J’ai l’impression, comme Sisyphe, de pousser mon rocher et de le voir perpétuellement retomber. Mais ce n’est pas grave, il faut se montrer opiniâtre. Là aussi, monsieur le ministre, le recours à l’article 38 de la Constitution pose un problème majeur. Vous y recourez pour trois raisons.
La première tient à la transposition d’une directive. Vous me direz qu’il s’agit d’une directive modeste, puisqu’elle se propose simplement de moderniser les conditions d’exercice de la profession d’expert-comptable. Mais quand même, monsieur le ministre, nous sommes des parlementaires nationaux. Il est vrai que nous avons consenti, à juste titre, beaucoup de transferts de souveraineté. La construction du droit européen est une belle oeuvre quand elle se fait sur un fondement progressiste.
Mais trouvez-vous normal de déposséder la représentation nationale du droit de transposer la directive en question ? Le peuple français a, par plusieurs référendums, consenti un transfert direct de souveraineté. Nous, représentants du peuple, devons veiller à ce que le retour de ces transferts de souveraineté se fasse conformément à leur esprit. Et vous dépossédez la représentation nationale du droit fondamental de transposer les directives. Qu’aurions-nous dit si, s’agissant de la directive relative aux procédures d’asile, et au nom de son caractère technique, puisque la dernière loi consacrée à ce sujet avait principalement pour objet de transposer des directives, on nous avait imposé le recours aux ordonnances ?
Je le dis à mes collègues de gauche, accepter le recours aux ordonnances alors qu’il s’agit de transposer une directive européenne me paraît extrêmement surprenant.