J’en conviens, monsieur Dolez : effectivement, il est assez inhabituel que le Gouvernement dépose des amendements lors de la discussion d’un texte sur le rapport d’une commission mixte paritaire.
Vous savez bien qu’il ne s’agit pas d’un acte d’hostilité. Le Gouvernement et moi-même, à titre personnel, éprouvons une incontestable estime pour les députés que vous êtes et un immense respect pour le travail que vous avez effectué.
Les analyses juridiques que nous avons menées nous conduisent à considérer qu’un certain nombre de dispositions rétablies en commission mixte paritaire présentent des risques d’inconstitutionnalité. J’ai estimé qu’il était de mon devoir de vous alerter sur ces risques. Je reconnais la souveraineté du Parlement et le Gouvernement s’inclinera évidemment devant les votes auxquels vous allez procéder – il le ferait même s’il n’y était pas contraint. Bien entendu, nous ne sommes pas infaillibles, mais il est important que vous sachiez qu’un certain nombre de dispositions contiennent, à nos yeux, des éléments d’inconstitutionnalité qui peuvent tenir à leur rédaction, à l’absence de parallélisme avec des dispositions équivalentes ou au fond.
Pour l’essentiel, les amendements déposés par le Gouvernement visent donc à supprimer les dispositions présentant ces risques. D’autres amendements ont été élaborés en concertation avec le rapporteur ; vous les adopterez très probablement, ce qui devrait nous donner l’occasion d’une belle réconciliation.
L’amendement no 1 n’est pas lié à un risque d’inconstitutionnalité. Comme je l’ai déjà dit tout à l’heure à la tribune, il vise à reprendre une initiative de Jean-Frédéric Poisson, en première lecture, afin de prendre en compte les efforts réalisés par un détenu pour l’apprentissage de la lecture ou du calcul et son implication dans des activités culturelles. Nous avions repoussé cette proposition en première lecture tout en considérant qu’elle était intéressante : nous nous étions donc engagés à y travailler pendant la navette.
Ainsi, le Sénat avait adopté une disposition visant à accorder une réduction de peine aux condamnés qui manifesteraient des efforts sérieux de réadaptation sociale « en s’investissant dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul, en participant à des activités culturelles et notamment de lecture ». La commission mixte paritaire a supprimé les mots : « en participant à des activités culturelles et notamment de lecture ».
Pourtant, vous le savez, la sociologie de la population carcérale est telle que l’illettrisme est une question majeure. En prison, le taux d’illettrisme est proche de 30 %, ce qui est nettement plus important que la moyenne nationale. La mesure visant à inciter les détenus à s’investir dans « l’apprentissage de la lecture » est donc importante et concernera un public précis, mais l’incitation à participer à « des activités culturelles, et notamment de lecture » pourra concerner un public encore plus large. C’est pourquoi je souhaite revenir sur cette disposition en vous proposant de réintégrer, à l’article 7 ter A, les mots : « ou en participant à des activités culturelles, et notamment de lecture ».