Intervention de Marie-Christine Dalloz

Séance en hémicycle du 18 septembre 2014 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière économique et financière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Dalloz :

Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui est une succession d’habilitations à transposer par voie d’ordonnance de nombreuses dispositions relevant de directives européennes adoptées ces derniers mois et qui doivent s’appliquer d’ici à 2016.

Ces dispositions ont pour point commun de concerner, plus ou moins, le système financier européen et le fonctionnement du marché intérieur. Certaines en effet concernent les entreprises, d’autres les consommateurs. On trouve également des dispositions relevant à la fois du secteur bancaire et du secteur financier.

Il s’agit d’un texte fourre-tout, particulièrement dense, qui ne nous permettra probablement pas de débattre suffisamment de sujets dont certains mériteraient pourtant un texte spécifique.

Bien que ce type de projet de loi soit tout à fait habituel s’agissant de transposition de directives, on peut légitimement s’interroger sur la densité de ce texte et sur le nombre de sujets traités. Comme le rappelait le rapporteur lors de l’examen du texte en commission des finances, nous sommes face à des dispositions relevant du droit bancaire, du droit boursier, du droit des assurances, du droit de la consommation, du droit comptable et de la problématique de l’open data.

Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi d’émettre une critique, non sur le fond de chacune des mesures, mais sur la forme de ce qui nous est présenté.

Le Parlement se retrouve dépossédé d’une partie du débat sur des sujets pourtant majeurs, sans que l’action du Gouvernement soit strictement encadrée. Je pense que ce constat est partagé par une grande partie de mes collègues. Le Parlement doit encadrer le pouvoir qu’il délègue.

En commission des finances, le rapporteur nous a assuré que nous pourrions participer à un groupe de travail chargé d’élaborer certaines ordonnances. Vous avez vous-même évoqué, monsieur le secrétaire d’État, la création d’un comité pour la mise en place d’une autorité de régulation de la médiation. Vous nous avez en outre rappelé que nous pourrons toujours intervenir lors de la ratification. Je crains que tout cela ne soit pas suffisant. Le Parlement doit exercer sa mission de contrôle.

Monsieur le rapporteur, le fait que des débats ont déjà eu lieu au niveau européen ne justifie pas que le Parlement se trouve privé de son pouvoir d’amender : on ne voit pas pourquoi les débats au sein des instances communautaires rendraient inutiles les débats nationaux.

Qu’il s’agisse de la directive du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, qui s’inspire des enseignements de la crise financière et vise à doter les Etats membres d’outils nouveaux permettant de faire face à la faillite désordonnée des établissements de crédits, de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts ou encore de la directive Solvabilité II sur les assurances, ce sont autant de sujets qui ne peuvent en aucun cas être balayés d’un revers de la main.

Le fait que ces dispositions soient transposées en même temps que la directive du 22 octobre 2013 dite « Transparence », qui concerne les entreprises, ou la directive du 26 juin 2013 dite « Comptable », ou encore la directive relative au crédit immobilier, qui concerne plutôt les consommateurs, nous empêche de débattre de manière exhaustive de ces sujets.

Il ne s’agit pas en effet d’examiner l’opportunité d’une transposition globale de directives européennes ayant trait aux mêmes sujets : il s’agit d’une multitude de débats sur une multitude de sujets qui méritent pour la plupart d’être approfondis et examinés complètement et sereinement.

S’agissant du financement du Fonds de résolution unique, la situation est délicate, le maintien de la taxe de risque systémique revenant à appliquer aux banques françaises une double peine. D’ailleurs, le montant de la part française et la durée de contribution au Fonds de résolution sont toujours en cours de discussion au sein de la BCE. Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, que, s’il était légitime que les banques françaises contribuent à ce dispositif, le niveau de leur contribution ne pouvait pas être celui qui avait été annoncé.

Comme le soulignait Charles de Courson en commission, il conviendrait d’encadrer une si large délégation de notre compétence au Gouvernement sur un sujet hautement important, voire stratégique.

J’en veux pour exemple la problématique l’open data.

Il ne s’agit en aucun cas d’un sujet mineur. Avec l’article 21, le Gouvernement nous demande l’autorisation de transposer par voie d’ordonnance la directive européenne du 26 juin 2013 relative à la réutilisation des données du secteur public. Cette habilitation n’encadre que très peu l’action future du Gouvernement et je le déplore.

Le rapporteur nous a d’ailleurs confié qu’il souhaitait la suppression de l’article 21, en vue d’avoir ce débat dans un futur projet de loi relatif au numérique. J’approuve évidemment la sagesse de notre rapporteur sur ce sujet.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP s’abstiendra sur ce texte, qui traite de tellement de sujets en occultant les débats qui sont l’essence même du Parlement.

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