Intervention de Véronique Massonneau

Séance en hémicycle du 2 décembre 2014 à 15h00
Délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Massonneau :

…de prendre en compte la honte qu’elles ressentent souvent et doivent surmonter, de reconnaître la douleur, le déchirement qu’elles vivent lorsqu’il faut déposer plainte contre son père, son oncle ou son frère.

Ces femmes, ces hommes, ces enfants doivent trouver le temps de se reconstruire avant de pouvoir – parfois – accepter cette blessure, accepter de vivre avec, accepter d’en parler. La justice doit intégrer dans son fonctionnement ce temps de reconstruction personnelle, et ne pas fermer la porte aux victimes sous prétexte que ce temps douloureux aurait trop duré.

Les professionnels de santé le disent, l’amnésie post-trauma est longue, particulièrement quand les violences ont lieu dans l’enfance, et les chiffres sont accablants : la majorité des agressions sexuelles concernent des enfants, soit près de 150 000 cas par an, la plupart du temps dans le cadre familial.

Ces éléments font de l’agression sexuelle et du viol des infractions particulières, qui demandent légitimement un délai de prescription suffisamment long. Les victimes ont besoin d’être reconnues comme telles. Aujourd’hui, certaines d’entre elles peuvent être entendues en qualité de simple témoin. Si elles peuvent témoigner dans une procédure à l’encontre de leur agresseur engageant une autre victime, elles ne peuvent faire valoir leur droit légitime à réparation. Vous comprendrez comme moi que cela est difficile pour ces personnes, qui parlent parfois de double peine.

Certes, un allongement des délais de prescription risque de compliquer l’action de la justice, qui sera alors amenée à se prononcer sur des faits datant parfois de plusieurs décennies. Les souvenirs de la victime sont plus flous et les preuves s’estompent. Mais qui préfère refuser une plainte au motif que l’enquête est trop délicate à mener plutôt que de tenter de répondre aux attentes des victimes ? On ne peut pas accepter que des crimes restent impunis ou ne soient pas passibles de poursuites.

Alors, mes chers collègues, refusons de remettre à plus tard l’allongement des délais de prescription…

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