Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, auterme de plusieurs mois – une année, en vérité – de débats devant le Parlement, nous franchissons aujourd’hui l’ultime étape de l’examen de ce projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes. À cet égard, la discussion des conclusions de cette commission mixte paritaire constitue pour chacune et chacun d’entre nous un moment important : c’est l’occasion à la fois de tirer le bilan des échanges et de réaffirmer nos convictions en matière d’égalité.
Ces convictions, du reste, se résument assez bien dans l’expression d’ « égalité réelle ». L’enjeu de ce projet de loi, ce n’est pas simplement de réaffirmer l’égalité théorique entre les hommes et les femmes, qu’il s’agisse de l’égalité politique ou encore de l’égalité juridique au sein de la sphère familiale : celle-ci est désormais acquise, quand bien même la France n’a pas toujours été, loin s’en faut, exemplaire sur ces questions, en tardant notamment, chacun le sait, à reconnaître aux femmes le droit de vote.
Ce qui est en jeu dans ce projet de loi, c’est bien l’enracinement de cette promesse républicaine d’égalité dans la réalité du quotidien. En d’autres termes, il ne nous appartient pas seulement de dire, mais surtout de faire.
Il s’agit donc de faire, c’est-à-dire de construire l’égalité réelle, pour changer notre société, pour la faire avancer sur le chemin de l’égalité. Et nous n’avons pas eu, dans cet hémicycle, de débat à l’espagnole, ce qui est une chance.
Mais force est de constater que l’égalité entre les sexes ne constitue toujours pas, dans cet hémicycle, un point de consensus du débat politique, ni une ligne de force de l’action publique.
Avec ce projet de loi, nous avons cherché à répondre aux situations d’urgence qui demeurent dans notre société, en matière de droits des femmes. La première d’entre elles, c’est la question des violences faites aux femmes au sein même de la sphère familiale.
Une nouvelle fois, je veux saluer, madame la ministre, le dispositif de l’ordonnance de protection tel qu’il est mis en place par ce projet de loi, en permettant à l’autorité judiciaire d’agir à la fois plus rapidement et plus efficacement en cas de signalement de ce type de violences.
L’ordonnance de protection doit devenir demain un outil au service de toutes les femmes qui, c’est encore bien trop souvent le cas, n’osent pas saisir la justice des violences dont elles sont victimes.
C’est un progrès incontestable et, comme je l’ai dit, en première et en seconde lecture, je veux rappeler aussi l’absolue nécessité d’agir sur le terrain en actionnant tous les leviers de la prévention et de la détection, qu’ils soient publics ou associatifs, pour lutter encore et encore contre les violences faites aux femmes.
La seconde urgence à laquelle ce projet de loi se devait de répondre tient quant à elle aux situations de grande détresse matérielle dans lesquelles certaines mères se trouvent plongées à la suite d’une séparation. Si je veux saluer les avancées de ce projet de loi, nous aurions pu aller encore plus loin car nous savons bien que, pour nombre de femmes séparées élevant seules leurs enfants, il suffit parfois d’une seule pension alimentaire impayée pour basculer dans la grande précarité, la grande pauvreté. Une pension alimentaire impayée, c’est un échec de la justice à faire respecter et appliquer ses décisions – et c’est une question qui intéresse dès lors la société tout entière.
J’en viens à présent au troisième objet déterminant de ce projet de loi, l’égalité salariale entre les hommes et les femmes.
L’inégalité salariale n’est pas un sujet que nous avons découvert au cours de l’année écoulée et il faut rappeler que c’est avec la loi du 22 décembre 1972, soit voici déjà plus de quarante ans, que la France a commencé son long chemin vers l’égalité des rémunérations.
Au fil des années, les initiatives en la matière ont été nombreuses. Certaines ont permis des avancées nettes et concrètes, d’autres sont, pour leur part, restées en deçà des enjeux.
À l’heure actuelle, soit après quarante ans d’actions dans le domaine législatif pour l’égalité salariale, une femme gagne toujours en moyenne 25 % de moins qu’un homme à compétence égale. C’est inacceptable !
Dans cette perspective, ce projet de loi a le mérite d’ouvrir une nouvelle voie en mobilisant le levier de la commande publique pour inciter les entreprises à s’engager vis-à-vis de leurs salariés en faveur d’une égalité pleine et entière en matière de rémunérations entre les hommes et les femmes.
C’est une avancée que je salue, comme je l’ai fait à chacune des étapes de la procédure législative, mais je veux rappeler aussi ma crainte qu’à elle seule, cette disposition ne remplisse pas tous les objectifs que nous lui assignons.
Ce projet de loi marque une étape, une étape importante, certes, mais une étape seulement, car je crains hélas que nous ne devions nous saisir à nouveau de ce problème dans quelques années pour y mettre véritablement un terme.
Alors, vous l’aurez compris, le groupe UDI soutient ce projet de loi tel qu’il résulte des travaux de la commission mixte paritaire et des débats qui ont précédé.
Sur bien des points, il marque un départ plus qu’une arrivée mais nous savons aussi que l’égalité réelle est ce qu’il y a de plus lent à construire dans une société.
Au terme de ce débat, je souhaite, enfin, réaffirmer simplement une conviction : combattre les inégalités de toute nature qui aujourd’hui encore font qu’une femme n’a dans notre société ni les mêmes droits ni les mêmes chances qu’un homme, ce n’est pas comme on l’entend parfois porter un ensemble de revendications catégorielles et c’est encore moins se mettre aux ordres d’un lobby.
Vouloir l’égalité, c’est porter un projet pour la société tout entière, c’est vouloir plus de prime au mérite, plus de justice pour chacune.
Vouloir l’égalité, c’est aussi changer les mentalités et les comportements comme vous l’avez encore répété ce soir, madame la ministre.
C’est faire en sorte que les femmes soient pleinement actrices de leur propre vie, sans aucune peur, sans avoir encore et encore à lutter contre toutes formes de discriminations, toutes formes de violences.
Défendre le droit des femmes, c’est garantir le paiement des pensions alimentaires pour éviter à certaines d’entre elles de sombrer dans la précarité.
Défendre le droit des femmes, c’est garantir le principe d’égalité salariale pour faire reculer l’arbitraire dans le monde du travail.
Défendre le droit des femmes, c’est lutter contre les violences que beaucoup d’entre elles subissent.
Défendre le droit des femmes, c’est aussi l’occasion et, croyez-moi, elle est belle, de rappeler la volonté du Général de Gaulle, le courage de Simone Veil, l’obstination de Lucien Neuwirth, la vision de Valéry Giscard d’Estaing, la détermination d’Yvette Roudy, celle de Catherine Génisson et de Lionel Jospin, sans oublier nos collègues Marie-Jo Zimmermann et Françoise Guégot et, dorénavant, Najat Vallaud-Belkacem.
Défendre le droit des femmes, madame la ministre, c’est au fond si simple : c’est tout simplement vouloir une société plus juste, une société meilleure.