Malgré vos arguments, monsieur le ministre, je reste dubitatif, et cela pour trois raisons principales.
D’abord, je l’ai évoqué tout à l’heure, il y a chez les mandataires judiciaires une expertise, une cohérence professionnelle. En réalisant ce transfert, même si vous le limitez aux procédures concernant des chiffres d’affaires inférieurs à 100 000 euros, vous rompez cette cohérence professionnelle. Lorsque l’on examine la situation à l’étranger, on s’aperçoit que si, juridiquement, il n’existe pas nécessairement un corps de professionnels ayant la qualité de mandataires judiciaires, dans beaucoup de pays européens une telle expertise existe et il y a la volonté de la professionnaliser davantage. Il serait pour le moins paradoxal qu’au moment où les autres pays cherchent à développer l’activité de mandataire judiciaire, parce qu’il s’agit précisément d’une activité économique spécifique, la France fasse le choix inverse !
Ensuite, notre collègue Cherpion l’a mentionné, à travers ce dispositif vous allez fragiliser un certain nombre de mandataires judiciaires, puisque vous allez leur enlever une partie de leur activité. Si, comme c’est souvent le cas en milieu rural, les petites créances représentent une partie significative de celle-ci, vous les condamnerez à arrêter. En définitive, vous allez mettre les mandataires judiciaires en redressement judiciaire : voilà qui serait plutôt cocasse !
Enfin, si l’on se place du strict point de vue de la rentabilité et de la viabilité économique, pourquoi un dossier non rentable le deviendrait-il dès lors qu’il serait transféré chez l’huissier de justice ? La problématique reste la même !