Intervention de Gabriel Serville

Séance en hémicycle du 14 novembre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Article 56

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, la Guyane se caractérise par une sous-scolarisation, un chômage massif, une forte insécurité, le pillage de ses ressources. Envisager de fragiliser un dispositif d'accompagnement à l'investissement dans les outre-mer risque de compromettre sérieusement toutes les chances de redresser leurs économies, singulièrement en Guyane. Peut-être sommes-nous confrontés à un problème de sémantique et au lieu de défiscalisation devrait-on parler d'appui à l'investissement productif et au logement social.

Ce dispositif sert à flécher les financements vers les secteurs où l'on ne peut se procurer de trésorerie à des conditions normales et où les opérateurs ne sont pas suffisamment crédibles aux yeux du peu de banquiers de la place. Il sert aussi à compenser les surcoûts du fait de l'éloignement. En métropole, le coût du transport est parfois presque insignifiant. Nul besoin de faire appel à des intermédiaires, pas de délais d'acheminement de trente jours, pas de paiement d'avance à la commande, pas d'octroi de mer. C'est facile, pas cher et rapide.

En Guyane, c'est à 30 % à 50 % de frais d'approche supplémentaires que nous devons faire face. La défiscalisation est un dispositif qui a toujours compensé une partie de ces surcoûts. Le terme « défiscalisation » destiné à attirer les investisseurs est certes très vendeur, mais reflète mal la réalité du terrain où il correspond à un véritable soutien à l'investissement matériel, exactement comme le pacte de compétitivité de M. Jean-Marc Ayrault est un soutien à l'investissement social, doté de près de 20 milliards d'euros.

S'agissant de la méthodologie, je considère que commencer par annoncer que l'on va supprimer le dispositif avant de d'annoncer le suivant multiplie les incertitudes. De plus, l'Europe doit donner son aval sur les modifications de la défiscalisation. Je note au passage que la LODEOM votée en mars 2009 et promulguée en mai 2009 a bloqué les agréments fiscaux jusqu'à décembre 2009. Ainsi, les investissements de fin 2009 et 2010 ont été plus faibles. En 2011, ils ont a priori augmenté de 26 % en Guyane. En fait, c'était surtout un rattrapage des dégâts de la mise en place de la LODEOM. Avec l'annonce de cette suppression, on va provoquer la même chose.

Il faut d'abord voter et promulguer le nouveau texte. Il sera applicable pour 2014 si le vote et la promulgation ont lieu avant 2013. À mon avis, il faudra décaler d'au moins six mois, la LODEOM ayant mis deux ans à sortir ! Il faudra donc laisser au moins huit mois entre le vote du texte et sa date d'effet, le temps de passer par la Commission européenne.

Sachez que, pour la Guyane, les conséquences d'une nouvelle réduction de la défiscalisation seront désastreuses : moins d'investissement, une augmentation des prix de 5 % à 10 %, la paupérisation de la population, moins de logements, le développement de bidonvilles, la réduction des capitaux propres des entreprises, moins d'embauches des arrivants sur le marché, et un accroissement du chômage.

J'en appelle solennellement à la responsabilité de la représentation nationale. Il faut procéder à une évaluation approfondie du dispositif avant d'en changer les termes. J'espère que tout le monde comprendra le sens de notre démarche.

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