Intervention de Gilda Hobert

Séance en hémicycle du 10 juillet 2014 à 9h30
Taxis et voitures de transport avec chauffeur — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilda Hobert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission du développement durable, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre ensemble de la proposition de loi de notre collègue Thomas Thévenoud relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur. Je voudrais tout d’abord, au nom de mes collègues du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, féliciter notre rapporteur pour le travail parlementaire de fond réalisé depuis plusieurs mois : cent soixante-dix heures d’écoute et de concertation, cinquante auditions, huit groupes de travail, plus de trois cents contributions citoyennes décortiquées ; ensuite, un rapport très complet remis le 24 avril 2014 avec trente propositions, dont certaines sont audacieuses, parfois même aventureuses, mais dont une majorité est très attendue par le secteur ; enfin, une proposition de loi qui reprend celles qui sont d’ordre législatif.

Quelles que puissent être les positions et les observations de chacune et de chacun d’entre nous sur la proposition de loi dont nous allons débattre, je crois que nous pouvons être unanimes sur la quantité mais surtout sur la qualité du travail effectué par notre rapporteur sur ce sujet délicat, compte tenu des crispations des acteurs du secteur. Ce travail est bel et bien le parfait exemple des réelles possibilités données aux parlementaires pour défendre et proposer des idées de mesures législatives fortes, lesquelles possibilités se sont probablement améliorées par la maîtrise de l’ordre du jour à l’occasion de ces journées d’initiative parlementaire, comme c’est le cas aujourd’hui, journées inscrites dans la Constitution depuis la dernière révision de juillet 2008. Le débat que nous avons maintenant témoigne qu’une activité parlementaire de fond peut aboutir à une proposition de loi solide et structurée sur un sujet complexe à déminer, un sujet qui concerne un nombre important de nos concitoyens.

Le transport léger de personnes existe depuis longtemps et très vite, dans tous les pays du monde, il est apparu comme une évidence qu’une réglementation stricte devait encadrer cette activité commerciale, notamment avec une autorisation de stationnement sur la voie publique, appelée habituellement « licence ». Puis les tarifs et les horaires de travail ont dû rapidement faire l’objet d’une réglementation, pour des raisons d’ordre public et de saine concurrence. Mais dès les années 1960, la technique a fait évoluer le métier de taxi, avec les possibilités de réservation à l’avance en complément de la maraude.

Aujourd’hui, c’est de nouveau une rupture technologique qui nous oblige à repenser le modèle traditionnel : le développement formidable des technologies de la communication, que certains penseurs un peu lyriques appellent déjà la « numérisation du monde ». La démocratisation des outils numériques vient en effet percuter directement le droit existant. Nous devons aujourd’hui adapter notre législation encadrant les droits du transport léger de personnes à ce saut technologique.

Tel est d’ailleurs le sens de l’initiative du président de l’Assemblée nationale, qui a récemment décidé d’installer une commission parlementaire sur les droits et libertés à l’âge du numérique afin de dégager un corps de doctrine juridique pouvant servir lors de chaque débat législatif. Notre démocratie représentative court le risque de s’essouffler si nous ne parvenons pas à l’adapter à cette révolution. Notre débat est en effet très suivi sur les réseaux sociaux et sur le portail vidéo du site internet de l’Assemblée. Le cadre de la démocratie participative représentative, tel qu’il a été conçu par les philosophes des Lumières, est désormais bousculé par le numérique – saluons toutefois les philosophes des Lumières. Il convient maintenant de trouver les meilleures solutions pour adapter notre activité de représentants du peuple et notre droit à la révolution numérique, comme nous le faisons aujourd’hui pour le transport léger de personnes.

Dès 2009, la majorité précédente avait tenté de créer un nouveau régime. Ce dernier s’est avéré contenir des dispositions plus larges que celles annoncées initialement. De 2010 à 2013, en seulement trois ans, le nombre de véhicules de transport avec chauffeur a quasiment été multiplié par cinq ; or cette croissance fulgurante, accompagnée de l’utilisation des applications dédiées sur smartphone, n’a pas pu être suivie et maîtrisée. Sous prétexte de simplification, nous sommes arrivés à une situation créant des dysfonctionnements et une concurrence inéquitable entre les taxis traditionnels et les VTC, menaçant le secteur d’une déstructuration profonde. Conscient de ces difficultés, le Gouvernement a tenté en 2013 de rétablir un équilibre et de réparer les injustices créées par une concurrence déloyale. Il l’a fait par différentes mesures, dont un décret du 27 décembre 2013. Mais ce décret a été suspendu en référé par le Conseil d’État le 5 février 2014. Nous n’avions dès lors plus d’autre choix que de légiférer sur cette problématique, pour mettre fin aux abus dénoncés dans cette proposition de loi et réguler les activités de VTC.

La proposition de loi que nous allons examiner ne se contente pas de traiter de la problématique des VTC. Elle a pour objectif une modernisation durable de l’ensemble des sujets concernant le transport léger de personnes. Elle vise à moderniser la profession de taxi en l’adaptant aux nouveaux outils numériques et aux nouveaux besoins des clients, mais aussi en améliorant les conditions sociales de certains salariés de grandes compagnies.

Nous savons que les taxis, utilisés par un grand nombre de touristes, ont aussi leur rôle à jouer sur l’image de la France dans le monde.

La proposition de loi a également pour objectif de mettre en place une réglementation plus claire, plus lisible et plus juste pour l’activité de VTC. Il s’agit à la fois de protéger le consommateur, de responsabiliser les intermédiaires, d’améliorer les contrôles, et de simplifier les démarches et le processus d’immatriculation.

Concernant la prise en compte de l’open data, les députés du groupe RRDP sont très favorables à l’organisation d’un registre de disponibilité des taxis : en termes de visibilité et d’adaptation à la demande des clients, cela nous paraît une excellente disposition. Nous sommes tous conscients que, dans des grandes agglomérations comme Paris, il faut moderniser l’offre car le service de taxi dans certaines périodes de pointe, le vendredi soir ou le samedi soir par exemple, n’est pas à la hauteur des attentes. Nous sommes également favorables à l’interdiction de la tarification kilométrique pour les VTC, parce qu’elle est potentiellement un nid de fraude et qu’elle est trop imprévisible pour les clients.

En termes d’occupation de l’espace public et des conditions de contrôle du respect de la réglementation pour les VTC, le texte a été légèrement amélioré en commission du développement durable mais il reste probablement des points à clarifier. Peut-être eût-il fallu essayer de mettre en place un encadrement législatif commun avec des possibilités de dérogations et d’adaptations en fonction de l’activité ?

Au sujet de l’incessibilité des futures licences gratuites, je crois que nous devons être fermes. Nous constatons l’apparition de la spéculation de la part de sociétés commerciales qui espèrent profiter d’un cafouillage juridique. Dans le même temps, beaucoup de chauffeurs de taxi sans licence sont inscrits sur les listes d’attente depuis de nombreuses années, dans l’attente de la délivrance de leur licence, de leur autorisation de stationnement. Dans le même esprit, la double inscription taxi et VTC doit être proscrite : c’est pourquoi nous soutenons sans réserve cette mesure. La multiplication des annuaires en ligne avec une seule rubrique « taxi » comprenant toutes les activités de transport léger de personnes crée une ambiguïté préjudiciable pour le consommateur mais également pour le développement d’une concurrence équitable.

Pour conclure, vous l’avez compris, si nous avons encore des interrogations ponctuelles et si nous espérons que l’examen parlementaire permettra de les clarifier, les députés du groupe RRDP se réjouissent dans l’ensemble des bonnes dispositions contenues dans cette proposition de loi. Elles permettront de donner un cadre rénové à la législation en vigueur et de pacifier des tensions violentes préjudiciables à l’économie du secteur et à l’ensemble des acteurs. Dans ces conditions, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, sachez d’ores et déjà que vous pourrez compter sur notre soutien enthousiaste.

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