Je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, pour ces interventions liminaires sur l’article premier de notre projet de loi qui, avant d’entamer l’examen des amendements, appellent quelques précisions, de sorte que nous soyons tous certains de nous accorder sur le cadre juridique de notre débat.
Tout d’abord, madame Attard, vous avez insisté sur un point qui mérite d’être largement clarifié : la dimension liberticide de l’interdiction administrative de sortie du territoire prévue à l’article premier. Vous avez formulé un certain nombre d’arguments dont je me permets très humblement de vous dire qu’en droit, ils sont faux. Au moment où nous abordons ces questions très sensibles, il est important de choisir avec précision les termes que nous employons.
Vous avez d’abord expliqué que notre action est de nature à remettre en cause la séparation des pouvoirs et qu’elle échappe au contrôle du juge. C’est faux. Bien au contraire, notre action respecte scrupuleusement la séparation des pouvoirs, car le droit administratif et les mesures de police administrative permettent précisément de prévenir des faits avant qu’ils ne se produisent. C’est l’objet même de la police administrative que de prendre des mesures préventives afin que certains actes ne puissent pas se produire. Par conséquent, au regard de nos principes constitutionnels et des principes généraux du droit, il est parfaitement logique que ce soit au moyen de mesures de police administrative que l’État se mobilise pour empêcher les départs.
Ensuite, vous prétendez que tout cela se fait sans contrôle du juge : là encore, c’est faux. Comme l’indique le projet de loi, la personne qui fera l’objet d’une interdiction administrative de sortie du territoire pourra saisir en référé – c’est-à-dire dans les minutes qui suivent sa notification de ladite interdiction – le juge administratif, lequel statuera à son tour dans les plus brefs délais. En outre, j’ai lu – même si vous ne l’avez pas dit – que lorsque le juge devra statuer sur les conditions dans lesquelles l’interdiction administrative de sortie du territoire aura été appliquée, il ne pourra pas disposer des éléments sur lesquels l’administration s’est appuyée pour interdire la sortie du territoire. C’est également faux : en réalité, l’administration transmettra au juge l’ensemble des éléments dont elle dispose et qui ont présidé à cette interdiction, c’est-à-dire les éléments des services qui peuvent parfaitement être transmis sous forme de note blanche sans être déclassifiés. L’État aura d’ailleurs intérêt à transmettre l’ensemble des éléments dont il dispose car, dans le cas contraire, il affaiblirait son dossier et s’exposerait à ce que le juge casse sa décision d’interdiction administrative de sortie du territoire.
Enfin, madame la députée, vous prétendez que le juge judiciaire, qui est le juge des libertés, ne pourra pas se prononcer. Encore une fois, c’est faux, et ce à deux titres.