Intervention de Bernard Gérard

Séance en hémicycle du 24 mars 2015 à 22h00
Questions sur la politique pénale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Gérard :

À deux reprises, le législateur a jugé nécessaire de préciser les conditions légales dans lesquelles un juge d’instruction était habilité à opérer une perquisition du cabinet d’un avocat afin de contenir les abus manifestes qui s’étaient produits dans la pratique judiciaire.

L’article 56-1 du code de procédure pénale fut ainsi complété par la loi du 15 juin 2000, pour que le bâtonnier de l’Ordre des avocats assiste à la perquisition de son confrère et puisse s’opposer à la saisie d’un document. La loi du 12 décembre 2005 prohiba quant à elle toute saisie incidente lors de telles perquisitions, en imposant aux magistrats de spécifier l’objet et le but de la perquisition par une décision spéciale et préalable.

Malgré ces dispositions protectrices du secret professionnel des avocats, qui est un fondement de l’exercice même de cette profession et une liberté constitutionnelle à nouveau reconnue dans une décision du 26 septembre 2014, un juge d’instruction a récemment perquisitionné le cabinet d’un avocat auquel est reprochée la production d’une pièce d’un client à l’appui d’une demande de remise en liberté. La justice est saisie de cette affaire et se prononcera en temps voulu. Cet événement a provoqué une très vive protestation des avocats, attachés à juste titre à une protection effective de leur secret professionnel et profondément choqués par ce qui leur est apparu comme une présomption de fraude pesant sur l’un des leurs, qui ne dispose pas de pouvoirs d’investigation particuliers pour s’en prémunir. La première chambre civile de la Cour de cassation avait pourtant jugé, dans un arrêt du 31 octobre 2012, qu’un avocat n’avait pas à vérifier l’authenticité d’un document remis par son client, ce dernier ayant à son égard une obligation de loyauté et de sincérité.

Afin de mieux garantir l’exercice de la défense par les avocats, il apparaît urgent de préciser dans les termes de l’article 56-1 du code de procédure pénale que les perquisitions dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile doivent être strictement proportionnées aux données objectives de l’affaire et ne jamais procéder d’une présomption de fraude commise par l’avocat qui est visé.

Il est loin, le temps où magistrats et avocats arrivaient à se parler sous ce que l’on appelait la foi du Palais. Que comptez-vous faire, madame la garde des Sceaux, pour maintenir le lien de confiance et de respect nécessaire et indispensable entre les avocats dans l’exercice de leurs fonctions et l’institution judiciaire dont ils sont des auxiliaires ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion