Intervention de Jacques Moignard

Séance en hémicycle du 8 décembre 2014 à 15h00
Convention entre la république française et la principauté d'andorre pour éviter les doubles impositions — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Moignard :

…alors que la Principauté d’Andorre sollicitait depuis assez longtemps la conclusion d’une telle convention en mettant notamment en avant l’imposition à la source trop lourde des débiteurs français bénéficiant de prestations rendues par des prestataires andorrans.

La convention fiscale entre la France et la Principauté d’Andorre a alors été signée à Paris le 2 avril 2013, cela a été rappelé tout à l’heure.

Quelles raisons ont poussé à cette signature ? A mon sens, il y en a trois.

Tout d’abord, le constat d’un effort andorran constant de transparence fiscale.

En effet, après la signature, en 2009 et 2010, de vingt accords relatifs à l’échange de renseignements en matière fiscale – avec, notamment, la France, l’Espagne, le Danemark et l’Allemagne – Andorre a été retirée de la liste grise des juridictions non coopératives de l’Organisation de coopération et de développement économique, comme Monaco et le Liechtenstein.

La Principauté d’Andorre a signé le 5 novembre 2013 la convention multilatérale de l’OCDE portant sur l’assistance mutuelle dans la lutte contre la fraude fiscale internationale, devenant ainsi – cela a également été rappelé – le soixantième signataire de ce texte.

Cette Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale renforce la coopération entre les administrations des pays signataires qui s’engagent à échanger leurs informations ou à organiser des contrôles simultanés.

En 2004, Andorre a conclu un accord avec l’Union européenne prévoyant des mesures en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiement d’intérêts.

Ainsi, en vertu de cet accord, la principauté pratique une retenue à la source non-libératoire de 35 % sur les revenus d’intérêts dont le bénéficiaire effectif est un résident personne physique d’un État membre de l’Union, et rétrocède 75 % du montant de cette retenue à la source à l’État de résidence de la personne.

Actuellement, la Commission européenne mène des négociations en vue de la révision de cet accord afin de tenir compte de la révision en cours de la directive sur la fiscalité de l’épargne.

Cette révision a pour objet d’étendre le champ des revenus couverts, notamment, à certains produits d’assurance-vie, et de couvrir les risques de contournement de la directive actuelle via l’interposition d’entités.

Le mandat de négociation prévoit également d’insérer dans l’accord entre Andorre et l’Union européenne une clause d’échange d’informations sur demande conforme à la norme internationale et d’explorer la possibilité de la mise en place de l’échange automatique d’informations.

Deuxième raison poussant à la signature de la Convention : la modernisation du cadre fiscal de la Principauté.

En effet, Andorre se distinguait jusqu’à la fin de 2010 par une organisation fiscale où il n’existait pas de système d’imposition directe sur le revenu des personnes physiques, sur les bénéfices commerciaux, ni sur le patrimoine.

Depuis, elle s’est dotée d’un cadre fiscal plus moderne en introduisant une fiscalité directe sur les bénéfices des sociétés, les revenus des activités économiques et l’ensemble des revenus des non résidents.

Cette législation s’est appliquée à compter du 1er janvier 2012 – ce qui est donc très récent.

Par ailleurs, une loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée d’un taux de 4,5 % – vous le disiez à l’instant, madame la secrétaire d’État – est entrée en vigueur le 1er janvier 2013.

Andorre prévoit d’introduire prochainement un impôt sur les revenus des personnes physiques.

Enfin, dernière raison et non des moindres : les échanges économiques franco-andorrans.

Les principaux partenaires commerciaux d’Andorre – cela a été rappelé tout à l’heure – sont les Etats membres de l’Union européenne, avec lesquels la Principauté réalise plus de 95 % de ses exportations.

Parmi eux, la France figure en très bonne position puisque, après l’Espagne, notre pays est son deuxième fournisseur de marchandises et son deuxième client, même si nos exportations ne représentent plus que la moitié de celles de l’Espagne alors que nos deux pays étaient à égalité dans la dernière décennie.

Cette convention devrait favoriser le retour à un équilibre.

Dès lors, elle ne pourra être que réciproquement bénéfique – cette formule est importante.

D’abord, sur le plan économique et financier.

Le risque de double imposition ne constituant plus une source d’incertitude pour les investisseurs – rassurés, par ailleurs, par des clauses anti-abus visant à prévenir le risque de non-imposition –, la convention contribue donc à augmenter le potentiel d’investissements croisés entre la France et la Principauté.

En outre, elle traduit le renforcement de la coopération fiscale entre les deux Etats.

Ensuite, la convention renforce la sécurité juridique des personnes morales et physiques en posant des règles claires applicables aux opérations impliquant des résidents des deux États.

Puis, elle définit les modalités de répartition des droits d’imposition des revenus entre les deux Etats contractants et les conditions dans lesquelles s’effectuera l’élimination des doubles impositions supportées par les résidents.

La convention prévoit, notamment, la limitation de l’imposition à la source en fixant des taux d’imposition de 5 % sur les revenus passifs – dividendes, intérêts et redevances.

Elle instaure également des mécanismes visant à interdire l’usage abusif des stipulations conventionnelles et à éviter les situations de double exonération.

Enfin, cette convention bénéficiera d’une organisation de l’administration fiscale efficace.

En effet, la direction générale des finances publiques, la DGFIP, responsable de l’application des conventions fiscales conclues par la France, sera chargée de l’application de la présente convention.

Les modalités administratives d’application de la présente convention seront identiques à celles applicables à l’ensemble des conventions fiscales conclues par la France.

Ainsi, pour leur impôt sur le revenu et sur les sociétés, les personnes résidentes de France pourront bénéficier des crédits d’impôt auxquels elles auront droit en application de cette convention.

De son côté, la direction des résidents à l’étranger et des services généraux, la DRESG – direction de la DGFIP à compétence nationale – sera compétente pour recevoir les déclarations des personnes résidentes de la Principauté.

Quant au contrôle des déclarations, il sera effectué par le service de la DGFIP territorialement compétent et par celui de la DRESG pour les résidents de la Principauté.

Enfin, une évaluation de l’effectivité de l’échange de renseignements sera présentée chaque année lors de la préparation du projet de loi de finances.

Par conséquent, le groupe Radical, Républicain, Démocrate et Progressiste soutient le projet de loi autorisant l’approbation de cette convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu, laquelle renforcera des liens – cela a été dit à l’instant – vieux de sept siècles, et peut-être plus, avec la Principauté.

Je ne saurai trop vous engager, mesdames, messieurs, chers collègues, à visiter ce beau pays qu’est l’Andorre, dans lequel je me rends très souvent.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion