Intervention de Édouard Courtial

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 15h00
Formation pratique aux premiers secours dans la préparation du permis de conduire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉdouard Courtial :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en l’état actuel du droit, la connaissance des gestes de premiers secours n’est ni enseignée ni évaluée dans le cadre de la préparation de l’examen du permis de conduire, même professionnel. L’objet de cette proposition de loi est de pallier cette carence et, d’une manière plus concrète, de contribuer à sauver des vies.

La moitié des victimes de la route décèdent en effet dans les minutes qui suivent l’accident. La survie des blessés les plus gravement atteints est donc liée à la rapidité de leur prise en charge par les services de secours. L’Organisation mondiale de la santé remarque ainsi, en 2005, que « même les systèmes de secours les plus sophistiqués et les mieux équipés ne peuvent pas grand-chose si les témoins sont incapables d’analyser le degré de gravité de la situation, n’appellent pas à l’aide et ne pratiquent pas les soins de base avant que les services de secours n’arrivent sur place. C’est encore plus manifeste dans les zones rurales. »

Le lien entre les témoins de l’accident et les services de secours est donc essentiel. Mais l’état de panique que peut susciter la survenance d’un accident conduit certains témoins à oublier les gestes essentiels qui consistent tout simplement à alerter les secours et à protéger le lieu de l’accident. En France, le niveau de formation aux premiers secours est faible et les dispositifs généraux de formation ne permettent pas de préparer efficacement les conducteurs à cette question. Aucune exigence de connaître les gestes de secourisme n’est imposée aux candidats au permis de conduire, même à ceux du permis de conduire professionnel.

Face à ce constat, de nombreuses initiatives parlementaires ont tenté de modifier l’état actuel du droit. La loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière a ainsi créé une obligation de sensibilisation des candidats au permis de conduire à la formation aux premiers secours. Toutefois, en l’absence de décret d’application, cette obligation est restée lettre morte. Plusieurs propositions de loi ont été déposées afin d’imposer une formation pratique aux gestes de premiers secours lors du passage du permis de conduire. La dernière en date a été déposée le 23 août 2012 par notre excellent collègue Bernard Gérard, dont je salue la constance et l’engagement sur ce sujet, et qui est notre rapporteur aujourd’hui. Cette première proposition de loi a toutefois été rejetée le 11 octobre 2012.

Elle visait initialement à instaurer une troisième épreuve au permis de conduire, qui sanctionnerait une formation aux « notions élémentaires de premiers secours ». Cette formation était définie par le texte comme l’apprentissage de cinq gestes fondamentaux. Cette formulation posait deux types de difficultés pratiques.

En premier lieu, la création d’une épreuve supplémentaire spécifique est rapidement apparue comme impossible. D’une part, elle entraînerait nécessairement un surcoût, même faible, qui pèserait in fine sur les candidats au permis de conduire ; or le coût de la formation au permis de conduire est évalué en France à près de 1 500 euros, un montant qui se situe certes dans la moyenne européenne, mais qui reste très élevé. D’autre part, au regard des 900 000 candidats annuels, la création de cette épreuve saturerait les associations et les structures capables de délivrer cette formation. Elle conduirait nécessairement à un allongement très important du délai d’attente avant le passage du permis de conduire. Cela n’est pas envisageable, car on observe déjà une tendance à l’allongement de ce délai : de 86 jours d’attente en moyenne en 2012, il s’établit à environ 90 jours à 95 jours pour l’année 2013.

En second lieu, le fait de préciser dans la loi le contenu de la formation aux premiers secours était loin d’être évident. Les « cinq gestes qui sauvent » ont pu faire consensus au moment du lancement de ce programme dans les années 1970, mais aujourd’hui, il est préférable de laisser au pouvoir réglementaire le soin de définir cette formation et de la faire évoluer en fonction des connaissances et des techniques nouvelles. Le Sénat a par conséquent adopté un amendement visant à reformuler l’article unique de la proposition de loi pour imposer non plus une épreuve spécifique, mais une formation obligatoire aux notions élémentaires de premiers secours en cas d’accident de la circulation. La connaissance des notions élémentaires des premiers secours sera bien évaluée, mais dans le cadre des épreuves existantes.

Cette rédaction simplifiée n’offre plus prise aux critiques relatives à l’ancienne version de la proposition de loi. Elle a été adoptée sans modification et à l’unanimité par le Sénat.

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