Intervention de Catherine Lemorton

Séance en hémicycle du 10 juin 2014 à 21h30
Mise en accessibilité des établissements recevant du public des transports publics des bâtiments d'habitation et de la voirie — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales :

Ce projet de loi habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances une série de mesures visant la mise en accessibilité de notre société.

Le recours aux ordonnances, cela a été dit par M. Sirugue, n’est certes jamais tout à fait satisfaisant du point de vue parlementaire mais, dans la situation où nous sommes, il n’existait pas de meilleure alternative.

Ce texte rappelle à nouveau l’engagement profond de ce Gouvernement de faire du handicap une préoccupation générale de son action.

D’ailleurs, dès le 4 septembre 2012, une circulaire du Premier ministre relative à la prise en compte du handicap dans les projets de loi demandait à ce que, dans toutes les études d’impact, figurât une fiche diagnostic présentant l’impact du texte sur la situation des personnes handicapées.

Donc, le projet de loi que nous examinons ce soir fait suite au constat d’échec de la mise en oeuvre de la loi du 11 février 2005.

Cela a été dit, cette loi avait posé des objectifs ambitieux dans le domaine de la mise en accessibilité par la prise en compte de tous les handicaps, la mise en accessibilité « automatique » des constructions nouvelles et des moyens de transport entrant en service, la fixation d’un délai de dix ans pour la mise en accessibilité de l’existant.

Cette loi avait suscité de nombreux espoirs, mais, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, nous avons trouvé une situation particulièrement préoccupante. La législation mise en place en 2005 révélait ses faiblesses : absence d’outils incitatifs ou contraignants pour accompagner les efforts de mise en accessibilité, délégation tacite du soin de vérifier la bonne exécution de la loi aux associations et juges, absence de recensement et d’outils statistiques pour connaître l’état réel de la mise en accessibilité des établissements recevant du public, trop faible investissement de l’État pour la mise en accessibilité de ses propres sites.

La même majorité qui votait la loi de 2005 aurait dû, je crois, passer davantage aux actes pour que l’État soit exemplaire dans la mise oeuvre de cette loi.

Que faire face à un tel constat ?

Un proverbe arabe dit : « Qui veut faire quelque chose trouve un moyen, qui ne veut rien faire trouve une excuse. » Nous avons refusé les excuses et cherché un moyen. Ce moyen, c’est le projet de loi dont nous allons débattre ce soir.

Ne rien faire conduirait en effet à un risque contentieux important et à des tensions dans le corps social. Au contraire, le Gouvernement a retenu l’option la plus courageuse et la plus efficace : maintenir cap tout en créant des outils pratiques et consensuels permettant à tous de l’atteindre.

Le Gouvernement a donc agi très rapidement en initiant d’abord un travail de concertation dont la coordination a été confiée à Mme la sénatrice Claire-Lise Campion.

La concertation était nécessaire, indispensable, car il fallait rassurer les associations concernées – à qui on avait beaucoup promis en 2005 – tout en tenant compte de certaines réalités pratiques s’imposant aux personnes chargées de mettre en oeuvre l’accessibilité.

Les conclusions de cette concertation portant sur les possibilités d’évolutions législatives et réglementaires ont été rendues au début de cette année.

Entre autres mesures, il s’agit notamment de permettre aux exploitants ou aux propriétaires d’établissements recevant du public et n’étant pas encore en conformité de déposer auprès des préfets un agenda d’accessibilité programmée. Ils bénéficient alors d’un délai supplémentaire, sous réserve d’engagements très précis dans le temps. Des dispositions comparables sont prévues pour les autorités organisatrices de transport.

C’est sur cette base que le Gouvernement a déposé le présent projet de loi, qui a été adopté au Sénat le 29 avril. La commission des affaires sociales l’a examiné et adopté après lui avoir apporté des enrichissements substantiels. Ces améliorations doivent beaucoup au travail et à l’investissement de notre rapporteur, M. Christophe Sirugue, dont je salue l’action menée depuis sept ans en faveur de la lutte contre l’exclusion, ainsi qu’aux éclaircissements du rapporteur pour avis, M. Jean-Louis Bricout.

Je ne doute pas que l’examen du texte en séance sera l’occasion de poursuivre ce travail de qualité. La société se doit de tenir ses engagements envers les personnes handicapées, dans toute leur diversité. J’apporte donc mon soutien, madame la secrétaire d’État, à ce projet de loi pragmatique qui ne renonce en rien aux ambitions fortes qui doivent être les nôtres pour faciliter l’existence de nos concitoyens atteints de handicap. Ce texte constitue la meilleure réponse possible à la situation où nous nous trouvons, ainsi qu’à l’inaction constatée sous la précédente législature.

En conclusion je voudrais citer cette belle phrase d’Albert Camus, qui écrivait dans La peste : « Le bien public est fait du bonheur de chacun. » C’est exactement l’ambition portée par ce texte.

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