Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, il y a des lois qui encadrent et d’autres qui complètent. Il y a aussi des lois qui réparent. Les propositions de lois – le texte déposé par Thierry Braillard lorsqu’il était encore député, avant sa nomination au Gouvernement, a en effet été repris par Jean-Louis Touraine et Gilda Hobert – relatives à la sécurisation des transactions relatives à la zone d’aménagement concerté du quartier de Gerland à Lyon, que votre assemblée examine aujourd’hui et dont je tiens à saluer la qualité, font partie de cette dernière catégorie.
Tout projet d’aménagement repose en amont sur des procédures ayant trait à l’ingénierie foncière : maîtrise, acquisition, cession de terrains. Or dans le cas précis de la ZAC de Gerland, une étape majeure préalable aux autres démarches administratives et techniques n’a pas été formalisée en son temps. Les terrains du domaine public de la ville de Lyon n’ont pas été formellement déclassés avant division et cession au profit d’opérations d’aménagement et de construction.
Cette omission fragilise juridiquement tous les contrats et conventions passés relatifs à ces terrains. Au regard des enjeux d’aménagement et de l’impossibilité pour la collectivité de procéder au déclassement formel dès à présent, sans fragiliser juridiquement les contrats passés, seule la solution d’une validation législative de ces contrats peut être retenue.
Tel est donc l’objet des deux propositions de lois qui vous sont soumises et pour lesquelles je tiens à souligner le caractère d’urgence. Tout recours déposé à l’heure actuelle remettrait en cause l’ensemble des actes juridiques ayant trait aux transactions foncières depuis les années quatre-vingt.
Si cette irrégularité a jusqu’alors été sans conséquence, ces deux textes visent à valider, rétroactivement, l’ensemble des contrats relatifs à ces terrains, autorisés et passés par la ville de Lyon. Ils témoignent de la forte mobilisation locale autour d’un projet majeur de l’agglomération lyonnaise, porté depuis plus de trente ans par les acteurs locaux.
La démarche a en effet débuté officiellement le 21 juin 1982, lorsque le conseil municipal de la ville de Lyon a approuvé, par délibération, le projet de création-réalisation d’une zone d’aménagement concerté sur les terrains du quartier central de Gerland. Le programme était ambitieux et exemplaire puisqu’il reposait sur la mobilisation de vingt-huit hectares de foncier entièrement propriété des collectivités publiques de la ville de Lyon et de la communauté urbaine.
Cette ZAC d’envergure prévoyait, dans une première tranche, d’augmenter sensiblement le programme de construction du campus de l’École normale supérieure, afin de permettre la réalisation de 590 logements, dont 350 logements sociaux aidés et 31 000 mètres carrés de bureaux, commerces, équipements publics, notamment scolaires, et de locaux à caractère scientifique et technique, dédiés à la recherche.
Ce projet, mixte et bâti autour d’un établissement majeur, a créé un réel effet d’entraînement dans la mutation du secteur de Gerland, amorçant son intégration dans le tissu urbain environnant. Cette réussite a stimulé l’émergence de nouveaux projets dans le cadre de la ZAC, permettant de conforter l’émergence d’un pôle national de recherche clans le domaine de la santé et des biotechnologies, le pôle de compétitivité dit « Lyonbiopôle » et le projet de développement de l’université de Lyon.
Aujourd’hui, la deuxième phase de la ZAC prévoit le développement du pôle de recherche de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale à travers l’installation d’établissement majeurs, que je n’énumérerai pas puisque, monsieur le rapporteur, vous les avez cités. La réussite de ce projet va de pair avec un fort investissement des collectivités ambitieuses pour leur territoire.
Nous examinons aujourd’hui deux propositions qui constituent l’unique vecteur permettant de pérenniser le travail accompli et de sécuriser celui à venir. Leur article unique a pour objet de régler le problème de la domanialité de la ZAC de Gerland, en validant rétroactivement tous les contrats portant sur les biens construits sur les terrains désaffectés, mais non déclassés, du domaine public de la ville de Lyon. Cela n’est envisageable que dès lors que certaines conditions, posées par la jurisprudence en matière de validation législative, sont respectées, ce qui est, bien sûr, le cas de ces propositions de loi.
La validation poursuit un but d’intérêt général suffisant puisque la bonne réalisation du pôle de biotechnologie de Gerland participe de l’attractivité économique de Lyon, ce qui constitue un motif d’intérêt général recevable au regard de la jurisprudence connue en la matière.
En outre, la validation respecte les décisions de justice ayant force de chose jugée, comme le texte des propositions de lois le rappelle.
Par ailleurs, l’acte validé ne méconnaît aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle puisque les différents contrats n’ont pas fait l’objet d’un quelconque recours par le passé. La validation législative proposée intervient donc à titre préventif. Par conséquent, elle respecte la séparation des pouvoirs, seul principe à valeur constitutionnelle qui aurait pu sembler être méconnu.
Enfin, la portée de la validation doit être strictement définie. C’est le cas en l’espèce puisqu’elle est circonscrite au territoire couvert par la ZAC de Gerland.
Les deux propositions de loi respectent l’ensemble des critères relatifs à une validation législative. Je partage donc, en ce sens, les conclusions du rapporteur. Les habitants, les entreprises déjà sur site ou qui envisagent de s’y installer méritent d’être sécurisés. Ces propositions de lois visent concrètement à poursuivre l’élan d’une opération d’aménagement majeure pour la région lyonnaise, en confortant juridiquement son développement, afin de favoriser sa pleine réussite.
Une validation législative constitue la seule alternative à la régularisation du vice de forme relatif au non-déclassement des terrains du domaine public de la ville de Lyon. De plus, elle permet de faire entrer complètement dans le droit commun une opération qui n’a rencontré jusqu’à maintenant aucun recours contentieux, malgré la complexité du projet d’aménagement et sa longévité, preuve de la qualité de l’investissement des porteurs et des différents acteurs impliqués localement.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement souhaite que ces deux propositions de lois identiques soient adoptées, position qui, compte tenu de la nature du sujet, sera, je l’espère, partagée sur l’ensemble des bancs de votre assemblée.