Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, la richesse que constitue la multitude des territoires communaux de la France est aussi une faiblesse pour l’administration de notre pays. Celui-ci comptait en effet, au 1er janvier 2014, 36 681 communes, dont 90 % comptent moins de 2 000 habitants. Cette exception territoriale française représente, à titre de comparaison, 40 % de l’ensemble des communes de l’Union européenne à vingt-huit. Il existe donc de manière indéniable un problème de rationalisation à l’échelle communale.
En France, toutes les politiques visant à la réduction du nombre des collectivités communales ont été des échecs. Ces différentes tentatives avortées s’expliquent par un attachement très fort à l’échelon de base de la pratique de la démocratie.
Pourtant, si certains voient dans la proximité un atout, elle n’est pas sans comporter des inconvénients. De fait, les plus petites communes n’ont pas les moyens de supporter les coûts liés à l’exercice de certaines de leurs compétences et leur capacité à fournir des services publics de qualité est remise en cause. Ainsi, certaines ont même rencontré des difficultés pour organiser des élections municipales en 2014. La loi du 16 décembre 2010 s’inscrirait donc dans une certaine continuité.
La création de communes nouvelles a pour objet, selon les termes de l’exposé des motifs, de substituer un nouveau dispositif de fusion de communes, plus simple, plus souple et plus incitatif que celui qui est issu de la loi de 1971. Cette création, qui reste largement fondée sur le volontariat des communes existantes, a été un échec, car une douzaine de communes nouvelles seulement ont été créées au 31 décembre 2013. La jeunesse de ce dispositif et l’impossibilité de créer une commune nouvelle l’année précédant le renouvellement général des conseils municipaux expliquent en partie la faiblesse quantitative de ce résultat.
La proposition de loi présentée aujourd’hui devant nous et relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle reprend la proposition no 10 du rapport Malvy-Lambert d’avril 2014, visant à encourager et à faciliter le dispositif des communes nouvelles pour faire face aux difficultés que rencontrent les plus petites de nos communes.
Cette proposition de loi offre un assouplissement des conditions de composition du conseil municipal de la commune nouvelle pendant la période transitoire, permettant jusqu’au prochain renouvellement municipal que l’ensemble des membres des anciens conseils municipaux puissent être présents dans le conseil municipal de la commune nouvelle et que chaque maire délégué soit également adjoint au maire de cette dernière, de telle sorte que l’ensemble des sensibilités et des listes présentes continueront d’être représentées.
La possibilité de création d’une « conférence municipale » permettra de faciliter le fonctionnement de la commune nouvelle en regroupant dans une même instance le maire et les maires délégués.
La possibilité pour les communes intégrant la commune nouvelle d’acquérir le statut de « commune déléguée » est simplifiée, sauf opposition renforcée du conseil municipal à la majorité des deux tiers, et non pas seulement à la majorité simple, comme précédemment. Afin de permettre plus facilement aux territoires des anciennes communes de conserver la nécessaire proximité entre les élus et la population, les anciennes communes qui composent la commune nouvelle peuvent garder le statut de commune déléguée.
La création des communes nouvelles interrégionales ou interdépartementales est également facilitée en prévoyant que les conseils départementaux et régionaux ne puissent s’opposer à leur création que par une délibération motivée.
L’existence d’un régime financier favorable aux communes nouvelles constitue un aspect très important pour l’efficacité de ce dispositif, créant un véritable pacte financier incitatif.
La principale incitation à créer une commune nouvelle contenue dans cette proposition de loi est le pacte de stabilité de la DGF pour les trois premières années suivant cette création, dès lors que cette commune compte moins de 10 000 habitants. Ainsi, toutes les communes nouvelles de moins de 10 000 habitants créées avant le 1er janvier 2016 bénéficieront de l’exonération de la baisse des dotations de l’État, ce qui leur assure un montant de DGF au moins égal à la somme des montants perçus à ce titre par les anciennes communes l’année précédant la création.
Ce pacte de stabilité concernerait également les dotations de péréquation – dotation de solidarité rurale, dotation nationale de péréquation et dotation de solidarité urbaine.
Cette proposition de loi est, vous l’admettrez, mes chers collègues, assez consensuelle, tant dans le but poursuivi de simplification et d’efficience du bloc communal, que politiquement. La stratégie semble désormais être de s’appuyer sur l’essor des structures intercommunales en leur permettant de se transformer en communes nouvelles avec des incitations fiscales.
L’intérêt de cette disposition est donc indéniable.
Elle permettra à des EPCI dont les communes membres connaissent déjà les avantages qu’il y a à exercer en commun certaines de leurs compétences de mutualiser leurs moyens et de se transformer en réelles collectivités. Habituées à fonctionner au sein d’un EPCI, les communes membres pourraient être moins réticentes à une telle fusion.
Cette proposition de loi me semble être une réponse pragmatique qui permettra de remédier à ce mal français que constitue l’émiettement communal dans notre pays. Nous devrons toutefois être attentifs à l’efficacité réelle de ce dispositif.
Il nous appartient, si nous le votons – comme je l’espère et comme je vous appelle tous à le faire –, de communiquer et de promouvoir ce texte par l’intermédiaire des associations départementales des maires et les commissions départementales de coopération intercommunale. En d’autres termes, il faudra le faire savoir, afin que cette démarche puisse trouver une issue positive et se multiplier.
Mais avant tout, mes chers collègues, il faut le voter ce soir.