Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du 22 juillet 2014 à 15h00
Simplification de la vie des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, après le vote de la loi du 2 janvier 2014, nous voici invités pour la seconde fois de la législature à débattre d’un projet de loi consacré à la simplification de la vie des entreprises. Il s’agit de mettre en oeuvre le deuxième acte du désormais très célèbre choc de simplification initié par le Président de la République à l’automne 2012. D’après les objectifs affichés, le texte vise à accélérer le développement des entreprises en les dégageant de certaines contraintes administratives pesantes. L’OCDE a évalué à 60 milliards d’euros le coût de la complexité administrative pour les entreprises, ce qui, d’après le Forum économique mondial, place la France au 130e rang sur 148 pays en matière de poids des normes.

L’écrasante majorité des entrepreneurs perçoit négativement l’impact de la réglementation nationale en vigueur sur leur activité. Entrepreneur moi-même, en contact permanent avec beaucoup d’entre eux, je le sais bien. Incontestablement, il est donc de notre devoir d’alléger le fardeau. Montesquieu disait que « les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires ». Il aurait dû aller plus loin : elles affaiblissent le pays tout entier. Non seulement les normes inutiles anesthésient les lois nécessaires, mais elles forment un carcan qui enserre notre appareil productif et condamne notre pays à la morosité économique. Les dirigeants de TPE et PME consacrent en moyenne un tiers de leur temps de travail à la gestion des tâches administratives au lieu de développer l’activité de leur entreprise, ce qui fait de la simplification des normes un objectif ultra-prioritaire.

Par conséquent, nous pouvons difficilement nous opposer aux objectifs louables et nécessaires que visent les auteurs du projet de loi. Je rappelle d’ailleurs que l’entreprise de simplification n’est pas née au cours de l’actuelle législature. Elle s’inscrit dans une démarche amorcée sous les XIIe et XIIIe législatures et à laquelle les parlementaires ont pris toute leur part, à l’initiative du président Warsmann en particulier. Par ailleurs, la simplification normative n’est pas une spécialité française. Je rappelle que nos voisins sont autrement plus ambitieux et engagés dans le processus que nous le sommes. Les Britanniques préfèrent au principe français d’une norme ancienne abrogée pour une norme nouvelle adoptée celui d’« une qui entre, deux qui sortent ». Autrement dit, pour une nouvelle norme adoptée, deux normes disparaissent immédiatement et obligatoirement.

En appliquant scrupuleusement ce principe en 2011 et 2012, le gouvernement britannique a fait bénéficier ses entreprises d’un gain économique net évalué à 963 millions de livres, soit un peu plus de 1 milliard d’euros, réinvesti bien entendu dans le processus productif, ce qui permet au Royaume Uni, un an plus tard, d’afficher une croissance économique bien supérieure à la nôtre. Notre pays a bien besoin d’un retour de la croissance économique et toute mesure volontariste poursuivant cet objectif doit donc être soutenue.

Les mesures présentées dans le projet de loi vont objectivement dans le bon sens. Le développement de la dématérialisation des échanges avec l’administration est indispensable. L’usage des nouvelles technologies de l’information se généralise, toute mesure renforçant l’e- administration est donc nécessaire et bienvenue pour maintenir efficacement le lien avec les entreprises.

Le développement du rescrit constitue quant à lui une sécurité juridique dont les entreprises ont grand besoin pour se prévaloir de leur bonne foi en cas de litige avec l’administration. De même, le remplacement de certains régimes d’autorisation préalable par de simples procédures déclaratives constitue une application concrète du principe selon lequel le silence vaut accord, qui doit prévaloir dans les relations avec l’administration. Nous ne pouvons que nous féliciter de mesures visant à restaurer la confiance et à faciliter et simplifier les échanges entre l’administration et les entreprises.

Toutefois, le projet de loi aurait pu et dû comporter davantage de simplifications essentielles. Il s’agit d’un regret que nous avons déjà formulé à propos des textes de simplification examinés précédemment, en matière de simplification du code du travail tout particulièrement. Comme l’ont déploré certains de mes collègues en commission spéciale, une seule disposition du texte a vocation à diminuer la charge administrative engendrée par le code du travail : l’harmonisation des notions de jour prévue à l’article 2.

Plus généralement, comme l’ont fait observer les membres du groupe UDI lors de la discussion du premier projet de loi de simplification, le choc de simplification doit être assorti d’un choc de compétitivité pour être pleinement efficace. C’est impératif ! La simplification de la vie des entreprises ne portera pas ses fruits si elle n’est pas associée à un allégement significatif de la fiscalité des entreprises. Pour redonner confiance aux entrepreneurs, il ne faut pas seulement réduire le poids des normes ; il faut mettre un terme au matraquage fiscal ! Depuis maintenant deux ans, les entreprises françaises subissent un véritable choc fiscal, mais attendent toujours le choc de simplification !

En 2013, les hausses de prélèvements obligatoires ont coûté 14 milliards d’euros aux entreprises alors même que le taux d’impôt sur les sociétés est en France l’un des plus élevés d’Europe. Contrairement à ses voisins, notre pays continue à augmenter le taux de l’impôt sur les sociétés au lieu de le réduire ! C’est invraisemblable ! La hausse sans précédent de la fiscalité, conjuguée à la suppression de la TVA compétitivité et des avantages liés aux heures supplémentaires, est une erreur du pouvoir exécutif et de la majorité qui le soutient. Cette erreur est lourde de conséquences, en particulier sur le taux de marge des entreprises qui est, en 2013, à son niveau le plus bas depuis 1986.

Lorsque le Président de la République a annoncé, le 31 décembre 2013 le lancement du pacte de responsabilité, le groupe UDI espérait que le Gouvernement prendrait des mesures courageuses afin de redresser le pays en redonnant de la compétitivité aux entreprises et de l’oxygène, c’est-à-dire du pouvoir d’achat, aux Français. Jean-Louis Borloo, qui se porte mieux et pour lequel j’ai une pensée affectueuse, avait d’ailleurs immédiatement annoncé que nous pourrions soutenir le pacte à condition qu’il tourne définitivement la page des deux premières années du quinquennat. Plus de six mois après les annonces, nous regrettons que les mesures gouvernementales prévues par le collectif budgétaire et le collectif social ne soient pas à la hauteur des enjeux.

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