Intervention de Guy Geoffroy

Séance en hémicycle du 5 juin 2014 à 10h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy :

Madame la ministre, vous vous montrez étonnée par ces amendements. Nous, nous ne le sommes pas.

Nous ne sommes pas non plus étonnés de l’incohérence de votre projet de loi, en particulier à cet article. Il y a incohérence parce que vous proposez l’ajournement pour mener « des investigations complémentaires sur la personnalité ou la situation matérielle, familiale et sociale » de la personne concernée.

Et pour nous montrer que vous avez toujours une pensée à l’égard des victimes, vous dites quelques paragraphes plus loin que la juridiction « peut octroyer immédiatement à la victime des dommages et intérêts. »

Ainsi, au moment même où l’on s’intéresse aux moyens financiers de celui qui risque d’être déclaré coupable, vous affirmez, sans pousser plus loin les investigations, qu’il va payer des dommages et intérêts.

De deux choses l’une : soit vous supprimez la notion d’investigations complémentaires visant à apprécier la vie matérielle du coupable, soit vous renoncez à dire quelque chose qui va en sens inverse quelques alinéas plus loin dans le même article.

C’est totalement incohérent. C’est de l’équilibrisme comme l’ensemble de votre texte.

Cet article n’est pas anodin. L’ajournement existe déjà et, de l’enquête de police à la saisie du procureur qui peut conduire à la mise en cause de la personne poursuivie, le parcours est déjà long. Tout cela prend du temps et, quand un délit est commis en proximité, qu’il y ait d’ailleurs une victime ou pas – quand il n’y en a pas, la victime est la société dans son ensemble – l’opinion locale est très sensible à ce qui se passe.

Actuellement, que se passe-t-il ? La personne mise en cause va au tribunal – quand elle y va – et, même si elle est condamnée à une peine privative de liberté, il est très peu fréquent que cette disposition soit suivie d’une arrestation immédiate à l’audience. La personne rentre alors dans son quartier.

Combien d’exemples avons-nous de ces voyous – il faut bien les appeler comme ça – qui rentrent chez eux tout glorieux en se vantant de sortir libres du tribunal ? Aux alentours, le groupe vers lequel ils se retournent le constate, en effet : ils sont là en chair et en os. Les citoyens qui, tout naturellement se plaignent de la situation, constatent qu’ils sont libres et en déduisent qu’il ne s’est rien passé.

Bien sûr, nous savons que la réalité est différente.

Avec cet article 4, vous allez encore aggraver les choses. La personne reconnue coupable ne sera pas condamnée, elle va rentrer et elle se gardera la plupart du temps de dire qu’elle devra retourner au tribunal plus tard.

Tout ceci ne va qu’aggraver l’incompréhension de nos concitoyens quant à la délinquance au quotidien. Elle est devenue bien banale, mais vous lui donnez encore du temps pour s’étaler et accentuer ses mauvais effets.

Cet article 4 est pernicieux ; à l’évidence, il faut le supprimer.

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