Intervention de Marie-Anne Chapdelaine

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 15h00
Formation pratique aux premiers secours dans la préparation du permis de conduire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Anne Chapdelaine :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous sommes amenés à discuter vise un objectif louable.

Au-delà de l’apprentissage de la conduite et du code de la route, c’est en effet de sécurité qu’il est question, de prévention et, pour ainsi dire, de vie. Objet de ce texte, la formation aux notions élémentaires de premiers secours dans le cadre de la préparation à l’obtention du permis de conduire apparaît, au premier abord, comme une idée intéressante.

Néanmoins, en l’état du texte issu des travaux du Sénat, mes interrogations initiales se sont muées en une certitude : Les dispositions de cette proposition de loi sont imparfaites et en décalage avec la formation à laquelle il est proposé de la raccrocher.

Il y a, à mon avis, trois raisons à cela.

La première est technique. Il faut bien en convenir, le processus d’apprentissage est déjà très long, trop long même. Aussi, y adjoindre un module supplémentaire pose sérieusement question. En pratique, dites-vous, monsieur le rapporteur, ce sont quatre heures qui seraient mobilisées. Nous devons donc intégrer dans notre réflexion cet aspect. Je tiens à rappeler que la préparation à l’examen du permis de conduire mobilise, avec les années, un temps de plus en plus important, de très longues semaines pour le dire simplement. Lorsqu’il faut repasser l’examen une ou deux fois, il n’est pas rare que le candidat n’obtienne le permis qu’au bout de deux ans, ce qui retarde d’autant la maîtrise d’une compétence indispensable à l’entrée dans la vie professionnelle. Disposons-nous de ce temps ? Je n’en suis pas sûre.

Ma seconde interrogation est d’ordre financier. Dans un contexte économique et social que chacun, ici, connaît, il me paraît difficile d’imaginer, compte tenu des contraintes financières des auto-écoles, que ces dernières acceptent de faire don de quelques heures de formation.

Ce n’est pas qu’elles ne le souhaiteraient pas, mais elles ne peuvent pas mobiliser leurs salariés pour cela sans menacer leur équilibre économique ; ne faisons pas semblant de l’ignorer. Le coût supplémentaire serait donc répercuté sur les élèves.

Chaque heure de formation doit être payée : il en découle un surenchérissement du coût du permis de conduire, qui est déjà extrêmement élevé pour les jeunes. Il en découle également une réorganisation pédagogique et matérielle des écoles de conduite.

Monsieur le rapporteur, vous avez dit lors des travaux de la commission des lois, que dans le cas où les auto-écoles ne seraient pas chargées de cette formation, la participation à la formation et sa validation pourraient être prises en charge par d’autres associations. Je veux bien prêter foi à vos propos, mais la question demeure : ces associations sont-elles capables d’assurer, chaque année, des milliers d’heures de formation ?

Au-delà du renchérissement du permis de conduire, il faut donc veiller à bien utiliser les moyens. Si nous nous engageons à mobiliser des ressources aussi colossales, utilisons-les pour aller au-delà d’un simple apprentissage des bases des premiers secours.

Cela m’amène, mes chers collègues, à vous faire part d’une troisième interrogation, qui touche à l’essence même de la formation aux premiers secours. Celle-ci doit bénéficier d’un nouvel élan, non seulement au moment de la formation initiale, mais aussi tout au long de la vie, car il est nécessaire d’entretenir ces acquis en permanence. Pour sauver encore plus de vies, nous devons nous saisir de cette question, et identifier les lieux d’apprentissage les plus propices pour chaque génération. Il peut s’agir des collèges, des lycées, des centres de formation d’apprentis ou des centres de formation continue. Donnons donc à la formation aux premiers secours ses lettres de noblesse en l’inscrivant dans le temps et le parcours de vie de nos concitoyens.

Mes chers collègues, je vous ai fait part de mes doutes sur la version de ce texte issue du Sénat. La réunion de la commission des lois du 4 juin dernier a permis, grâce à l’adoption des amendements proposés par le Gouvernement, de lever ces doutes et d’améliorer le texte, qui pourra ainsi être efficace et utile à la sécurité de nos concitoyens.

C’est le texte adopté le 4 juin dernier par la commission des lois qui emporte mon adhésion. C’est pourquoi le groupe socialiste invite à repousser les amendements de suppression déposés par M. le rapporteur…

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