Intervention de Marc-Philippe Daubresse

Séance en hémicycle du 20 novembre 2012 à 15h00
Mobilisation du foncier public en faveur du logement et renforcement des obligations de production de logement social — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc-Philippe Daubresse :

Comme je l'avais indiqué à cette tribune lors de la première présentation de ce texte, la méthode utilisée par le gouvernement de M. Ayrault au début de la session extraordinaire de septembre était contraire à tous les principes constitutionnels résultant de la réforme de 2008 voulue par Nicolas Sarkozy, et même à ceux qui lui préexistaient. L'avenir nous a donné raison. Le Gouvernement avait imposé au Sénat d'examiner en moins de six jours ce texte d'une grande importance pour l'avenir de nos collectivités territoriales. Il avait également imposé à l'Assemblée nationale une procédure accélérée qui n'avait pas permis un travail sérieux en commission.

Pourtant, le logement est une question complexe et particulièrement importante, qui mérite toute l'attention des parlementaires et justifierait la recherche d'un consensus national par la concertation plutôt que par la coercition.

La précipitation du Gouvernement prive notre assemblée du travail de fond indispensable en amont pour aboutir à une loi bien construite au service de l'intérêt général. Pour remplir un agenda politique insuffisant, le Gouvernement préfère à nouveau contourner les droits du Parlement et de l'opposition, notamment le droit d'amendement, et risquer l'adoption d'une loi bâclée. En agissant ainsi, il va à l'encontre de l'objectif initial et réduit l'efficacité des outils mis à disposition des collectivités et des constructeurs, qu'ils soient bailleurs ou qu'ils aient un autre statut.

En 2008, les parlementaires de gauche – communistes, socialistes et écologistes – estimaient que les pouvoirs du Parlement n'étaient pas suffisants. Nous avons procédé en juillet 2008 à une réforme constitutionnelle qui visait trois objectifs majeurs : le meilleur contrôle du pouvoir exécutif, le renforcement profond du Parlement, et la création de droits nouveaux pour les citoyens. Afin de renforcer les pouvoirs de la représentation nationale, la procédure législative a été encadrée dans un certain nombre de délais pour que le travail parlementaire puisse se dérouler dans des conditions raisonnables.

Chers collègues de gauche, vous estimiez vous-mêmes, autant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, que six semaines constitueraient un délai minimum pour permettre un travail sérieux et qu'il faudrait, sur des textes aussi importants que celui-ci, non seulement garantir la navette parlementaire autant que nécessaire, mais aussi donner aux commissions la possibilité de réaliser en amont des analyses, des expertises et des études d'impact en prévoyant des délais complémentaires. En somme, vous nous demandiez à l'époque de respecter le Parlement et de vous laisser faire votre travail.

Et voilà que vous faites exactement le contraire : quand on regarde la manière dont vous procédez, on peut se demander où sont passés les articles 42 et 44 de la Constitution. Où sont les délais prévus ? Les droits des parlementaires s'exercent naturellement en conférence des présidents, à qui la Constitution reconnaît désormais la possibilité de se prononcer sur l'opportunité de l'engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement – c'est l'article 45 de la Constitution – et sur le respect par l'étude d'impact accompagnant chaque projet de loi des prescriptions édictées par la loi organique – c'est l'article 39 de la Constitution. Le 24 octobre, le Conseil constitutionnel, saisi par les sénateurs et les députés du groupe UMP, a pris acte de ce déni des droits du Parlement en déclarant votre loi inconstitutionnelle parce qu'elle ne respectait pas les articles 29, 39, 42, 44, 45 et 51-1 de la Constitution – excusez du peu ! –, ni l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats parlementaires.

Notre motion de procédure était donc bien justifiée la fois dernière. À cette époque qui n'est pas si éloignée, vous nous aviez traités avec mépris et arrogance dans vos réponses : vous m'aviez dit que je n'avais pas démontré l'inconstitutionnalité du texte.

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