Intervention de Olivier Falorni

Séance en hémicycle du 22 janvier 2015 à 9h30
Faciliter l'exercice par les élus locaux de leur mandat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Falorni :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner la proposition de loi, adoptée par le Sénat le 22 janvier 2014, visant à faciliter l’exercice par les élus locaux de leur mandat.

Cette proposition de loi n’est pas nouvelle. Déposée au Sénat par Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur en novembre 2012, elle est l’oeuvre d’un consensus. Ce consensus s’illustre par l’adoption conforme, en première lecture, de six articles, auxquels s’ajoutent cinq articles votés conformes en seconde lecture par le Sénat. Restent soumis à notre examen, dans le cadre de la navette, neuf articles destinés à améliorer encore le statut de l’exercice de leur mandat par les élus locaux.

Ainsi, nous sommes satisfaits de la mise en place d’une charte de l’élu local qui prévoit que l’élu « exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité » ; qu’il « poursuit le seul intérêt général à l’exclusion de tout intérêt particulier » ; qu’il « veille à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts » et « s’engage à ne pas utiliser les ressources et les moyens mis à sa disposition » à d’autres fins que « l’exercice de son mandat ou de ses fonctions » ; qu’il « s’abstient de prendre des mesures lui accordant un avantage personnel » ; qu’il « participe avec assiduité aux réunions » et « reste responsable de ses actes » durant son mandat. Si ces dispositions vont de soi, il n’était pas inutile de les préciser.

Pour autant, nous déplorons la suspicion que jette sur les élus locaux le recours à une nouvelle législation dans ce domaine. La mise en place d’une charte des bonnes pratiques insinue que ces bonnes pratiques font défaut dans l’exercice de leur mandat par les élus locaux.

Nous validons la mise en place d’une égalité de traitement entre les membres des organes délibérants et les élus assumant des fonctions exécutives ou ayant reçu un mandat spécial en ce qui concerne les remboursements des frais de garde d’enfants et d’assistance à la personne occasionnés par l’exercice d’un mandat.

En effet, l’exercice effectif d’un mandat par un élu, y compris lorsque celui-ci ne dispose pas d’une fonction exécutive, demande un engagement complet de sa part et l’expose à endosser des frais subsidiaires liés à l’obligation d’être présent au sein des réunions et conseils.

La mise en place d’une dégressivité des indemnités perçues par les élus locaux, susceptible d’atteindre la moitié de l’indemnité pouvant être allouée et tenant compte de leur participation réelle aux séances plénières et aux réunions des commissions, nous semble être une bonne disposition, car cette participation est nécessaire à l’exercice effectif du mandat local.

Nous sommes également satisfaits de la mise en place, pour les élus locaux, d’un droit à suspension du contrat de travail pendant l’exercice des fonctions électives et d’un droit à la réintégration professionnelle quand elles arrivent à leur terme. Ces droits participent de la conservation de représentants pleinement investis dans leurs missions.

Dans le même temps, nous souscrivons au renforcement des mesures d’adaptation de l’emploi pour les élus.

Ainsi, la reconnaissance d’un congé de formation professionnelle et l’instauration d’un bilan de compétences constituent des avancées intéressantes pour l’ensemble des élus. Nous constatons avec satisfaction que le seuil de population des communes dont les adjoints se voient reconnaître cette possibilité a été abaissé de 20 000 à 10 000 habitants en première lecture car il est apparu inéquitable de faire bénéficier de ce dispositif les seuls élus des grandes villes.

La proposition prévoit également d’intégrer l’exercice d’une fonction élective locale ou d’un mandat électoral à la liste des activités susceptibles de permettre l’obtention d’un diplôme ou d’un titre délivré, au nom de l’État, par un établissement d’enseignement supérieur au titre de la valorisation des acquis de l’expérience. En coordination avec la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie locale, cette disposition permet de reconnaître les connaissances acquises par les élus dans le cadre de l’exercice de leur mandat.

Toutefois, nous sommes étonnés par certaines dispositions contenues dans le texte. Nous pensons, à l’instar des sénateurs, qu’il aurait été judicieux de redéfinir et de préciser la notion de prise illégale d’intérêts pour les élus locaux en introduisant l’élément moral et en précisant que celle-ci s’entend de la prise d’un « intérêt personnel distinct de l’intérêt général » afin de restreindre le champ d’application de ce délit. Mais la commission des lois a préféré supprimer cette précision et en rester à la définition générale de la prise illégale d’intérêts prévue par l’article 432-12 du code pénal.

Cette proposition de loi, en précisant dans la charte de l’élu local que l’élu reste « responsable de ses actes » durant son mandat « devant l’ensemble des citoyens de la collectivité territoriale », permet également de rouvrir le débat sur la responsabilité pénale des élus locaux. Ce débat nous semble nécessaire.

En revanche, non seulement le Gouvernement n’a pas souhaité donner suite à la proposition faite par le groupe RRDP, dans le cadre de nos débats sur le non-cumul des mandats, d’instaurer le non-cumul des indemnités, mais la proposition de loi qui nous est soumise propose d’étendre encore la possibilité de bénéficier des allocations de fin de mandat. Nous nous interrogeons sur la pertinence de ce dispositif.

Nous trouvons également excessif le dispositif prévu par l’article 5 bis visant à reconnaître aux élus un droit individuel à la formation qui pourrait concerner des formations sans lien avec l’exercice du mandat d’élu.

Nous nous sommes avec constance opposés à la professionnalisation des fonctions électives. Les mandats des élus doivent demeurer une mission reconnue et accordée par le corps électoral à titre provisoire, la limitation de durée gageant de la bonne application et de l’exercice effectif d’un mandat dont l’objet est la satisfaction de l’intérêt général, contingent d’un État.

Comme le demandait déjà notre collègue Alain Tourret – mais le débat est ancien –, « faut-il vivre pour la politique ou vivre de la politique ? » En effet, éviter la professionnalisation permet de reconnaître la spécificité des fonctions électorales exercées. Étant fermement attachés à cette distinction, nous notons avec satisfaction que cette proposition de loi reconnaît les droits et les garanties des élus locaux.

Pour autant, nous restons attentifs à ce qu’elle n’aille pas à l’encontre de ses objectifs en reconnaissant un droit au travail de l’élu et, plus globalement, qu’elle amène une reconnaissance de la profession d’élu local.

Accorder des droits pour plus de sécurité nous semble être l’un des atouts de cette proposition de loi, mais nous ne souhaitons pas aller plus loin que le texte qui a été voté par la commission des lois de notre assemblée dans le cadre des droits à la formation professionnelle des élus.

Ainsi que l’a souligné notre collègue Jacques Mézard lors des débats au Sénat, cette proposition de loi apporte quelques légères améliorations pour le statut des élus locaux. Alors, pourquoi ne pas la voter ? Aussi, et pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe RRDP votera le texte qui nous est soumis aujourd’hui.

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