensemble du Parlement tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.
Le débat sur les avoirs bancaires et les contrats d’assurance-vie en déshérence a duré pendant trop longtemps. Cette initiative parlementaire, de grande qualité, marquée par le sceau de son auteur, votre ancien rapporteur général du budget, Christian Eckert, enrichie par l’Assemblée nationale et le Sénat, traite le sujet de façon particulièrement satisfaisante.
En ce qui concerne le premier volet de la proposition, relatif aux comptes bancaires, il y a tout d’abord l’introduction d’une définition des comptes bancaires inactifs dans le code monétaire et financier. Cette disposition comble une lacune du cadre juridique applicable aux comptes bancaires inactifs qui ne sont pas aujourd’hui définis par la loi et sur lesquels l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ne peut donc exercer un contrôle efficace.
Le texte prévoit un ensemble d’obligations à la charge des banques, en particulier une obligation de consultation annuelle du répertoire national d’identification des personnes physiques, pour vérifier que le titulaire du compte n’est pas décédé, le recensement des comptes inactifs et le plafonnement des frais perçus, ainsi que l’obligation de transfert des fonds à la Caisse des dépôts.
Le Sénat a par ailleurs trouvé une solution ad hoc pour la gestion du contenu du coffre-fort en déshérence, qui a été précisée en CMP. C’est une solution pragmatique dont le Gouvernement se félicite.
Le texte a trouvé sur tous ces sujets un bon équilibre.
S’agissant des contrats d’assurance-vie en déshérence, les premières avancées adoptées dans le cadre du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires répondaient, en partie seulement, à la question de la recherche d’information des bénéficiaires. La proposition de loi prévoit ainsi de nouvelles obligations portant sur les assureurs dont le renforcement des contrôles, la revalorisation, le plafonnement des frais de gestion, ainsi que l’obligation, là aussi, de transfert des sommes détenues à la Caisse des dépôts.
Par ailleurs, en complément des obligations imposées au teneur de comptes, la proposition de loi prévoit d’organiser une consultation des fichiers détenus par l’administration fiscale recensant les comptes bancaires – le fameux fichier FICOBA – et les contrats d’assurance vie – le non moins fameux fichier FICOVIE – par les notaires réglant une succession.
Enfin, le Sénat a étendu l’obligation de revalorisation post mortem du capital garanti aux contrats d’assurance sur la vie dépourvus de valeur de rachat souscrit par des personnes physiques, telles que des assurances temporaires décès. Cette extension a le mérite de traiter de manière identique tous les contrats d’assurance-vie souscrits par des personnes physiques et d’éviter que le retard du règlement des prestations par un assureur ne se traduise par un manque à gagner pour les bénéficiaires.
En outre, le texte propose une solution efficace avec l’obligation de transfert des fonds, après un certain délai, à la Caisse des dépôts, qui serait chargée de les consigner jusqu’à l’application de la prescription. Cette mission confiée à la Caisse des dépôts est essentielle et permet de donner au nouveau dispositif toute son efficacité en instaurant un guichet unique. Ceci permet de préserver les droits des clients ou de leurs ayants droit, mais également l’application correcte de la prescription trentenaire en faveur de l’État.
En effet, la bonne application du principe de prescription trentenaire devrait permettre à l’État de percevoir in fine les fonds dont les propriétaires ne peuvent pas être identifiés. Le manque de diligence des établissements de crédit et des entreprises d’assurance ainsi que les insuffisances de la législation actuelle privent aujourd’hui l’État de ces recettes qui lui reviennent de droit. Le Gouvernement donne donc entièrement raison à cette proposition.
Enfin, un amendement du Gouvernement avait été déposé au Sénat pour fixer la date d’entrée en vigueur de la réduction de la durée des plans de surendettement de huit à sept ans, décidée dans la loi relative à la consommation du 17 mars 2014. Je vous avais proposé la date du 1er juillet 2015 ; la commission mixte paritaire propose plutôt la date du 1er juillet 2016 : je suis d’accord avec cette date, qui laissera effectivement plus de temps aux acteurs pour s’adapter à cette évolution.
Les enjeux de cette proposition de loi pour la protection des clients, qu’ils soient assurés ou épargnants, et pour la préservation des intérêts financiers de l’État sont nombreux. Je soutiens donc avec force le texte tel qu’il nous est présenté aujourd’hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons ce soir le texte d’une proposition de loi de l’actuel secrétaire d’État au budget, Christian Eckert, dont l’objectif est de permettre le retour à leurs propriétaires des comptes bancaires inactifs ou des contrats d’assurance vie non réclamés. Voté en des termes légèrement différents par notre assemblée et par le Sénat, ce texte recueille une large unanimité. Il vient combler de graves lacunes de notre droit en matière d’avoirs bancaires inactifs et de contrats d’assurance vie en déshérence. Comme nous le savons, les banques comptabilisent des dizaines de milliers de comptes bancaires inactifs, oubliés par leurs détenteurs ou tout simplement ignorés au moment du règlement de la succession du titulaire décédé. Le montant des encours concernés s’élève à 1,2 milliard d’euros pour les comptes bancaires et à 2,7 milliards d’euros pour les contrats d’assurance vie selon les chiffres de Bercy – soit un total de près de 4 milliards d’euros !
La proposition de loi vient opportunément tenter de remédier à ces pratiques. Elle crée ainsi une obligation de recensement annuel des comptes inactifs et leur transfert à la Caisse des dépôts et consignations, la CDC, si l’inactivité dépasse deux ans en cas de décès, dix ans dans les autres cas. Pour les assurances vie, elle prévoit la fin du contrat s’il n’y a eu aucune réclamation du capital dix ans après la connaissance du décès ou l’échéance du contrat, le plafonnement des frais de gestion ou encore l’obligation de transférer les fonds dormants à la CDC. Les notaires seront également tenus de consulter le fichier central des comptes bancaires, le FICOBA, et le fichier des contrats d’assurances vie, le FICOVIE. Les bénéficiaires auront de leur côté vingt ans pour se manifester auprès de la Caisse des dépôts ; passé ce délai, l’État sera destinataire des fonds.
Le Sénat a élargi le champ du dispositif en renforçant les moyens de recherche et d’information des assureurs grâce aux possibilités d’obtenir de l’administration fiscale les coordonnées d’une personne physique en précisant les conditions de liquidation, au terme d’un délai de dix ans, des titres déposés sur des comptes inactifs et en créant un dispositif spécifique pour les coffres-forts en déshérence. Ces ajouts, acceptés par la commission mixte paritaire, sont les bienvenus.
La question des contrats d’assurance vie en déshérence n’est certes pas nouvelle : plusieurs dispositions ont été adoptées depuis 2005 pour contraindre les assureurs à effectuer la recherche des bénéficiaires. Comme le souligne cependant la Cour des comptes, la loi n’était pas « intégralement appliquée par les assureurs », les défaillances étant nombreuses et les consultations du répertoire national d’identification des personnes physiques souvent tardives, voire inexistantes. Il importait que le législateur durcisse le ton et qu’il statue en outre, au-delà du seul cas des contrats en déshérence, pour englober l’ensemble des avoirs – comptes courants, livrets, etc. – qui dorment dans les coffres des banques après le décès de leur titulaire.
Nous saluons donc le texte qui nous est proposé ; nous nous réjouissons notamment des mesures prises en matière de comptes bancaires inactifs. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la consommation, nous avions défendu un amendement visant à interdire la perception de frais bancaires sur les comptes inactifs qui n’enregistrent plus de mouvements au crédit ou au débit depuis plus d’un an. Une large majorité des banques facturent en effet des frais de tenue pour les comptes courants sans activité. Souvent très élevés, les tarifs appliqués peuvent atteindre près de 140 euros et se situent en moyenne autour de 50 à 70 euros par an. Le présent texte, bien que n’allant pas si loin, met fin aux pratiques abusives qui consistent pour les banques à ponctionner une part importante des actifs alors que la gestion de ces comptes génère des coûts marginaux.
L’obligation faite aux banques, et que vous avez rappelée, monsieur le ministre, de consulter annuellement le registre national d’identification des personnes physiques et l’obligation subséquente d’information des titulaires sont des mesures qui vont aussi dans le bon sens. L’obligation faite aux notaires de consulter le fichier des comptes bancaires tenu par l’administration fiscale est une mesure utile, qui permettra là aussi de mieux garantir les droits des épargnants. En matière d’assurance vie, le texte propose également des avancées notables en prévoyant des mesures protectrices qui reçoivent, je crois, l’assentiment de tous.
Reste l’épineuse question des contrôles. La présente proposition de loi ne produira les effets souhaités que si l’administration contrôle effectivement le respect des règles du jeu par les établissements bancaires et les assureurs. Or, c’est bien là que le bât blesse – tout ne peut pas être parfait, monsieur le ministre !
Dommage : jusque-là, c’était très bien !
Sourires.
La politique de réduction drastique des dépenses publiques menace aujourd’hui l’efficacité de ces contrôles. Ce qui est vrai en matière de lutte contre les paradis fiscaux l’est aussi en matière de lutte contre les pratiques frauduleuses de certaines banques et assurances. Les coupes sombres opérées notamment dans les effectifs de la direction générale des finances publiques depuis plus de dix ans – dix ans ! – laissent songeur quant à l’effectivité des mesures de contrôle et de sanction que nous pouvons prendre dans cet hémicycle.
La question des pratiques frauduleuses ou pour le moins douteuses des banques et assurances ne se limite pas non plus aux cas des comptes inactifs et des contrats en déshérence. Lors de l’examen du projet de loi consommation, nous avions dénoncé les manoeuvres dilatoires auxquelles se livrent entre autres certaines compagnies d’assurances pour proroger artificiellement le délai de versement du capital ou de la rente garantis aux bénéficiaires des contrats d’assurance vie. Nous savons que le code des assurances prévoit actuellement que l’entreprise d’assurance dispose d’un délai d’un mois après réception des pièces justificatives pour procéder au versement. Or, contournant ces dispositions, certains assureurs omettent sciemment de réclamer l’ensemble des pièces justificatives en une seule fois, ce qui autorise l’envoi de plusieurs courriers qui retardent d’autant le délai de versement effectif, sans pénalités de retard.
Nous ne pouvons pas non plus, dans le même esprit, passer sous silence la question des frais bancaires. Après dix années de hausse, ces frais ont certes légèrement reculé, la loi bancaire limitant les commissions d’intervention et la directive de la Commission européenne sur les virements et prélèvements SEPA – Single Euro Payments Area – ne permettant plus aux banques de facturer par exemple l’autorisation de prélèvement pour régler les notes de téléphone. Si de nombreuses banques ont par ailleurs abandonné les fameux packages pour revenir, sous la pression des associations de consommateurs, à une tarification « à la carte » de leurs services, il nous faut néanmoins constater que cette avancée se paie d’une hausse d’autres tarifs. Près de la moitié des établissements ont ainsi réintégré les frais de tenue de compte, qui avaient quasiment disparu, en facturant de nouveau à leurs clients le simple fait d’être client.
Ces quelques exemples illustrent la persistance de nombreuses et graves anomalies dans les relations des banques et assurances avec leurs clients. Ce sujet, auquel nos concitoyens sont particulièrement sensibles, mériterait d’être traité dans sa globalité au travers d’un texte législatif plus vaste. Un texte plus vaste permettrait également de revenir sur la question de l’inclusion bancaire, qui nous tient, vous le savez, particulièrement à coeur. En effet, si près de 99 % de la population française a aujourd’hui accès à un compte bancaire, l’exclusion bancaire demeure cependant une réalité. L’offre de produits bancaires adaptés à certains profils de clients – salariés intérimaires ou en CDD – tout comme les démarches d’information, de conseil, d’orientation vers des organismes sociaux et de prévention des impayés, sont à ce jour extrêmement limitées. Nous ne pouvons compter sur la seule responsabilité sociale des entreprises et les initiatives prises par certains établissements pour mieux tenir compte de la situation de leurs clients fragiles. Il y a matière à renforcer notre arsenal législatif, notamment en garantissant une meilleure transparence des pratiques bancaires à l’égard des clientèles les plus fragiles. Les progrès qui restent à réaliser doivent nous inciter à prolonger le travail entamé avec cette proposition de loi, à laquelle nous réitérons notre soutien sans réserve !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Si j’en avais le droit, j’applaudirais ! (Sourires.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, au terme de la navette parlementaire qui a vu ce texte adopté à l’unanimité tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, la commission mixte paritaire qui s’est tenue le 20 mai dernier a, comme chacun le sait, abouti à un accord. On ne peut que se réjouir de cette issue heureuse sur un sujet qui était devenu un véritable serpent de mer.
La problématique des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance vie en déshérence n’est certes pas un sujet médiatique de premier plan, mais c’est un sujet important, dont on parle depuis longtemps, avec des sommes importantes en jeu. Je me félicite donc que nous ayons pu débattre de manière constructive et aboutir à un texte équilibré.
Sur la base du rapport de la Cour des comptes portant sur les avoirs bancaires et les contrats d’assurance vie en déshérence, présenté en juillet 2013 en commission des finances, le texte sur lequel nous allons nous prononcer crée une obligation de recensement annuel des comptes inactifs et impose leur transfert à la Caisse des dépôts et consignations si l’inactivité dépasse trois ans en cas de décès et dix ans dans les autres cas.
Pour l’assurance vie, elle prévoit la fin du contrat s’il n’y a eu aucune réclamation du capital dix ans après la connaissance du décès ou l’échéance du contrat, ainsi que le plafonnement des frais de gestion et l’obligation de transférer les fonds dormants à la Caisse des dépôts et consignations.
L’objet de cette proposition de loi est donc d’assurer le respect des droits des épargnants en garantissant un cadre juridique permettant le retour à leurs propriétaires légitimes de fonds qu’ils ont délaissés ou dont ils ne connaissent pas l’existence, et qui demeurent aujourd’hui de manière indue au bilan d’institutions financières. Il s’agit à cet égard d’une traduction assez stricte des recommandations de la Cour des comptes, qui soulignait dans son rapport la persistance de certaines pratiques d’établissements de crédit et de compagnies d’assurances portant atteinte à la protection des épargnants. Malgré le cadre juridique que le législateur a progressivement mis en place ces dernières années, en particulier en 2005 et en 2007 pour les contrats d’assurance vie – j’ai plaisir à le rappeler, mes chers collègues ! –, il apparaît en effet que ce cadre demeure insuffisant.
Ainsi, la loi du 17 décembre 2007, adoptée à l’initiative de notre collègue Yves Censi et qui imposait aux assureurs l’identification des personnes décédées et la recherche des bénéficiaires, n’est selon la Cour pas intégralement appliquée. Quant aux obligations des banques envers leurs clients, la loi est clairement insuffisante puisqu’en l’état du droit, aucune obligation n’est imposée aux banques concernant les comptes bancaires inactifs hormis le principe général de la déchéance trentenaire. Il y a d’ailleurs une forme de distorsion de traitement entre les compagnies d’assurance vie, qui ont l’obligation contractuelle de rechercher les ayants droit, et les établissements bancaires. Mon seul regret concernant ce texte, monsieur le ministre, c’est qu’il ne traite pas cette distorsion existant entre les compagnies d’assurance, à qui on impose la recherche des ayants droit, et les établissements bancaires classiques : je trouve cela un peu dommage ; mais peut-être reviendrons-nous ultérieurement sur ce chantier.
La Cour des comptes estime que les encours des avoirs bancaires atteindraient 1,6 milliard d’euros tandis que l’encours des contrats d’assurance vie et de capitalisation non réclamés atteindrait 2,76 milliards d’euros. Nous avons pu découvrir, notamment au Sénat, des chiffres différents, parfois totalement, lors des débats parlementaires. Au-delà des montants, il est important que ces sommes ne demeurent plus indéfiniment dans les livres des établissements de crédit et des compagnies d’assurances sans que leurs propriétaires légitimes soient informés de leur existence.
Plusieurs milliards d’euros de fonds dorment sur des comptes bancaires ou dans des assurances vie. Or, non seulement ces fonds constituent des ressources quasiment gratuites pour les établissements financiers puisque, en l’absence de mouvement sur le compte, les coûts de gestion pour les banques sont très faibles, voire quasiment nuls, mais, de surcroît, des frais de gestion sont parfois prélevés sur ces comptes dits dormants. En effet, si les livrets réglementés ne subissent aucun frais, tel n’est pas le cas des comptes courants. Ceux-ci supportent des frais annuels qui s’élèvent, par exemple, à 50 euros à la Société générale, à 82 euros chez LCL et jusqu’à 135 euros au Crédit du Nord : c’est dire la disparité des frais de gestion ! Je vous rappelle que les frais de gestion peuvent être prélevés jusqu’à l’épuisement du capital disponible : de là vient le peu d’empressement de certains établissements à rechercher les ayants droit comme à appliquer la prescription trentenaire.
Sur ces milliards dormants, seuls 50 millions d’euros ont rejoint les caisses de l’État en 2012 au titre des comptes bancaires inactifs et un peu plus de 6 millions d’euros de 2008 à 2012 au titre des contrats d’assurance vie. Les banques n’ont donc formellement aucun intérêt à vérifier si les titulaires des comptes inactifs sont toujours vivants. Il apparaît dans le même temps qu’elles gèrent un nombre croissant de comptes inactifs. Selon le rapporteur général du budget au Sénat, les banques détiennent 670 000 comptes de centenaires, alors que le nombre de centenaires en France est de 20 000 : vous voyez l’écart ! D’où l’importance des dispositions prévues par ce texte qui instaure un régime juridique nouveau applicable aux comptes bancaires inactifs et renforce le dispositif existant pour les contrats d’assurance vie.
Un mot tout de même de l’article 12 bis A relatif à la date d’entrée en vigueur de la réduction de durée des plans de surendettement prévue par la loi relative à la consommation. Contre toute attente, alors que l’ensemble des parties prenantes s’étaient mises d’accord lors de l’examen de la loi relative à la consommation pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2017, l’article 12 bis A issu du Sénat a prévu une entrée en vigueur au 1er juillet 2015. Compte tenu des délais incompressibles de mise à jour des systèmes d’information pour se mettre en conformité avec la réduction de la durée des plans de traitement du surendettement, la commission mixte paritaire a judicieusement adopté un amendement repoussant l’entrée en vigueur au 1er juillet 2016, date qui je crois fait consensus, ce dont je me félicite. Je vous ai entendu, monsieur le ministre, donner votre approbation à cette date d’entrée en vigueur.
Et je vous ai entendue approuver mon approbation !
C’est parfait !
En conclusion, cette proposition de loi poursuit un triple objectif que le groupe UMP approuve : elle améliore la protection des épargnants, à l’origine des recommandations de la Cour des comptes, dans le prolongement de la loi de 2007 ; elle fournit de nouvelles ressources à la Caisse des dépôts et consignations et renforce ainsi sa capacité de mener à bien ses missions d’intérêt général ; elle défend enfin les intérêts de l’État en renforçant les conditions d’application de la déchéance trentenaire. C’est pourquoi je suis ravie de vous annoncer que le groupe UMP votera pour le texte issu de la commission mixte paritaire.
Dans la période actuelle, tous les soutiens sont bons : j’engrange tout !
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui n’est pas une idée nouvelle. En effet, cette proposition de loi est le fruit d’un travail de réflexion engagé il y a maintenant près de dix ans, notamment à l’initiative de nos collègues centristes.
Notre collègue sénateur de la Marne, Yves Détraigne, avait été à l’origine d’un dispositif, adopté en 2005, lors de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance. Il s’agissait alors de consacrer, pour la première fois, l’obligation pour l’assureur de rechercher les bénéficiaires de contrats non réclamés après le décès de l’assuré, à la condition que les coordonnées de ceux-ci soient portées au contrat. Cette disposition avait alors constitué une première avancée.
En 2006, la loi de financement de la Sécurité sociale avait ensuite prévu que les montants des contrats non réclamés seraient reversés au terme d’un délai de trente ans au Fonds de réserve des retraites. Puis, la loi de 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés avait continué d’améliorer la législation au bénéfice de nos concitoyens. Avait alors été instaurée l’obligation faite aux assureurs de s’informer de l’éventuel décès des souscripteurs et de rechercher, le cas échéant, les bénéficiaires. D’une démarche volontaire du bénéficiaire potentiel pour obtenir l’information, c’était désormais l’information qui irait vers les personnes concernées.
En 2010, c’est enfin notre collègue sénateur Hervé Maurey qui avait présenté une proposition de loi relative aux contrats d’assurance sur la vie. Elle visait à renforcer la transparence sur l’état des stocks et à améliorer les recherches engagées par les sociétés d’assurance pour en retrouver les bénéficiaires. Ses dispositions ont d’ailleurs été partiellement reprises par l’article 75 de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, contribuant ainsi, bien que de manière limitée, à renforcer de nouveau le cadre législatif existant. Mais il était nécessaire d’aller plus loin.
En effet, force est de constater que la question de la déshérence ne se limite pas au seul devenir des contrats d’assurance sur la vie. Cette problématique touche en effet l’ensemble des produits d’épargne, des comptes bancaires et même, monsieur le rapporteur, le contenu des coffres-forts. Or il n’existe actuellement aucun cadre législatif définissant ce phénomène et permettant d’évaluer son ampleur. Il n’y a ainsi aucun moyen de s’assurer que les biens détenus sont rendus à leurs bénéficiaires ou à leurs ayants droit.
Cette question ayant été soulevée au cours du débat sur la loi bancaire, le Gouvernement s’était alors déclaré prêt à « examiner les moyens d’améliorer le dispositif existant ». C’est pourtant une initiative parlementaire, que nous devons à notre ancien rapporteur général, à présent secrétaire d’État au budget,…
Excellent secrétaire d’État !
…qui a abouti à la proposition de loi que nous nous apprêtons à adopter. C’est, en effet, en juillet 2013 que la Cour des comptes a rendu public un rapport sur les avoirs bancaires et les contrats d’assurance-vie en déshérence et les coffres-forts. Ce rapport lui avait été demandé par la commission des finances de l’Assemblée nationale, en application de l’article 58 de la LOLF. C’est sur cette base que Christian Eckert a rédigé sa proposition de loi qui est très proche des propositions de la Cour des comptes.
Compte tenu de l’importance du sujet, nous saluons la démarche consensuelle qui a été adoptée, notamment la consultation de tous les acteurs concernés et l’expertise solide sur laquelle elle s’appuie. Monsieur le ministre, c’est tellement rare dans cette Assemblée, qu’il faut le souligner. Et cela pourrait peut-être même vous donner des idées sur d’autres textes.
J’y suis prêt si je suis sûr de votre vote !
Sourires.
Ce n’est pas nécessaire : c’est public !
Cette proposition de loi va dans le bon sens, car elle a pour objet principal d’assurer le respect des droits des épargnants en établissant un cadre juridique de nature à permettre le retour à leurs propriétaires légitimes de fonds délaissés dont ils ne connaissaient pas l’existence, et qui demeurent aujourd’hui de manière anormale au bilan d’institutions financières. La Cour des comptes a d’ailleurs constaté que les volumes financiers dont il est question pourraient représenter des montants non négligeables. Ainsi, les comptes dits inactifs, c’est-à-dire les comptes sur lesquels aucune opération n’est constatée sur une période longue, représenteraient un volume d’actifs de l’ordre de 1,6 milliard d’euros, pour un nombre total de 1,8 million de comptes. Entre nous, cela ne fait pas beaucoup : cela représente en moyenne 900 euros par compte ! Monsieur le ministre, je vois que vous riez, mais il n’y a pas de quoi puisqu’il s’agit tout de même de 1,6 milliard et je sais que l’argent vous intéresse !
Je ris parce qu’en Suisse cela représente en moyenne 900 000 euros ! Et la médiane est à 400 000 euros.
Cela ne fait qu’une petite partie des actifs non déclarés qui s’élèvent à 83 milliards selon les déclarations du gouvernement helvétique... Nous sommes loin de ces montants ici.
Quant à l’encours des contrats d’assurance-vie et de capitalisation non réclamés, il serait également important, à hauteur de 2,76 milliards d’euros au minimum.
Cette situation, qui perdure depuis de nombreuses années, n’est tolérable ni d’un point de vue éthique, parce qu’il n’est pas normal que les sommes déposées ou souscrites ne profitent pas à leurs bénéficiaires, ni d’un point de vue économique et fiscal, puisqu’il serait beaucoup plus utile que cet argent soit réinjecté dans l’économie. Il est donc temps d’y mettre fin.
L’assurance-vie étant le produit de placement préféré des Français, une sécurité juridique doit leur être garantie. C’est pourquoi le groupe UDI soutiendra cette proposition de loi.
Nous tenons en particulier à souligner les avancées importantes apportées par le Sénat, concernant les coffres-forts. Le groupe UDI avait, en première lecture, proposé des amendements à ce sujet.
L’argument du rapporteur de l’époque pour les repousser ne nous avait pas entièrement convaincus. Il nous avait dit en effet qu’on pourrait y trouver par exemple des lettres, des documents privés, ce qui constituerait une atteinte à l’intimité. Imaginons, monsieur le ministre, qu’on trouve dans un coffre des lettres qui feraient état de vos relations intimes. Si la personne habilitée, qui est tenue au secret, les lit et décide qu’elles n’ont aucun intérêt, on les détruit. Mais dans le cas où ces documents ont un intérêt pour l’histoire de France…
Ce qui serait le cas en l’occurrence !
Sourires.
Effectivement ! Il y a d’excellents livres sur les amours des grands de ce monde, qui expliquent, comme chacun sait, beaucoup de choses sur leur comportement. Mais c’est une autre histoire, monsieur le ministre. N’essayez pas de faire dévier le débat. Je ne sais pas à l’avantage de qui il pourrait tourner !
Sourires.
Nous déplorons l’absence d’avancées sur la coordination européenne. Je m’arrêterai un instant sur ce sujet car nous sommes profondément attachés à la construction européenne. Le rapport de la Cour des comptes, dans sa dernière partie, évoquait largement la situation en Espagne, en Belgique et en Allemagne. En Europe, certains pays ont considérablement légiféré, alors que d’autres sont en retard, et se trouvent dans la même situation que la France il y a quelques années : sans cadre juridique, ce qui donne lieu, bien entendu, à des abus du côté des institutions financières.
Souvenez-vous, mes chers collègues, du grand scandale des banques suisses et des comptes de nos compatriotes juifs qui avaient essayé, avant et pendant la Seconde guerre mondiale, de protéger une partie de leurs biens en les mettant en Suisse. Les familles ayant parfois totalement disparu, ou des enfants mineurs ne sachant absolument pas ce que détenaient leurs parents, les banques suisses ont mis ces avoirs dans leur poche et ont fait des profits exceptionnels, jusqu’à ce que cette situation soit découverte. Il a fallu que les banques suisses passent un accord avec le gouvernement israélien ; elles ont versé une somme globale et forfaitaire à un fonds destiné aux Juifs du monde entier.
On le voit, il faut absolument coordonner les droits, car des résidents français peuvent détenir des biens à l’étranger, tout à fait légalement, et réciproquement. Au nom de la liberté de circulation des capitaux, il faudrait une initiative du Gouvernement pour demander une harmonisation, notamment dans le cadre de la création de l’Union bancaire, des règles sur les comptes inactifs, les contrats d’assurance-vie quand ils existent – ce n’est pas le cas partout – et les coffres-forts.
Mes chers collègues, au-delà de cette réserve, le groupe UDI apportera bien volontiers son soutien à ce texte.
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire.
Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisie.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 1 .
Amendement de coordination.
L’amendement no 1 est adopté.
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements qui viennent d’être adoptés.
L’ensemble de la proposition de loi est adopté à l’unanimité.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures vingt-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron