Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui en première lecture nous vient du Sénat, où elle a été déposée, le 24 juillet 2014, par les sénateurs Alain Richard et Jean-Pierre Sueur. Une question d’actualité avait été posée préalablement par le groupe UMP, suivie le 3 septembre par un texte quasiment identique déposé par les sénateurs UMP Gélard, Leleux et Milon.
Cette proposition de loi est relative à la représentation des communes au sein des communautés de communes ou d’agglomération. Elle vise à remédier aux conséquences résultant pour les intercommunalités de la déclaration d’inconstitutionnalité des dispositions de la loi du 16 décembre 2010 encadrant l’accord amiable adopté par les conseils municipaux concernés pour la fixation du nombre de sièges communautaires et leur répartition entre les communes membres d’une communauté d’agglomération ou d’une communauté de communes.
En ce qui me concerne, c’est la communauté de communes du Genevois qui a appelé mon attention sur cette question, car elle venait d’être touchée par les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 qui faisait passer le nombre de ses conseillers communautaires de 52 à 42. Si toutes les communes restent représentées, deux voient leur nombre de délégués passer de trois à deux, excluant de fait l’unique membre de la minorité démocratiquement élu, et surtout huit d’entre elles n’ont plus qu’un seul délégué.
Ce territoire, situé dans l’agglomération du Grand Genève, compte 38 000 habitants, répartis dans 17 communes. Saint-Julien-en-Genevois, la ville-centre, qui compte 12 000 habitants, ainsi que les quatre bourgs – Viry, Valleiry, Collonges-sous-Salève et Beaumont, qui rassemblent un peu plus de 13 000 habitants – pourraient en théorie, compte tenu de la nouvelle composition du conseil communautaire, impulser un type de développement du territoire qui ne correspondrait pas aux douze autres collectivités. Mais l’accord local trouvé au sein de ce conseil communautaire permettait, dans l’esprit de la loi, d’équilibrer la représentation du territoire entre une part prépondérante accordée à la représentation au prorata de la population et une représentation minimale de chaque commune.
C’est cet équilibre local qu’est venu bouleverser la décision du Conseil constitutionnel en excluant formellement du conseil communautaire du Genevois des élus qui étaient fortement investis dans la vie communautaire. Souvent premier adjoint ou premier membre de la minorité communale, ces élus voient dans l’intercommunalité une solution aux problèmes du territoire. Leur enlever la possibilité de s’investir est fortement démotivant et « ne favorise pas le rapprochement entre les élus locaux et l’intercommunalité », vous ont-ils d’ailleurs écrit, monsieur le secrétaire d’État, dans un courrier commun daté du 18 novembre 2014 et signé par les maires du territoire ainsi que par les conseillers communautaires évincés.
Aussi ai-je décidé, avec l’accord du sénateur Leleux, de reprendre à mon compte la proposition de loi du groupe UMP du Sénat et de la déposer sur le bureau de l’Assemblée nationale, ce que j’ai fait le 14 octobre dernier avec mes collègues haut-savoyards Martial Saddier et Lionel Tardy. Cette proposition de loi, enregistrée sous le no 2287, vise à remédier à ces situations.
Comme le texte que nous examinons aujourd’hui, elle entend établir des limites chiffrées aux écarts de représentation issus d’un accord local, en cohérence avec la jurisprudence fixée par le Conseil constitutionnel en matière de représentation électorale. Ainsi les communautés affectées par une modification de leur organe délibérant se voient-elles offrir enfin la possibilité de conclure un nouvel accord tel qu’encadré par la proposition de loi dans les six mois suivant sa promulgation.
La commission des lois de l’Assemblée nationale ayant totalement réécrit la proposition de loi adoptée par le Sénat – au point d’en modifier même le titre, qui devient « proposition de loi autorisant l’accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire » – au motif que le dispositif voté par le Sénat comportait toujours des risques constitutionnels importants, nous sommes maintenant en droit d’espérer la fin de cette instabilité juridique, préjudiciable au fonctionnement des EPCI. Nous pouvons espérer qu’enfin, les EPCI concernés, plongés dans l’expectative depuis le 20 juin, puissent en sortir et retrouver leur équilibre.
Mettons fin à toute précipitation et luttons contre l’amateurisme qui vous avait amené en décembre 2012 à retoucher la loi de 2010 pour, je cite, la rendre plus attractive. Votons vite, car il y urgence – mais de façon raisonnable, comme le réclamait de façon prémonitoire Philippe Gosselin un certain 19 décembre 2012 à minuit.
Pour ma part, je voterai donc cette proposition de loi.