Intervention de Karine Berger

Séance en hémicycle du 18 septembre 2014 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière économique et financière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Berger :

Une loi d’habilitation peut paraître technique, car le coeur des mesures ne fait pas l’objet d’un débat parlementaire, comme l’a rappelé Mme Dalloz dont je partage d’ailleurs le sentiment s’agissant de l’importance de la discussion parlementaire.

Si le texte que nous examinons aujourd’hui est important, c’est parce qu’il va bouleverser – il n’y a pas d’autre terme – l’organisation financière et bancaire de notre pays, comme celle de tous les autres pays européens.

Même si ces questions sont complexes, les changements qui résulteront de cette loi d’habilitation auront un impact sur la vie quotidienne des Français et des entreprises.

Je voudrais donc mettre l’accent sur quelques éléments-clés des dispositions que vous, monsieur le secrétaire d’État, avez la très lourde tâche de transposer dans notre droit français quand nous vous en aurons donné la possibilité.

Toutes ces mesures de régulation – régulation du libéralisme financier, régulation du capitalisme – partent d’un constat extrêmement simple : le libéralisme économique et financier a échoué en 2008. Il a précipité la faillite non seulement de banques – c’est bien connu –, mais aussi de compagnies d’assurance, à travers la faillite d’AIG : cela est peut-être un peu moins connu.

D’une certaine façon, en 2008, le libéralisme économique et financier s’est auto-liquidé dans ses excès et malheureusement, il a entraîné dans ses déboires beaucoup de salariés et d’épargnants.

Dans son discours de politique générale, d’ailleurs, le Premier ministre a rappelé qu’il croyait à la « main visible de l’État », contre la main invisible du marché. Nous allons clairement vers une main visible de la Commission et de l’ensemble des pays européens.

Nous parlons d’abord d’un texte qui va transposer en droit français ce que l’on appelle « Solvency II ». Ce n’est pas rien : nous allons avoir la possibilité de vérifier que l’ensemble du système assurantiel européen, et particulièrement français, ne prend pas des risques tels qu’ils conduisent de nombreux Français à perdre leur épargne.

Quel est le principe de Solvency II tel que vous allez le transcrire ? C’est très simple : on ne peut pas, quand on est un assureur, avoir d’un côté l’argent des épargnants avec une certaine sécurité et, de l’autre, placer cet argent dans des actifs qui ne présentent aucune sécurité. On ne peut pas récupérer l’argent des épargnants qui doit être liquide à court terme si, dans le même temps, on place cet argent dans des actifs à vingt ou trente ans.

Pourquoi ces mesures de Solvency II qui, techniquement, s’appellent « ratio de liquidité », « ratio de solvabilité », sont-elles absolument déterminantes pour les épargnants français ? Parce que rien, aujourd’hui, n’assure dans le droit français que la situation que AIG a connue en 2008 ne puisse pas se reproduire. Pire : si nous allions, dans les mois qui viennent, vers une titrisation des avoirs bancaires et que celle-ci se traduise par l’arrivée dans les actifs des assureurs français de titres qui seraient nommés d’une certaines façon, mais recouvriraient un risque important, eh bien nous serions en train de recréer exactement les conditions qui ont mené à la faillite d’AIG en 2008.

Solvency II vise justement à éviter une telle situation. Je sais que certains assureurs ont eu du mal à accepter ces nouvelles règles, mais au nom des épargnants français, nous avions l’obligation, nous État et « main visible », d’imposer ces recommandations.

Quant à l’Union bancaire, c’est un domaine beaucoup plus technique, beaucoup plus abscons, mais qui nous révèle quelque chose de fantastique : la solidarité en matière financière, dans l’Union européenne, existe. Je crois, pour ma part, que c’est la première fois que nous parlons de « solidarité financière » au niveau de la zone euro. C’est une solidarité financière qui est en train de balbutier, puisque nous n’en avons encore que la promesse et le calendrier, mais toujours est-il qu’elle va être transcrite.

Je crois savoir, monsieur le secrétaire d’État, que vous allez nous proposer de transposer également la directive MiFID sur les marchés d’instruments financiers. Je souhaite que vous nous en disiez plus lorsque vous soutiendrez vos amendements car c’est encore un chantier énorme.

Ce texte prévoit de plus la mise en oeuvre d’un mécanisme de transparence financière non seulement pour lutter contre l’évasion fiscale de certaines grandes entreprises multinationales, mais aussi pour protéger les pays en voie de développement. Ces mesures-là vont faire l’objet d’un débat auquel nous allons évidemment participer.

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